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Sidjil était déjà loin du Mans quand il a reçu le message.

Il était dans un état de béatitude et de peine mélangés qui le rendait complètement groggy, les mains crispées sur le volant alors que sur le siège passager, son acolyte de toujours, Manas, dormait depuis quelques temps déjà. La voiture avalait les lignes sur l'autoroute comme son esprit avalait chaque nouveau souvenir acquis la veille.

Ce n'était que la deuxième édition du GP Explorer, et parfois il se disait simplement pour chasser les émotions qu'il avait déjà vécu ça l'année précédente, mais cette course-là avait quelque chose de particulier. Il gardait le bon, le mauvais, isolait la journée entière de tout ce qu'il avait pu vivre auparavant. Et il y pensait fort, constamment depuis qu'ils avaient pris la route, comme pour garder l'adrénaline encore quelques heures dans ses veines.

Il avait rencontré tellement de gens, appris tellement de choses, souri tellement de fois, qu'il réalisait finalement que tout ça, c'était ce pour quoi il s'était toujours battu. Le bonheur l'enlaçait et il le sentait, l'accueillait à bras ouverts, sans remettre en cause sa légitimité. Il était juste reconnaissant de tout ce qui lui arrivait depuis quelques mois.

Alors Sidjil était profondément heureux, ce matin-là, en revenant du GP Explorer.

C'était le genre de matinée insupportable où le soleil inondait le pare-brise de chaleur, où les embouteillages étaient conséquents étant donné la foule venue du pays tout entier pour les voir s'affronter sur le circuit, où la musique grésillait un peu plus que d'habitude dans les basses de la voiture. Pourtant Sidjil n'arrivait pas vraiment à être irrité par quoi que ce soit, tapotant du pied sur le plancher en attendant que le bouchon se désengorge.

Pendant la majeure partie du trajet, quelque chose de doux flottait autour de lui, autour d'eux. Manas avait sauté sur son téléphone dès son réveil pour prendre des photos idiotes de son nez, avant de se servir dans les viennoiseries qu'ils avaient prises pour le chemin. Ils discutaient sans grande conviction des prochains mois, des prochaines vidéos, puis s'arrêtaient soudainement dès qu'une musique avait des paroles qu'ils connaissaient, puis reprenaient. C'était souvent comme ça avec Nicolas, quand ils ne se retrouvaient pas au milieu d'une aire d'autoroute paumée à se goinfrer.

Puis, quand les grands panneaux d'autoroute commencèrent à annoncer des noms de communes proches de Paris, Sidjil lâcha presque un soupir de soulagement. Il avait hâte de rentrer malgré toutes les belles choses qu'il ramenait avec lui et dont il aurait aimé pouvoir profiter plus longtemps. À côté, tout ce petit pan de sa vie où il n'était rien d'autre qu'un jeune homme heureux de chanter en cuisinant avait l'air affreusement monotone, mais à ce moment-là, il avait l'impression que c'était aussi une des plus belles choses qu'il pouvait vivre.

Mais Sidjil n'eut pas le temps de penser davantage aux courses qu'il devrait faire en rentrant, ni au linge qu'il devrait fourrer dans sa machine à laver, puisqu'un tintement strident lui coupa l'herbe du pied. Il avait oublié que son téléphone n'était pas en silencieux tant la matinée avait été calme.

Naturellement, il commença à se poser quelques questions, les yeux toujours rivés sur la route alors que Manas prenait la liberté de consulter son téléphone.

Toujours exempt de la moindre onde d'angoisse, Sidjil scruta Nicolas du coin de l'oeil pour éventuellement cueillir une réaction alors qu'il lisait le début du message. Mais il ne disait rien, et ce détail ne faisait que creuser la curiosité de Sidjil.

– Alors ? il finit par demander, de la hâte plein la voix.

– C'est Max.

Ah, Maxime...

point d'interrogation [maxime&djilsi]Hikayelerin yaşadığı yer. Şimdi keşfedin