Winter Fall (Kentin)

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Décembre 2010



C'était bien la première fois qu'il participait à une fête et il se sentait mal à l'aise. Ce n'était pas du tout le genre d'événements dont il était coutumier, vraiment.


Une salle avait été louée dans la petite commune d'à côté, loin des habitations alentours, près du bois. C'était un endroit idéal pour une fête puisque le bruit ne pouvait déranger personne, mais ça l'effrayait un peu. La proximité du bois était inquiétante et l'absence de maisons autour l'était tout autant. C'était typiquement le genre de décor qu'on voyait dans les films d'horreur américains, genre la cabane perdue au fond des bois où avant l'aube, la quasi totalité de convives venus pour passer un bon moment se retrouve décimée à grands renforts de machettes et de tronçonneuses. S'il se passait quelque chose de grave, personne ne le saurait...
Kentin secoua la tête pour essayer de chasser ses pensées paranoïaques. Il était complètement malade d'imaginer ce genre d'atrocités. Ça n'arrivait que dans les films, pas vrai?
Et puis c'était Noël, le grand sapin qui trônait dans un coin de la pièce, décoré de boules rouges et de guirlandes dorées le rappelait bien assez.
C'était le soir du vingt-cinq décembre et toute leur classe se réunissait ce soir-là pour une fête et un échange de cadeaux. C'était miraculeux qu'Iris l'ait invité d'ailleurs. Iris était toujours gentille. Pas trop pour que ça paraisse suspect, mais juste assez pour qu'il ait envie que ça continue.


La musique était presque assourdissante, les basses le faisaient trembler de la tête aux pieds et le tout lui aurait peut-être même donné envie de bouger un peu, s'il avait su comment faire. Seulement voilà, il n'avait jamais essayé et rien que l'idée de se balancer d'un pied sur l'autre suffisait à lui donner des angoisses.
On arrivait de temps en temps à entendre un fou rire ou bien une ola enthousiaste devant un énième verre d'alcool descendu d'une traite. Une partie de lui trouvait ça dangereux et une autre mourait d'envie d'être dans un de ces petits groupes et de crier lui aussi.
Par contre, l'éclairage se révélait assez peu flatteur en ce qui le concernait. On avait simplement laissé la moitié des lampes du plafond allumées et elle diffusaient une lumière encore trop vive et trop crue à son goût, qui venait se refléter sur ses grosses lunettes.
De nombreuses guirlandes électriques rouges pendaient aux murs mais ça donnait une touche un peu festive et féminine, qui devait sûrement plaire à ces demoiselles.
Elles étaient d'ailleurs assez nombreuses à se déhancher sur l'espace totalement libre de la salle qui servait de piste de danse. Le sol était un peu râpeux et rappelait légèrement le sol du gymnase du lycée, endroit que Kentin détestait d'ailleurs. Ce n'était pas forcément l'idéal pour faire le moonwalk façon Michael Jackson mais c'était parfait pour les filles et leurs talons hauts qui ne risquaient ainsi pas de glisser en se laissant un peu trop emporter par la musique.
Elles étaient toutes ravissantes d'ailleurs et avaient profité de l'occasion pour sortir d'élégantes robes de fête ou des vêtements plus sexy parsemés de strass.


Rosalya bougeait de manière très sensuelle, balançant ses hanches sur lesquelles retombaient d'incroyables cheveux blancs, si lisses, épais et soyeux qu'on lui aurait payé une fortune pour les lui couper et en faire des perruques. Elle semblait s'amuser et profiter de la fête même si son petit-ami n'était pas avec elle. Elle n'avait besoin de rien en particulier pour être à l'aise, elle se sentait bien dans sa tête et bien dans son corps. Elle n'avait besoin de personne pour s'amuser. C'était le genre de fille qui sympathise avec tout le monde et qui, même dans une pièce remplie d'inconnus, pouvait se faire de nombreux amis en moins de deux car elle attirait immédiatement le regard de la bonne manière, tout simplement parce qu'elle était belle à se damner et souriante. Kentin l'enviait terriblement, par moments. Elle avait tout pour elle : beauté, facilités à communiquer, à attirer les gens, à dire des choses intéressantes... La nature avait été tellement plus cruelle avec lui : petite taille, carrure chétive, innombrables problèmes de vue qui requéraient le port de lunettes aux verres épais... Il avait fait refaire sa carte d'identité deux ans plus tôt, en quatrième, pour le voyage scolaire en Angleterre. La petite fiche indiquait cent soixante-cinq centimètres. Depuis, sa taille n'avait pas bougé. Il n'avait pas poussé d'un millimètre en deux ans et il avait cessé de se leurrer ; ça ne viendrait probablement plus jamais, maintenant.
Autour de lui, les gens discutaient en groupe, un verre ou une bouteille à la main. Ils riaient, souriaient, s'animaient, interagissaient les uns avec les autres. Il y avait une trentaine de personnes et au lieu de se sentir noyé dans la masse, il se sentait plus isolé que jamais.

Sweet AmortentiaWhere stories live. Discover now