15 : Un né-moldu serpentard

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La pièce sombra dans le noir. L'auror entendit la jeune française hoqueter tandis qu'il lui attrapait fermement son poignet, mais il n'y prêta aucune attention, aveuglé par sa fureur. Il la rendit muette à l'aide d'un silencio et l'entraina dans son sillage jusqu'au couloir de son immeuble. Là il la téléporta de force dans une rue quelconque de Londres, puis s'enfuit aussitôt après lui avoir rendu sa voix.

Il atterrit au milieu d'un lac, jurant en sentant l'eau glacé l'enlacer dans une étreinte mortelle. Le feu de sa fureur le protégea toutefois assez longtemps de la température hivernale de cette étendue d'eau pour qu'il atteigne la berge, et il s'y effondra, se tournant sur le dos, le visage offert à au froid mordant de la bise d'Ecosse.

Exténué par ce double transplanage d'urgence, lessivé par cette nage glacial, il resta ainsi un long moment. Le calme du paysage des highlands détonnait avec l'ébullition de ses pensées.

Elle avait vu son écharpe. Edith d'Aveyron savait qu'il était un Serpentard. Pourquoi cela le bouleversait-il autant ? Être un Serpentard n'était pas un crime : il avait été fier de sa maison, adolescent, fier de suivre les traces de Merlin ! Pourtant, une honte lui comprimait la poitrine. Était-ce le fait que ce soit sa française qui l'ait appris qui le chamboulait tant, ou le fait qu'elle l'ait confronté à son passé ? Qu'elle ne lui ait laissé nul autre choix que de faire face à cette écharpe verte et argenté qu'il n'avait plus revu depuis l'obtention de son ASPIC, à la fin de ses études à Poudlard ?

Oui, c'était cela, il le savait. Que ce soit sa française, ses collègues, ou même des inconnus, il ne supportait pas qu'on lui rappelle qu'il était un Serpentard, qu'il avait grandi avec les fidèles actuels du seigneur des ténèbres, qu'il n'avait vu que trop tard que leur sadisme n'était pas seulement la cruauté d'adolescents.

L'auror savait que toutes ses affaires scolaires, ses plumes, ses manuels, ses chaudrons, son télescope, son uniforme, son balai de gardien, tous ses souvenirs reposaient sous le parquet de sa chambre. Il ne pouvait s'en débarrasser car les cinq premières années de sa vie de sorciers avaient été merveilleuses et qu'il ne pouvait simplement les oublier. Le Quidditch, ce sport qu'il l'avait fait vibré plus jeune, la première fois qu'il s'était envolé sur un balai, les acclamations de la foule lorsqu'il interceptait les soufflets de l'équipe adverse... Ce n'était pas quelque chose qu'il pouvait effacer de sa mémoire. Ce sport aérien était ancré dans sa chair. Il avait été un excellent gardien, doué d'une dextérité insoupçonné et d'un sens de l'équipe à toute épreuve. Ce n'était pas pour rien que Slughorn l'avait nommé capitaine de l'équipe à ses quinze ans ! Darron se souviendrait toujours de la fierté qu'il avait ressenti à cette annonce, de son enthousiasme d'écrire à ses parents après l'avoir annoncé à Narcissa !

Narcissa... La raison pour laquelle il ne pouvait supporter de faire face à ses souvenirs d'adolescents. Que leurs camarades l'aient lynché socialement une fois son origine moldu découverte, il pouvait s'en remettre. Il avait appris à ne pas le prendre personnellement, que ce n'était pas Darron Shepherd qu'ils détestaient mais ses origines. Des origines impurs aux dires d'un simple idéal éphémère de pureté de sang.

Si la blonde était restée à ses côtés, il aurait pu leur tenir tête, garder son poste de capitaine, se battre pour dénoncer la perversion de la société, s'allier aux autres maisons pour couper à la racine cette vague de haine source de l'actuelle guerre sorcière !

Mais que pouvait-il attendre d'une Black ? Il savait déjà inconsciemment que sa meilleure amie était avant tout une sang pur et que jamais elle ne pourrait se mélanger à l'impureté. C'était sûrement pour cela qu'il s'était efforcé à lui cacher son origine, à décliner toute rencontre durant les grandes vacances, pour que jamais elle ne le rejette pour sa simple naissance.

1977 : Les héros de l'ombre (Fanfiction Harry Potter)Where stories live. Discover now