Part 17 - Descente en enfer

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Ce jour-là, Julia et Katy ne nous avaient pas entendus. Elles sont montées dans ma chambre et m'ont trouvée par terre à côté du lit, ma chemise à moitié boutonnée. J'avais séché mes larmes depuis longtemps. Je n'avais plus la force de pleurer. J'avais l'impression d'être à bout de force, d'avoir subi une terrible défaite.

Il est parti sans me dire qu'il me quittait. Il m'a juste laissé la bouche en feu et une plaie profonde, là où il a planté ses dents dans la chair de ma lèvre inférieure.

Il m'a marquée comme on marque une bête, à jamais.

Je répétais son nom sans m'arrêter, les sourcils froncés, la bouche tordue par la douleur.

— Putain, il t'a fait du mal ?

— Fares est parti. Il est parti. Parti...

Je fixais le sol comme une perdue. Car il était parti et je savais, au fond de moi, qu'il ne reviendrait jamais. Des filles comme moi il y en a plein. Alors quand une fille comme moi a un petit ami comme lui, elle ne fait pas d'erreur.

Katy m'a mise au lit. J'ai entendu Julia crier au téléphone derrière la porte de ma chambre.

— Passe-le-moi Luc ! Je te jure, je vais le tuer. Et toi, je t'étrangle si tu ne te dépêches pas !... Allô, Fares, je vais te dire un truc et tu vas bien m'écouter, OK ? Plus jamais tu ne l'approches, t'es un malade ! Un psychopathe ! Allô ? Allô ? Connard !!!

Plus tard, je leur ai tout raconté, du premier regard jusqu'au dernier mot. Julia a eu les larmes aux yeux et Katy fut scandalisée du mauvais coup de Sarah.

— Elle va voir, cette pétasse, si je lui tombe dessus ! Elle est dingue, celle-là ! C'est quoi, son problème ?

Je ne sais pas pourquoi elle a des griefs contre moi. Ai-je fait quelque chose contre elle sans m'en rendre compte ? Le mystère reste entier. Elle voulait me nuire et, indéniablement, elle a atteint son but.

Le lendemain, je n'ai pas non plus la force de pleurer quand j'annonce à Chris que je le quitte. La sonnette de l'entrée me sort du lit. Je tremble en ouvrant la porte. Pas par peur, je sais que ce n'est pas Fares, mais il est dix-sept heures et je n'ai rien mangé depuis plus de vingt-quatre heures.

Je ne ressens rien même quand il tombe à mes genoux en m'enserrant la taille. Je me libère de ses bras. À l'intérieur de moi, je sais que je me dois de souffrir pour lui, pour nous, pour tout ce temps de perdu et gâché, mais je n'éprouve rien, le vide complet.

— Mais pourquoi ?

— Je ne peux plus, c'est tout, dis-je d'une voix atone, d'une voix morte.

— Il y a sûrement une raison !

— Je t'aime beaucoup, mais pas comme je le devrais. C'est fini.

Je sais que ça lui fait du mal, que je devrais le prendre dans mes bras, lui dire que sa peine s'apaisera avec un peu de temps, mais je ne peux pas. Un truc a changé en moi. Rien ne sera plus jamais comme avant. Une fille différente se trouve devant lui.

Je le fais souffrir et je ne trouve rien à dire. Notre amour n'était pas passionné. C'était une habitude. Notre train-train quotidien nous rassurait simplement. J'ai bêtement confondu amitié et amour. En fait, je ne connaissais pas l'amour. L'amour ne quitte jamais celui qu'il a touché, il est puissant, grisant, renversant. Chris pensera avoir mal quelque temps et m'oubliera dans les bras d'une autre. J'en suis maintenant persuadée.

Ses yeux sont baignés de larmes. Ils sont plus bleus que jamais. Je me demande si j'ai fait le même effet à Fares quand je lui ai crié de m'écouter, quand j'étais comme Chris à l'implorer. Je me demande si je lui ai inspiré de la pitié.

I Hate U Love Me - Saison 1 (BLACKMOON éditions Hachette)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant