— Je ne serais plus là pour t'arrêter avant que tu n'en dises trop, tranche-t-elle. Laisse-là donc découvrir le fonctionnement par elle-même, au lieu de la noyer d'informations. Elle ne retiendra rien et tu ne feras que la paniquer d'avantage. Tu vois bien qu'elle n'est pas très résistante ! Et je te rappelle que c'est une compétition, pas une colonie de vacances.

Je me prends un coup de massue tandis que les mots de Lise refont surface. Des milliers de filles postulent, prêtes à jouer. Je pensais tous les pions dans la même galère. Je n'ai pas envisagé que certains s'avéreraient contents d'être forcés à participer. À moins que nous n'ayons pas toutes été kidnappées. Certaines, comme March, l'ont peut-être choisi.

— Tu ne pouvais pas donner pire première impression, grommelle August.

— Je ne cherche jamais à donner bonne impression, réplique March.

— Tu devrais essayer au moins une fois pour voir. Ce n'est pas si terrible que ça.

— Mais je n'en ai pas besoin. Je suis déjà impressionnante.

Sur ces mots emplis d'humilité, March s'en va comme une fleur, bien que sa longue robe moulante, incrustée de micro-nacres argentées dessinant des milliers de branches, n'en comporte pas une seule.

— Je suis tellement désolée, j'aurais vraiment aimé que votre première rencontre se passe mieux. Surtout que vous êtes dans la même équipe.

— Oh, génial.

Je ne sais pas ce qu'appartenir à la même équipe signifie, mais l'idée de devoir supporter cette fille m'agace au plus haut point. J'aurais de loin préféré August, elle au moins répond à mes questions et ne m'insulte pas en guise de salut. C'est une véritable mine d'or et elle paraît être une bonne personne. À la façon dont elle accentue les R, elle semble venir d'Inde.

— Elle n'est pas si terrible que ça, murmure-t-elle, d'un sourire qui se veut rassurant. Je suis sûre que vous parviendrez à vous entendre ! C'est juste que c'est une des quatre Capitaines...

Elle s'interrompt aussitôt, les mains sur la bouche.

— Oups, je n'ai pas le droit de t'en dire plus ! Par contre, je peux faire quelque chose pour ta tête. Winter aurait quand même pu te laisser faire une toilette avant de te jeter dans le grand bain.

— C'est si terrible que ça ?

— Eh bien, ton mascara a beaucoup coulé, autant que tes larmes, je suppose ?

Larmes que je retiens depuis mon réveil et qui me font honte même quand elles ne se déversent pas. Mais à quoi bon expliquer que mon mascara a coulé pendant la nuit ? Ma réputation de pleurnicheuse fragile est déjà ancrée.

August déroule une serviette en coton qu'elle trempe dans une carafe d'eau et tamponne le mascara de la veille avec délicatesse. Elle me regarde un instant, fait tourner mon visage de gauche à droite et décide de s'occuper de l'ensemble.

— Voilà c'est beaucoup mieux et tu es si belle sans maquillage. Tu as beaucoup de chance, tu as une super jolie peau et tes cils sont immenses, lance-t-elle, avant de dérober mon bras et de m'entraîner vers le buffet.

— Merci, c'est très gentil, murmuré-je, même si ce n'est pas vrai.

Ma peau... Un toast débordant de petites billes noires s'enfonce subitement dans ma bouche.

— Goûte ça, c'est dé-li-cieux.

Les petites billes explosent, du caviar. J'en mange pour la première fois et le goût salé effacerait presque toute l'amertume et l'acidité noyant mes papilles. Presque.

The Virginity Game - L'île PerdueWhere stories live. Discover now