J'en peux plus, vas-y Doc crache le morceau ! Je me suis redressée, à l'affût d'une possible solution à mon mal-être constant.

— Et elle a porté ses fruits, dit-il en ouvrant les bras. Elle consiste à faire évoluer le patient mais dans un environnement totalement différent.

— Hein ?

Alors-là, je suis perdue...

— Je vous propose, et ce, seulement si vous vous sentez prête à tenter le coup, de partir de chez vos parents.

— Pour aller où ? Qu'est ce que ça va changer ?

— Le choix de la destination vous revient. Je sais que « votre famille » et vous avez pas mal visité la France durant vos vacances, par conséquent je ne pense pas que ce soit l'endroit idéal. Je vous suggère plutôt de poser vos valises dans un autre pays.

Quoi ? Il a l'air sûr de lui, ses avant-bras sur les accoudoirs de son fauteuil orangé. Il me fixe intensément, pressé de connaître mon avis sur le sujet.

— C'est une blague Patrick ? Allez avouez que vous vous fichez de moi !

— Et non, je suis on ne peut plus sérieux.

Je le dévisage. Mais non, il ne plaisante pas ! Je m'affale sur le canapé et reste sans voix.

—Essayez de visualiser. Vous pourriez vivre dans un lieu neutre, sans souvenirs, où vos voisins ne connaîtraient pas votre passé. Vous reprendriez tout à zéro. Qu'est ce que vous en pensez ?

Je pense que vous êtes dingue Doc !

— Pour être honnête, là, je ne sais pas. Vous croyez que j'en suis capable ?

— Bien évidemment sinon je ne vous le proposerais pas. Vous avez changé depuis notre première séance. Vous n'êtes plus une femme fragile, au bord du suicide. Vous avez évolué, même si vous pensez le contraire. Vous faites de nombreux efforts pour vous sortir la tête de l'eau. Sauf que vous êtes depuis trop longtemps dans une phase que vous ne pouvez surmonter. Je suis certain que c'est la meilleure solution.

Je soupire. Je ne sais plus quoi penser. Me retrouver seule dans un autre pays. Seule ? Mes yeux sont écarquillés, ces propos m'apeurent.

— Et mes parents ? Je ne me vois pas les abandonner...

Je sais que je suis très peu communicative avec eux mais ils ont été mes piliers ses dernières années.

— Vous ne les abandonnerez pas. Le processus s'effectue sur une période plus ou moins longue, tout dépend de l'évolution du patient.

Un tas de questions me viennent, mais une plus que tout.

— Et vous Patrick ? Je ne peux pas arrêter mes séances. C'est vous qui me maintenez en vie !

Je regarde tout autour de moi, paniquée. Ce bureau est le seul lieu neutre où je peux déverser ma peine sans trop de souvenirs. Il est mon refuge. Je ne peux pas renoncer au peu de stabilité que j'ai trouvé.

— Rassurez-vous, j'ai déjà pensé à tout. Je préconise autant de séances sauf que nous passerons par skype ou par des mails. Il nous faudra une bonne organisation mais je suis optimiste.

Le trop plein d'informations me donne mal au crâne. Mes coudes sur les genoux, je me noue les doigts sur la nuque, emportant ainsi ma tête vers le bas.

— Écoutez, prenez le temps d'y réfléchir, parlez-en avec vos proches, rien ne presse.

Il se lève et se dirige vers la porte d'entrée. Je lui emboîte le pas. Il me prend dans ses bras et me murmure à l'oreille d'une voix rassurante qui n'appartient qu'à lui.

LIFE : Survivre (tome 1)Where stories live. Discover now