Rouhi

Chapitre 37: Loi

"Dura lex sed lex"

Rouh

Mon cœur s'arrête.

Mon regard pivote vers Elyes, concentré sur la route alors que Hassan continue son explication, la voix alourdie par la douleur.

— Il s'est rendu compte que tu l'avais roulé et il est venu à la maison en mon absence. Il lui a tiré dessus, Elyes. En plein ventre.

Sa voix se casse et il inspire profondément, cherchant à combattre sa douleur.
Il souffle doucement, reprenant le contrôle de sa voix.

— Ma femme...ta jumelle est en train d'être opérée en ce moment de la balle de votre géniteur. Elle a perdu beaucoup de sang. Ta grand-mère a été mise au courant mais tu sais que ton père aura le dernier mot. Dépêche-toi de venir, ici. Tu sais que tout seul, je ne peux rien contre ta famille.

Il met fin à l'appel puis envoie une adresse par message.

L'hôpital où est Syham.

Mon Dieu...que faire ?

Quelle genre de famille est-ce ?

Il lui a tiré dessus ? Son propre père a tiré sur sa fille.  Quelle genre de famille est-ce ?
Comment l'annoncer à un Elyes qui semble déjà mal se contenir pour ne pas exploser ?

Les mains légèrement tremblantes, je laisse le téléphone et touche la main d'Elyes avec douceur pour ne pas le brusquer.

— Lyes...arrête-toi sur le côté s'il te plaît.

Son regard trouve le mien, surpris de mon soudain changement de ton. Il m'étudie un instant et je ne sais pas ce qu'il y lit mais sa colère semble s'évaporer et après quelque temps, il s'arrête sur la bande d'arrêt d'urgence.

Le poids de l'échéance me pèse lorsque le moteur se met en arrêt.
Rangeant mes ressentiments, j'enlève ma ceinture et me tourne vers lui pour capter toute son attention.

Ma main trouve sa joue pour une caresse dont il semble se méfier.
Si la situation n'avait pas été critique, j'aurais rigolé de ce geste. Ayshat avait l'habitude de faire la même chose à ces moments...et je n'aimais pas ça.

— Ely...Elyes...Hassan a appelé. Ton père est en ville. Il est allé chez Syham et...il lui a tiré dessus.

Son regard s'écarquille et je m'empresse de terminer avant que son attention ne m'échappe.

— Elle a été hospitalisée. Hassan m'a envoyé l'adresse.

Mais il ne m'écoute plus. Son regard se remplit de larmes, semblant lointain, s'imaginant sûrement mille et un scénarios lugubres.
Je n'aime pas ça.

— Elyes...réponds-moi, s'il te plaît. On doit y aller. Elle a besoin de toi...

Ma voix tremble et je ne saurais déterminer si c'est par peur de sa réaction ou parce que je ressens sa douleur.
Putain d'hypersensibilité maladive.

Soudainement, il sort de la voiture et je m'empresse de le suivre.

— Lyes !

Il ne m'écoute pas. Ses pieds le portent mais il regarde à peine là où il marche. On est encore sur l'autoroute et j'ai peur qu'il ne sorte sur la route principale.

— Elyes, s'il te plaît !

Je le rattrape et me place devant lui lorsqu'il se met à marcher sur place. Désespéré. Perdu.

J'essaie de l'approcher plus mais il recule, luttant encore pour ne pas flancher. Pour garder le contrôle de ses émotions.

— C'est ma faute...ma faute...ma FAUTE !!