Madame Blake, elle, retrouve aussitôt un ton plus mesuré, un peu raide.

Il ne se passait rien. C'est mon élève.

Ah... je vois, répond l'amie, faussement innocente.

On y va ? lance-t-elle finalement.

Oui.

Madame Blake se redresse, reprend un certain détachement.

Bonne soirée, Eden.

Je relève les yeux vers elle, amusée par cette brusque reprise de contenance.

Au revoir, Madame Blake.

Elle esquisse un sourire discret.

Oh appelle moi Tessa, nous ne sommes pas dans l'établissement.

Puis elle se tourne vers son amie et s'éloigne dans la foule du bar. Je la regarde partir, toujours ce sourire en coin accroché aux lèvres.

Marc m'interrompt.

— Pourquoi tu l'as laissé partir ?

— Ça t'intéresse ?

— Tes yeux brillent, tu devrais la rejoindre.

— C'est l'alcool et c'est ma prof donc non.

Il me regarde choqué. Moi je regarde les verres un peu éparpillés mais surtout le petit verre de shooter juste à ma droite. Je l'empreinte au monsieur d'à côté sous le regard accusateur de Marc je le bois cul sec.

— Allez c'était le dernier.

Puis je pars sans l'écouter.

La musique bat à plein volume, les lumières tournent, et moi... je danse. Sans penser à rien. Mes mains suivent le rythme, mes hanches bougent toutes seules, et l'alcool dans mon sang rend chaque mouvement plus fluide. Le monde autour pourrait s'écrouler, je ne le remarquerais même pas.

Jusqu'à ce qu'un choc brutal dans mon dos me fasse trébucher.

Oh, pardon, lâche une voix masculine derrière moi.

Je sens un liquide froid couler sur mon pull. Mon corps se fige, surpris par le contraste avec la chaleur ambiante. Avant que je puisse réagir, une main ferme attrape mon bras.

Viens, je vais t'aider.

Je me laisse tirer, d'abord sans réfléchir, pensant qu'il va m'emmener aux toilettes. Mais non. Il me pousse vers un recoin sombre du bar, là où la lumière des néons n'atteint presque pas, là où la foule ne se presse pas.

Quelque chose se crispe dans mon ventre.

C'est bon, je... je vais y aller...

J'essaie de reculer, mais ses doigts se resserrent. Le bruit m'oppresse, les basses cognent dans mon crâne, et l'alcool embrouille mes pensées. Je sens ma respiration s'accélérer, mon cœur tambouriner. Mes mains tremblent. Le sol semble se dérober.

Je ne vois plus vraiment les visages autour, juste une masse floue, et cette main qui m'empêche de partir.

La panique monte. J'étouffe.

Et puis, d'un coup, une autre main m'attrape, ferme, déterminée, et m'arrache de cette emprise. La prise sur mon bras disparaît. Je distingue à peine la silhouette d'un homme qui se fait plaquer violemment par deux autres types.

Viens.

La voix est grave, mais je ne la reconnais pas. Je marche mécaniquement, tirée à travers la foule. Puis mes jambes se figent d'elles-mêmes. Mon souffle est court, coupé par des sanglots qui n'arrivent pas à sortir.

Sans réfléchir, je me blottis contre cette personne. Et, étrangement, là, serrée contre ce torse, je me sens... bien. Pas oppressée.

Une main se pose dans mon dos, l'autre sur ma tête. On avance lentement jusqu'aux toilettes.

Dehors, ordonne la voix.

Des talons claquent en sortant, mais je n'arrive pas à lever la tête. Mon visage reste enfoui dans son buste, mes mains crispées sur sa taille.

Respire... doucement...

Je m'écarte brutalement et enlève mon pull sans réfléchir à ce que j'ai en dessous. Puis je me remet contre cette personne.

Peu à peu, l'air revient, mais mes oreilles bourdonnent encore. Puis la voix s'élève, plus forte, tranchante :

Tessa, va chercher de l'eau.

Je relève alors la tête, persuadée d'y voir l'amie de tout à l'heure.

Mais non. Mon cœur rate un battement. C'est Madame Belmont.

L'air saturé de basses et de voix se déformait autour de moi. Je ne voyais plus que des lumières floues. Les mains qui me retenaient me semblaient lourdes, impossibles à repousser. Mon souffle se coinçait quelque part entre ma gorge et ma poitrine.

Je reculai instinctivement, comme piquée au vif, mes bras se dégageant de son étreinte. Je regarde tout, même comment je suis habillé et je me retrouve sans tee-shirts juste en soutient gorge. Je m'étais tellement habillé rapidement que je n'avais pas pensé à remettre un tee-shirt sous mon pull. J'essayais de me cacher tant bien que mal. Mais l'air se fit à nouveau trop dense, mes doigts tremblaient, et mes jambes n'avaient plus de force.

Madame Belmont comprit avant même que je dise quoi que ce soit, elle m'attrapa doucement, me tenant fermement contre elle. Sa présence avait perdu toute froideur ; elle s'agenouilla lentement, m'accompagnant dans le mouvement, jusqu'à ce que nous soyons toutes les deux au sol, moi calée contre elle, mon souffle heurté mais un peu moins violent.

Je relève lentement la tête, encore un peu vacillante, et mes yeux croisent ceux de ma professeure. Son regard est fixe, perçant, presque troublant. Je sens mon cœur s'emballer, mon souffle s'accélérer, et pour un instant, le monde extérieur disparaît.

Puis, soudain, un bruit me fait sursauter.

Eden, voilà ton eau !

Tessa est là, s'interposant entre nous, brisant le contact visuel. Mon visage s'empourpre immédiatement. Je baisse les yeux, gêne et panique mêlées.

C'est... c'est juste l'alcool... je... je me sens un peu étourdie, bredouillé-je, espérant que ma voix sonne crédible.

Tessa se baisse pour me tendre le verre.

Tiens, bois un peu. Comment ça va, Andrea ? Tu penses que...

Sa voix hésitante la coupe, mais Andrea ne répond pas calmement. Son corps se tend, ses mains crispées. Son regard se durcit, et sa voix devient sèche, tranchante.

Tessa, sors. Maintenant.

La jeune femme recule d'un pas, confuse mais obéissante, et quitte les lieux rapidement. Le bruit de la porte qui claque me fait sursauter.

Je sens la panique remonter. Mes jambes fléchissent, mes mains tremblent, et un frisson secoue tout mon corps. Je sens Belmont encore plus proche, ferme, solide contre moi. Je suis dans une peur incontrôlable. Sa voix et son corps paraissent plus tellement sécurisant.

Je... je ne sais pas ce que vous me faites, mademoiselle Morel... mais ce n'est pas bon, murmure sa voix chaude et grave contre mon oreille.

Je ne comprends pas tout à fait ses mots. Mon esprit est confus, embrumé par l'alcool et la peur. Je ne dis rien. Je ne peux rien dire. Je me laisse simplement tomber, entièrement, contre elle, laissant le contrôle m'échapper complètement. C'est le noir complet.

~~

Bonjour, Bonsoir, j'espère que vous allez bien et que le chapitre vous a plu. Je vous avouerai que c'est un de mes chapitres préférés pour l'instant et que j'ai hâte d'écrire la suite !

Voilà voilà !

L'hypothèse interdite Donde viven las historias. Descúbrelo ahora