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Pas la moindre exaspération, pas la moindre colère quand Maxime lui tourna le dos. Sidjil fixait sa silhouette élancée, captivé par le dessin subtil de ses omoplates à travers le tissu noir de son tee-shirt. Dans le silence, il entendait des paroles cachées.

Il voyait bien à travers sa posture que Maxime ne voulait pas lui parler, du moins pas maintenant. Peut-être que tout ce temps sans se voir ne lui avait pas suffi. Il ne semblait pas avoir les idées moins floues comme Sidjil, il avait seulement réussi à un moment à braver son mutisme pour lui envoyer un message, un vrai cri du coeur. Et Sidjil avait cru qu'ils avanceraient plus vite.

Il tenait à lui dire qu'il n'était pas aussi apeuré. Maxime verrait qu'il n'y avait pas que des taches sombres sur ses émotions, mais des couleurs qu'il n'avait pas encore le courage de voir.

– Je pensais que t'arrêterais de fuir Max.

– T'as fini de donner des leçons ? Maxime fourra ses mains dans les poches de son survêtement.

Sidjil ne put s'empêcher de laisser un sourire braver son visage sérieux.

– Tu crois vraiment que je te fais la morale à chaque fois ?

– J'essaie de me débrouiller tout seul Sid.

– En quel honneur ? Tu penses que c'est la meilleure solution ?

Comme d'habitude, Sidjil n'obtenait réponse qu'une fois sur deux. Il se demandait s'il n'était pas trop brusque avec ses questions, si, au final, Maxime se sentait oppressé. Maxime avait besoin de tact, Sidjil en trouvait rarement dans ses mots quand il avait quelque chose en tête. Et il voyait ses mouvements directs comme des échappatoires à des situations s'éternisant, pas comme des freins.

Les traits de son visage s'adoucirent au fil de sa réalisation. Maxime ne parlait pas facilement de ce qu'il ressentait. Mais Sidjil n'était toujours pas mieux. S'il s'était fait la promesse ambitieuse d'aider Maxime à trouver un sentier dans le labyrinthe de ses pensées, c'était d'abord à lui de faire un effort.

– Je sais que t'as peur, Maxime. Je sais que c'est tout nouveau pour toi et que tu sais pas comment te sentir face à ça. Mais t'es pas obligé de savoir.

– C'est trop tard pour pas savoir, Maxime murmura d'une voix empreinte de dépit, je l'ai déjà dit à ma daronne.

– C'est pas trop tard, t'as rien perdu. Tu sais que c'est juste pas le bon moment.

Contrairement aux autres fois, le silence qu'il reçut de la part de Maxime semblait moins agressif.

– Ce sera jamais le bon moment Sid.

Sidjil retint un soupir. Le pessimisme de Maxime était tentateur par sa crédibilité. Et Sid avait toujours un peu tendance à vouloir y céder, lui donner ce qu'il voulait. Ce n'était pas de la paix, c'était de l'attention. Il perdait beaucoup de ses remparts face à Maxime. Les remparts physiques, déjà trop fragilisés, et les remparts psychologiques. Les paroles dégradantes de Maxime lui donnaient la réponse facile.

– Oui, ce sera jamais le bon moment si tu te braques à chaque fois.

Maxime s'avança de quelques pas vers la grande fenêtre, toujours les mains enfoncées dans ses poches. Il s'appuya sur le renfoncement du mur, carrelé de gris et ne reflétant aucunement la lumière de la pièce.

La fenêtre ne laissait rien voir de l'extérieur du bâtiment, mais Maxime faisait comme si. Il contemplait une surface floue comme celle de son esprit. Et Sidjil comprit ce mouvement comme une énième rétractation. Il se braquait encore, quitte à défier l'ironie.

Toujours aucune once d'agacement ne frappait les prunelles du toulousain, l'observant faire depuis la porte des toilettes. Ils étaient à l'opposé comme dans cet univers complexe qui n'appartenait qu'à eux. Maxime se rendait-il seulement compte de la beauté de ce qu'il avait fait naître des seuls élans timides de ses mains ?

point d'interrogation [maxime&djilsi]Where stories live. Discover now