Douzième partie - chapitre 71

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Note d'autrice : C'est parti ! Je sais que plusieurs d'entre vous attendaient l'arrivée à la partie menant la punition de Mathieu. Eh bien... on y va. :)

***

Quand Mathieu sonna à l'interphone, ça faisait une dizaine de minutes que Claire avait fini de se préparer et qu'elle attendait dans l'entrée.

Elle observait l'appartement.

Elle voyait la lumière du jour filtrer à travers les rideaux, elle voyait le canapé usé, sur lequel elles s'étaient si souvent vautrées, avec Béné, elle voyait les ronds de tasses de café qui ne disparaissaient plus sur la table basse malgré toutes les fois où elles les avaient grattées, et puis la porte donnant sur la cuisine derrière laquelle traînaient deux casseroles en attente d'être lavées, et l'espace s'ouvrant sur les chambres, avec la tenture indienne que Camille avait ramenée de voyage et dont le bas était effilé. Elle laissait courir son regard. Le tableau, là. Les livres, en tas, en lignes, en travers, en diagonales, sur la bibliothèque. Chacun de ces détails comme différents, maintenant qu'elle allait les quitter. Et puis les cartons, surtout : ces éléments nouveaux qui, bien que remplis partiellement, marquaient déjà leur départ à venir, à elle et puis Camille.

Elle proposa à Mathieu de descendre le rejoindre. Il préféra monter.

Lorsqu'il poussa la porte, elle tourna la tête vers lui et, durant une seconde, quelque chose de fort passa entre eux. Quelque chose de douloureux, qui lui rappela les aveux avortés des dernières secondes de leur conversation téléphonique : ces paroles qui n'avaient pas voulu sortir. Les yeux de Mathieu semblaient refléter la même interrogation que quelques jours auparavant :

Est-ce que tu fuiras ?

Elle aurait voulu dire « non ».

Elle n'avait pas de réponse à lui donner. Pour ça, il aurait fallu savoir ce qu'elle était censée fuir, et elle ne savait rien de ce qui les attendait. Et en même temps, elle la ressentait, cette force incroyable qui la poussait vers lui et qui réclamait son contact, que Mathieu soit contre sa peau. Si elle s'était écoutée, elle lui aurait encore demandé de l'emmener ailleurs, là où les questions devenaient secondaires et où l'avenir n'avait pas à être envisagé, mais ç'aurait été fuir, justement. Echapper à la réalité ne la faisait pas disparaître. Il fallait bien l'affronter.

Olivier franchit la porte à son tour, en lui adressant un sourire qu'elle lui rendit, sincère, même si incomplet. Une moitié de sourire seulement, comme la partie d'elle-même qui se réjouissait de le voir. L'autre se perdait, en proie à des pensées trop confuses pour être exprimées.

– Tu es prête ? lui demanda Olivier.

Elle hocha la tête.

Mais, alors qu'elle relevait les yeux sur le visage de Mathieu, elle eut froid, soudain. Des frissons remontèrent en parcourant l'intégralité de son corps et elle perçut, chancelante, à quel point elle voulait Mathieu. Lui. Sa peau, son contact. Sa possession. Quand elle le vit traverser l'espace les séparant, son corps entier le lui cria. Que Mathieu s'empare d'elle comme il l'avait fait jusque-là, qu'il balaye tout de sa présence.

Les mains de Mathieu se posèrent sur ses hanches, la faisant trembler intérieurement, et elle contempla tout, avide : la manière dont ses mèches blondes naviguèrent devant ses yeux noirs quand son visage s'approcha du sien, l'angle fort de sa mâchoire, le tracé de ses lèvres... Elle ressentit son souffle contre sa bouche comme si là résidait la seule réalité, comme s'il n'existait plus que l'infime distance qui les espaçait encore. Les yeux de Mathieu étaient des gouffres, fascinants de besoin et de puissance. Il fixa sa bouche.

Elle avait mis un rouge vif qui appelait aux baisers, tout en en limitant les contacts.

Il souffla :

– Ce rouge à lèvres mériterait d'être ruiné.

– Alors, ruine-le, murmura-t-elle aussitôt.

Mais Mathieu ne bougea pas. Il réagissait comme si son maquillage était une barrière, tentante à anéantir mais qu'il ne franchirait pas.

Lorsqu'il plongea dans son regard, elle fut troublée par tous les sentiments dont il lui offrit l'accès. Il y avait tellement, en lui : autant de douceur que d'ombres, de désir que d'interrogations qui s'y tordaient, fiévreuses et torturées. Elle aurait voulu avoir des certitudes à lui donner : des réponses aux questions, de l'assurance... N'importe quoi qui lui échappait, sur l'instant.

– Tu es prête ? lui dit Mathieu.

Elle hocha la tête.

– Oui.

Qu'étaient-ils l'un pour l'autre ? Réellement, au-delà de leur rapport de dominant et soumise ? Dans une pulsion, elle songea à le demander à Mathieu mais elle se reprit : Olivier attendait à leurs côtés et ce n'était pas le moment pour une telle discussion.

L'initiation de Claire - Version Wattpad (roman édité chez Harlequin)Where stories live. Discover now