17

143 14 55
                                    

J'ai à peine le temps de mémoriser le goût de ses lèvres et de la sensation qu'elles ont sur les miennes que je repousse Eliott.

— Putain, mais qu'est-ce que tu fous ? Je suis en couple ! m'écrié-je.
— Merde... Je suis désolé, Anna, s'excuse-t-il en prenant sa tête entre ses mains.
— Tu es désolé ? répété-je, excédée.
— Je ne sais pas ce qui m'a pris...

Je tourne en rond dans ma chambre avant de le faire sortir par la force, l'abandonnant dans le salon.

Je ferme ma porte à clé et m'assois sur mon lit. Qu'est-ce qui vient de se passer ? Qu'est-ce que je vais devoir dire à Théo ? Est-ce que je dois lui dire ? Est-ce que c'est de la tromperie ?

— Bordel... chuchoté-je.

J'en sais rien. Je ne comprends plus rien. Je n'ai jamais été confrontée à ce genre de situation de toute ma vie.

Je dois aller chez ma mère demain. C'est déjà quelque chose d'assez éprouvant comme ça donc je vais essayer d'éviter de me rajouter de la pression en plus.

J'enfile mon pyjama et m'allonge dans mon lit après avoir trouvé mes écouteurs. Je cherche le sommeil mais je me rends vite à l'évidence: je ne dormirai pas cette nuit.


Deux jours après l'incident avec Eliott, je me retrouve face à la porte d'entrée de l'appartement de Théo.

Je ne lui ai pas parlé de ce qu'il s'est passé samedi soir, je n'ai pas jugé utile de le faire étant donné que je n'ai rien à me reprocher. Ce serait juste lui faire de la peine et le rendre encore plus jaloux d'Eliott. Quant à ce dernier, nous n'avons pas reparlé d'avant hier soir. À vrai dire, on ne s'est même pas parlé une seule fois. Ou plutôt... Je ne lui ai pas parlé. Eliott m'a bien envoyé quelques messages le soir même pour s'excuser, auxquels je n'ai pas répondu.

Eliott: Anna, je suis vraiment désolée.
Eliott: Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ça.

Il m'a envoyé deux autres messages hier:

Eliott: Laisse-moi t'expliquer, Anna.
Eliott: S'il te plait, réponds-moi. Il y a des choses que tu dois savoir.

À mes yeux, son dernier message annonce qu'il a des sentiments pour moi, et je ne suis pas prête à me confronter à ceux-là alors que j'ai déjà du mal à gérer les miens envers Théo.

Je frappe à la porte qui s'ouvre quelques secondes après, laissant apparaître Théo. On peut facilement lire sur son visage la fatigue de ces derniers jours. Il ne mentait vraiment pas quand il disait qu'il était malade, ça me rassure quelque part, parce que je commençais à croire les suspicions d'Eliott.

— Coucou, mon ananas. Entre.

Je m'exécute et pose mes affaires au même endroit que la dernière fois que je suis venue ici. J'ai l'impression que ça remonte à une éternité.

— Comment ça va ? me demande-t-il.
— Plutôt bien. Je suis allée voir ma mère avant-hier.
— Ah oui ? Ça s'est bien passé ?
— Étonnamment, oui. Ça se passe de mieux en mieux entre elle et moi, pour être honnête.
— Pourquoi est-ce que ça ne se passe pas bien en général ?

J'inspire profondément avant de m'asseoir sur son lit.

— Ma mère est alcoolique.

Silence. Théo ne dit rien, ce qui n'est pas très étonnant. Il n'y a pas grand chose à dire là-dessus au fond.

— Depuis des années, continué-je. C'est moi qui me suis tout pris durant mon adolescence.
— C'est-à-dire ? demande-t-il en déglutissant.
— Comment dire... Il est arrivé qu'elle soit très violente envers moi.
— Physiquement ?
— Oui, mais pas que. Il y avait aussi beaucoup de violence émotionnelle, du chantage, de la manipulation.
— Putain, Anna...

Nos coeurs entaillésWhere stories live. Discover now