-Je sais qui tu es, Namjoon.

Je préférais le regarder dans les yeux, ne cherchant pas à éviter son regard. J'ai toujours préféré regarder les gens dans les yeux. On y voit et apprend beaucoup de choses quand on en connait le language. Et à cet instant, je le vis d'abord surpris puis un peu déçu. Est-ce que j'avais dit quelque chose de mal ?

-Oh c'est vrai... J'imagine que la compétition de Mardi a encore fait connaître mon nom...

Je vois. Donc le problème est qu'il n'aime pas sa popularité. Est-ce que c'est réellement un poids ? Je ne peux pas vraiment répondre à la question puisque je n'ai jamais connu ça. J'ai toujours préféré rester dans l'ombre. Je n'aime pas l'idée que des gens essaient d'en savoir plus sur moi que je n'en sais sur moi-même. Je ne lui réponds rien. Je ne ferais qu'enfoncer le couteau dans la plaie et peut-être même le faire partir. Mais je ne veux pas qu'il parte.

-Allons nous installer quelque part. Tu mérites des explications.

-Toi aussi.

-Si tu ne veux pas m'en parler, sache déjà je ne vais pas te forcer. Mais... Ce serait certainement plus utile.

-C'est la moindre des choses pour te remercier.

-J'ai fais ce que tout le monde aurait fait à ma place. Je n'allais pas t'y laisser.

-Monsieur Tout-Le-Monde se serait contenté de me tendre une main que j'aurais été incapable de prendre. Il m'aurait tiré en dehors du plongeoir, après avoir perdu patience, et m'aurait laissé à côté de l'eau en attendant que je me remette de l'expérience. Tu as fait bien plus que ça.

-Tu marques un point, me répondit-il après un petit moment d'hésitation. Allez, viens, on va s'asseoir quelque part.

Je ne réplique pas et le suit en silence. Je choisis en même temps de mettre les choses au clair dans ma tête. Kim Namjoon, deux fois champion de natation du lycée, qui m'a incroyablement troublé depuis sa performance à la dernière compétition au point que j'en ai eu l'envie d'essayer de m'approcher d'une piscine, ce que je n'avait pas fait depuis 7 ans, se trouve devant moi alors que nous nous apprêtons à avoir une discussion qui, je pense, sera particulièrment longue puisque lui et moi avons beaucoup de choses à nous expliquer. J'ai le temps de m'imaginer toutes les situations possibles jusqu'à ce que nous rejoignons la salle commune des lycéens. Personne ne s'y trouve, ce qui est compréhensible puisque, normalement, à cette heure-ci, les lycéens sont soit en cours, soit rentrés chez eux. Et puis il y a ceux, comme moi, qui doivent attendre leur train et qui cherchent donc une occupation. Or, en voilà une assise juste devant, occupation qui ne m'est particulièrement pas déplaisante. D'un côté, je redoute de devoir lui raconter l'incroyable histoire d'amour que je partage avec ma phobie mais d'un autre côté, sa compagnie me rassure. Comme lors de la compétition où j'eus cette subite envie de le rejoindre à l'eau, ce que je me sais incapable de faire.

-Pour être sûr de moi et si, bien sur, tu t'en sens capable, j'ai besoin que tu me raconte d'où vient ton "traumatisme" et depuis quand tu l'as.

-D'abord, il faut que tu saches qu'à part mes parents et mon meilleur ami, personne ne le sait. Donc si c'est un peu fouilli, ne m'en veux pas. Certaines parties sont mêmes encore troubles dans ma mémoire. Et puis... Si ça pouvait aussi ne pas se répandre.

-Évidemment, je n'avais pas l'intention d'aller le crier sur tout les toits. Tu peux me faire confiance.

J'avais confiance en lui. Je ne le connaissais pas vraiment mais sa manière de me parler, la douceur dans ses mots et ce que m'envoyait son regard me mettait en confiance. Alors je pris une grande inspiration et lui raconta tout ce que je pouvais, tout ce que ma mémoire me permit de garder. J'utilisais le plus de détails possibles, lui faisant comprendre que, depuis ce jour, ma phobie était ancrée au plus profond de moi, que je la nourrissais chaque jour et que jusqu'à hier, je n'avais jamais cherché à m'en démêler. Je ne le regardais plus vraiment dans les yeux à ce moment là. J'avais baissé les yeux sur mes mains que je serrais lentement pendant que je parlais. À chaque battement de paupières, je revoyais ces images qui refaisaient surface dans mes cauchemars, j'entendais les vagues se refermer sur moi. Je faisais parfois quelques pauses, comme reprenant mon souffle, chassant, pendant ces quelques secondes, les bruits et les images avant de reprendre. À la fin de mon récit, je pris une dernière longue inspiration et un lourd silence s'installa entre nous. Je levais discrètement les yeux vers lui. Son regard me transperça en plein coeur. Il ne m'avait pas quitté des yeux un seul instant pendant que je parlais et ce n'est qu'à ce moment-là que je m'en rendis compte. Il afficha ensuite ce sourire que j'aimais déjà, doux, rassurant. Il me faisait me sentir bien.

-Dis, tu connais mon nom mais je ne connais toujours pas le tien...

-Yoongi. Min Yoongi.

-Très bien, alors... Yoongi. Que dirais-tu de te débarrasser une bonne fois pour toute de cette phobie avec moi ?

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Sorry, sorry, la capitale m'a retenu.

P H O B I A || NamGiWhere stories live. Discover now