Part 21 - Le déclic

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J'ouvre les paupières. La baie vitrée en face de moi laisse généreusement entrer la lumière, cela m'éblouit, je me cache les yeux. Où suis-je ?

— Tu es chez moi.

Je tourne la tête à gauche et regarde dans sa direction. Il est habillé d'un jean et d'un T-shirt blanc qui met en valeur son teint mat. Il a les deux mains posées à plat sur l'îlot central de la cuisine. Sa beauté me frappe encore une fois. À la lumière du jour, je me rends compte que c'est l'homme le plus attirant que j'aie vu de toute ma vie. J'avale difficilement ma salive pendant que ses yeux sombres semblent m'analyser. Je regarde autour de moi pour me soustraire à son examen intimidant.

Je suis dans un grand loft, très masculin, décoré avec goût, les murs sont anthracite, le sol est en parquet foncé. Entre nous, deux canapés blancs se font face, cernant une grande table basse carrée couverte de bouquins de médecine. L'espace où se trouve le lit – dans lequel je suis couchée – est un peu en hauteur par rapport au reste du loft. La baie vitrée en face de moi couvre tout le pan du mur. Comment peut-il se payer ça ?! On peut même voir la tour Eiffel.

Je suis chez lui, dans son lit, j'en ai le tournis.

Je me lève en essayant d'éviter son regard qui me trouble plus que de raison. Je suis tout habillée. Quand j'arrive devant l'îlot en face de lui, j'ai le sentiment d'être si petite, fragile.

— Tiens.

Il me tend un jus de poire, que je bois jusqu'à la dernière goutte. J'ai tellement soif. Le silence s'installe. Sous ses mèches foncées, il me scrute d'une façon des plus énigmatiques, me mettant quelque peu mal à l'aise.

J'ai l'impression qu'une distance incroyable nous sépare et le silence ne le comble pas. Ce gouffre profond me blesse. J'ai besoin qu'il me parle. Qu'il me dise ce qu'il ressent. Suis-je la seule à n'avoir pas pu oublier ?

Quand mon regard plonge dans le sien, à la recherche d'une réponse, il détourne les yeux. Je pose ma main sur la sienne, il la retire immédiatement. Je m'en fous si ma voix tremble un peu :

— Fares, tu ne ressens donc rien ?

— Arrête, s'il te plaît, dit-il en baissant le visage.

Je contourne l'îlot et me poste devant lui, cherchant son regard.

— Quand tu m'as prise dans tes bras, quand tu t'es couché contre moi, n'as-tu rien ressenti ?

Il secoue la tête. Il serre maintenant les poings.

— Je n'aurais pas dû t'emmener ici. C'est une erreur, dit-il froidement. Je veux que tu partes.

Je ne peux pas le laisser me fuir une seconde fois, ce serait trop dur. J'ai besoin de cette chance pour m'expliquer enfin. Je veux savoir si nous avons encore ce lien, pourquoi il tient tellement à me blesser. S'il se donne tant de mal pour me faire souffrir, c'est qu'il doit rester quelque chose. Un sentiment, même de la colère.

Il m'a emmenée chez lui et m'a laissée dormir dans son lit. Il s'est couché contre moi. Cela ne peut pas être seulement une erreur.

Je reste plantée devant lui. J'ai besoin de le sentir, de le toucher. À ce moment-là, cela m'est vital.

Je lui prends le cou et l'oblige à me regarder. Sa peau est chaude et un courant électrique me traverse. Toutes les sensations oubliées resurgissent d'un coup. Mon pouls s'accélère et j'ai l'impression que mes jambes vont me lâcher. Sur la pointe des pieds, j'avance doucement le visage, toujours en le fixant. Nous avons changé tous les deux, mais mes sentiments sont encore là. Toujours aussi puissants presque malgré moi. Il m'attire comme aucun autre. Peut-être parce que je n'ai jamais pu aimer après lui. Parce que je l'avais choisi. Parce que c'est Fares, tout simplement.

I Hate U Love Me - Saison 1 (BLACKMOON éditions Hachette)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant