[ Chapitre 20 ]

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Je tournai en rond dans le salon de Tess, heureux d'avoir forcé ma fille a faire ses excuses. 
Tâche qu'elle avait d'ailleurs accomplie avec brio.
Mais cette imbécile avait perdu son sang froid et était inconsciente depuis une journée.

Cristal se remettait de notre conversation d'il y a deux jours, et j'en avais profité pour rendre une petite visite de courtoisie à Tess.
Mais je ne parvenais pas à garder mon calme.
J'allais entrer dans la seconde partie de la rééducation de Wendy, les fréquentations.
J'espérais qu'après tous ces exercices, cette petite peste aurait saisi qu'on devait respect et obéissance à ses parents.

-Chéri ? Tout va bien ?

Tess posa ses mains fines sur mon épaule.

Je me retournai et embrassai son cou gracieux.

-A merveille, mon amour, ai-je murmuré. Est-ce que tu te remets ?

Tess posa instinctivement sa main sur son ventre.
Lorsqu'elle m'avait appris sa grossesse, voilà deux semaines, nous avions eu notre première violente dispute.
Je voulais qu'elle avorte, elle voulait garder le gosse.

Mais quand j'ai menacé de la quitter, elle a accepté sans protester.
Cette femme était si éprise de moi qu'elle était prête à tout pour me garder près d'elle.
Voilà comment je voudrais que Cristal se comporte avec moi. Amoureuse et obéissante.
Mais non, madame s'entêtait à jouer les inaccessibles.

-Je vais beaucoup mieux. C'est dingue ce que je suis mince, tu ne trouves pas ? Et puis j'allais sûrement devoir retirer mon piercing au nombril si je gardais le bébé... Alors tu as raison, c'était une excellente décision, gazouilla-t-elle.

Quelle idiote.
Avant qu'elle ne recommence à déballer des conneries, j'ai plaqué mes lèvres aux siennes et l'ai ramenée dans la chambre.

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Le lendemain matin, mon bien-aimé père m'observait attentivement, guettant le moindre soupçon de révolte qu'il se ferait un plaisir d'anéantir.

-Belval sera donc mes yeux et mes oreilles, poursuivit-il. Moi seul décidera de tes déplacements extérieurs, voilà qui devrait t'encourager à faire preuve de maturité.

J'étais assise sur une des chaises du salon, attendant calmement que mon père ait fini son monologue.

-Et n'oublies pas, quinze heures tapantes.

Puis il nous laissa seuls dans le salon.
Je me suis retourné vers Belval, qui ressemblait davantage à un lampadaire qu'à un être humain.

-Que ce soit clair, je veux que ma chambre reste une pièce privée, tout comme mes passages à la salle de bain, l'ai-je prévenu.

Belval m'a dévisagé comme si j'avais un sérieux souci mental.

-Mademoiselle, je suis un garde du corps et non un voyeur. Si vous pensiez que j'allais dormir dans votre chambre ou vous surveiller sous la douche, sachez que cette idée me répugne autant qu'à vous, conclut l'homme, impassible.

Sa cicatrice était sombre et profonde mais donnait du caractère à son visage bronzé.
Mon père l'avait certainement sélectionné pour que son aspect physique m'incite à le redouter.
Il est vrai que Belval ressemblait à un soldat en service, avec son crâne chauve et sa carrure.

-Et Belval... ai-je hésité. Je serais prête à vous payer un solide supplément si vous parveniez à convaincre mon père de ne pas...

Mon interlocuteur leva brusquement la main.

-Ah non. Je regrette, mais monsieur votre père tient vraiment à ce que vous passiez du temps avec ce jeune homme.

-Mais merde ! Ai-je lâché, sans que cela ne fasse ciller mon garde du corps. Vous n'avez pas idée de qui est Victor Millepieds ! C'est un véritable emmerdeur!

Belval croisa ses énormes bras sur son torse massif et haussa les épaules.

-Peut-être... Mais il a un compte en banque fort intéressant, ajouta-t-il, déclenchant mon hilarité soudaine.

-J'ai peur de ne pas en avoir besoin pour le moment, ai-je ri en me relevant.

Mon père avait décrété que Victor Millepieds, fils unique du premier ministre, était une personne à fréquenter et m'avait donc programmé une entrevue avec cet énorme imbécile durant l'après-midi.

Je n'avais pas adressé la parole à un garçon de mon âge depuis qu'on m'avait séparée d'Élias et l'idée d'avoir un rendez-vous avec Victor me répugnait.

J'avais fini par rejeter l'idée de m'enfuir de nouveau et cela me rendait folle de tristesse.
L'absence d'Élias commençait à muer en une douleur physique de plus en plus insupportable.
Mais personne ne devait connaître son existence, et surtout pas mon père.
Il se ferait un plaisir de l'incarcérer pour un motif factice, rien que pour me voir le supplier à genoux.

-Mademoiselle ? Intervint Belval. Je pense que monsieur votre père souhaiterais vous voir déjà apprêtée. Ce n'est qu'un conseil mais j'ai cru comprendre qu'il tenait vraiment à ce que vous rencontriez ce jeune homme.

-Oh et je vous en supplie, cessez de traiter mon père comme un roi tout puissant. C'est un salopard et il mérite d'être traité comme tel. Je ne peux malheureusement pas échapper à ses griffes, mais soyez adorable et ne devenez pas un de ces disciples à la con, ai-je ajouté en montant dans ma chambre.

-Aucun risque, à répondu Belval à mi-voix, le sourire aux lèvres.

En refermant ma chambre, j'ai failli craquer. Failli me transformer de nouveau en fontaine.
Couchée sur mon lit, je respirai doucement, me répétant encore et encore que je le reverrai.
J'y passerais ma vie si il le fallait, mais je reverrais Élias Arone.

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La villa était réellement immense.
À la télévision, l'image que l'on recevait de cette demeure était impressionnante mais ce n'était rien comparé au fait de se trouver en face. Plusieurs étages se succédaient dans un étalage de luxe et de rosiers montants.

Depuis les larges grilles, je contemplai ce château miniature, les mains dans les poches de ma veste.
Il était insupportable de savoir Wendy à quelques pas, et pourtant inaccessible.
Quelques journalistes tournaient encore devant la sublime maison, dans l'espoir que l'un des membres de de la famille présidentielle passe la tête par la fenêtre.

De mon côté, j'examinai les murs blancs de la villa.
Il me semblait absolument impossible de les escalader, mais Wendy y était bien parvenue...
Ce souvenir m'arracha un sourire.
J'avais trouvé un portrait de la jeune femme dans un journal, et avait lu le témoignage de son père.
Il annonçait que Wendy s'était enfuie par la fenêtre de sa chambre et cette image m'avait fait sourire.

C'était tout à fait Wendy ça, exécuter connerie sur connerie.
Mais ma fois, ça s'ajoutait à son charme insolite.
Lise m'avait demandé de ne jamais m'introduire dans la maison même du président et je n'en avais pas l'intention.
Mais il me fallait un plan, et vite.

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Merci infiniment pour tous vos adorables messages, autant en privé qu'en commentaires.
Ça me touche et ça m'encourage, alors je vous remercie du fond du coeur !
Étant donné la reprise des cours, je ne sais pas encore si je pourrais continuer à vous assurer un chapitre par jour mais je ferai du mieux ; )
Encore merci,

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