Chapitre 3

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Il pleuvait maintenant des clous et il était difficile de distinguer tous les détails de la forêt. Sur mon visage ruisselaient les gouttes de pluies froides. Mon chandail me collait à présent à la peau et pesait sur mes épaules. Quant à Harry, ses cheveux bouclés se rabattaient peu à peu par la pluie. Même dans la noirceur de la nuit, je pouvais percevoir les yeux émeraude du garçon qui me fixait.

La poigne d'Harry n'était étonnamment pas douloureuse. Il ne me traîna pas violemment à la cabane, ne m'assomma pas pour m'empêcher de m'enfuir à nouveau et ne me hurla pas dessus afin de m'effrayer. J'appréhendai le coup les yeux fermés durement, n'importe quoi qu'il puisse faire pour me punir, mais il ne vint pas. Il avait l'air en colère, oui, mais c'est tout. Pourtant, il ne devrait pas se conduire comme ça. Il n'est tout simplement pas logique de ne rien faire à sa victime alors qu'elle a essayé de s'enfuir, n'est-ce pas ? D'un autre côté, le voir réagir d'une telle manière ne devrait pas me surprendre puisqu'il a été si calme et indifférent à mon égard toute la journée. L'effroi envahissait pourtant mon corps, ne faisant qu'amplifier la boule s'étant logée dans mon ventre.

– Je croyais t'avoir...

Le reste de la phrase d'Harry me fut inaudible puisque le tonnerre retentit fortement.

Je lui fis signe que je n'avais pas entendu en portant ma main à mon oreille et il regarda vers le haut pour voir des éclairs fissurer le ciel. Il s'approcha alors sa tête vers la mienne, me procurant un mouvement de recul bien que minime puisque mon crâne heurta l'arbre dans mon dos. Les lèvres d'Harry étaient donc à quelques millimètres de mon oreille et je fis de mon mieux pour ne pas bouger, ne voulant pas faire le moindre faux mouvement.

– Rentrons, me souffla-t-il simplement, me laissant perplexe.

Harry recula et, mon bras toujours fermement emprisonné dans sa main, me traina avec lui dans la sombre forêt. Le sol était boueux à certains endroits et inondé à d'autres. J'essayai péniblement de suivre les grands pas d'Harry, mais j'étais beaucoup plus lente et seule sa poigne m'aidait à progresser à une certaine vitesse.

J'avais l'impression qu'Harry avait fait ce chemin des centaines de fois. Même au milieu de cette armée d'arbres colossaux et en l'absence de lumière, il semblait bien savoir se repérer. Moi, je lui accordais un petit peu de ma confiance, me laissant guider sans rien dire.

Le regard fixé au sol, j'avançai tant bien que mal dans la forêt, précédée d'Harry. Le chemin du retour me sembla éternellement long, surtout par la faute de l'agaçante pluie tambourinant sur ma tête et les grondements de l'orage résonnant sans cesse.

Soudainement, je sentis mon pied se fracasser contre quelque chose et dans un élan inattendu, je ressentis mon cœur rater un battement et je tombai sur la terre boueuse. Rapidement, je soulevai le haut de mon corps et regardai mes vêtements sales et tachés. Mon chandail gris était maintenant d'un brun ignoble tout comme mes jeans. En me retournant, j'aperçus l'énorme racine d'arbre dans laquelle mon pied s'était coincé et la maudit d'avoir provoqué ma chute.

Je me relevai vivement du sol, embarrassée. Un bras m'aida à me mettre sur pied et j'en déduis que c'était Harry. Je ne me posai pas de question sur son geste, mon esprit bien trop préoccupé à gérer mon embarras. J'aurais peut-être dût remercier Harry, mais j'en fus incapable, la gêne et l'orgueil m'en empêchant.

– Tout va bien ? me demanda-t-il d'une voix forte, essayant de parler plus fort que l'orage.

Je lui souris un peu et hochai la tête tout en balayant mon chandail de mes mains pour enlever le plus de boue possible. Être sale m'a toujours dégoutée. Petite, je n'allais jamais jouer dans les bacs à sable, car des minuscules grains entraient dans mes souliers et je détestais ça.

Whispers of EvilWhere stories live. Discover now