5) Docteur Laurens

Depuis le début
                                    

Arrivées au deuxième étage, l'infirmière nous dirige dans le cabinet du Docteur au bout du couloir.

Il est installé à son bureau et pianote sur son ordinateur. En nous voyant entrer, il se lève pour venir à notre rencontre. Derrière moi, je l'entends remercier et congédier l'infirmière avant de me pousser au centre de la pièce.

J'inspecte les lieux d'un léger coup d'œil. La pièce est plutôt simple : un canapé, un fauteuil, un bureau et quelques cadres accrochés ici et là. La couleur beige des murs et les rideaux marron rendent l'endroit un peu plus accueillant.

— Alors Cassandra, mon cabinet vous plaît ? demande-t-il en s'asseyant sur le fauteuil en face de moi.

Je le fixe tout en gardant le silence, je ne suis pas là pour la déco.

— Très bien, avez-vous envie de parler de quelque chose en particulier pour cette première séance ?

Nous y voilà ! Je secoue la tête. Je n'ai envie de parler de rien, rien du tout.

— Pouvez-vous au moins me dire comment vous vous sentez ?

Comment je me sens ? C'est une blague ? Mon souffle s'accélère, mon cœur bat plus vite. J'ai tout perdu pauvre idiot ! Tu veux que je me sente comment ?

Mes bras et mes jambes tremblent, je fonds en larmes une fois de plus. Il lève et agite les mains en signe de reddition.

— Ok, ok. Vous savez quoi ? Pour aujourd'hui, c'est moi qui vais monopoliser la discussion. Pour créer une confiance, il me semble que ce doit être donnant-donnant. Alors je vais vous en apprendre un peu plus sur moi.

Excédée, je m'enfonce dans mon siège. S'il croit qu'en se confiant à moi ce sera plus facile de me livrer, il devrait revoir ses cours. D'où sort ce psychiatre ? Où a-t-il eu ses diplômes ? Ce n'est pas généralement au patient de s'abandonner à la confession ?

Néanmoins, malgré mon hostilité évidente à toute forme de communication, je me surprends à prêter l'oreille. Après tout, je n'ai rien d'autre à faire. Même si l'envie n'est pas présente, ça ne coûte rien de l'écouter.

— Après six années d'internats et quatre ans de stages, me voici à exercer ma profession dans l'hôpital le plus réputé de toute la partie Nord-Est de la France depuis maintenant vingt ans.

Il sourit fièrement devant cet aveu.

— Ce que j'aime dans ce métier, c'est tendre la main aux autres, les aider. Et je suis là pour vous aider Cassandra.

Voyant que je ne réagis pas, il continue sur sa lancée.

— Quoi d'autre ? Ah oui ! J'ai été marié, moi aussi. Malgré tout, nous avons divorcé depuis...

Je ne comprends pas pourquoi, ses yeux se voilent légèrement. Il ne me regarde pas en face, il fuit mon regard et ça m'interpelle. Le psychiatre aurait-il, lui aussi, le besoin de se confier ? Qu'essaie-t-il de masquer ?

Ses yeux croisent subitement les miens et comme si de rien n'était, il se ressaisit en souriant. Un sourire aussi faux que la poitrine de Pamela Anderson !

— Alors, êtes-vous disposée à converser à présent ?

Je roule le regard. Ce n'est pas parce que Monsieur me sort tout son curriculum que j'arriverais, comme par magie, à m'épancher sur mes problèmes.

Mes doigts frappent nerveusement sur le coude de mon fauteuil tandis qu'il poursuit.

— Savez-vous qu'il existe des groupes de soutien, des personnes comme vous qui ont vécu un terrible drame, je pense que...

LIFE : Survivre (tome 1)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant