Chapitre - 3

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Quatre cavaliers remontèrent au trot, le sentier sauvage longeant les hauteurs de la crête. Un soleil au zénith les accompagnait de sa chaleur étouffante, les obligeant à faire circuler leur unique gourde d'eau de main en main.

— Tu es sur de toi Erein ? Cela fait des années que cette mine est abandonnée, et quand on abandonne une mine, crois moi, il y a toujours une bonne raison.

La voix forte mais posée provenait d'un homme robuste, dressé avec droiture sur sa monture. Il arborait une figure usée et incertaine, cachée sous une barbe de deux semaines. Ses doigts glissèrent en travers de la crinière de son équidé, lequel parut se satisfaire de cette tendresse.

— J'en suis certain ! Ces mines ont été fermées lors de la précédente guerre, lui répondit la voix assurée d'Erein, à la tête du groupe. Ils pensaient certainement avoir exploité tout le filon. Mais la roche taillée a chutée à certain endroit. Ça a dû découvrir une nouvelle galerie sur laquelle ils n'étaient pas tombés à l'époque.

Sa gorgée terminée, il essuya sa bouche humide d'un revers de manche. 
Max fermait la marche, ses pensées vagabondaient telles des pétales dans un courant d'air. Le comportement de son frère l'intriguait de plus en plus ces derniers temps. Son air absent, son regard sombre, couplé au fait qu'il l'ait surpris plusieurs fois à converser seul. Une habitude usuelle chez sa petite soeur, mais qui ne seyait pas à son frère. À bien y réfléchir, il n'y avait certainement rien de surprenant là dedans. Déjà, depuis la guerre leur comportement n'était plus le même. Max, renfermé plus que jamais, rongé par les visages sans nom arrachés de ses mains à leur famille. Son frère, en lutte contre lui-même, confronté à ses désirs les plus sombres. Qui plus est, il avait été mis à mal par les bandits qu'il avait affrontés pour délivrer Ika de leurs griffes. En la ramenant à la maison, l'apparence qu'il arborait s'était marquée au fer rouge dans la mémoire de Max. Son corps recouvert de sang surplombé d'un sourire dément. La main de sa sœur dans la sienne, contraste d'une tendresse malaisante à cette vision irréelle. 
Quant à son envie soudaine de retourner fouiller une ancienne mine d'or épuisée...

— Tout de même fils, qu'est ce qui t'est passé par la tête pour décider de retourner farfouiller là-dedans ?

— Aucune idée ! C'était plus par curiosité, je souhaitais juste prendre l'air.

Erein chevauchait en tête, serein et vêtu de son sempiternel sourire. Leur père, Philippe, le précédait pourvu d'une mine contrastant avec son fils, de part son sérieux. À l'opposé, Max observait le cavalier le devançant avec une tendre fascination. Il s'agissait de leur oncle John : un bon vivant, comme son physique ventripotant en témoignait. Il représentait néanmoins un solide gaillard que personne n'aurait aimé avoir à dos dans sa sobriété. Pour l'heure, il somnolait, le visage caché par un chapeau troué, avachis sur sa monture. Cette dernière suivait d'instinct le rythme imposé par le groupe.

À la sortie de la ligne de crête, les quatre cavaliers débouchèrent sur une flore plus sauvage et anarchique, à travers laquelle le chemin disparaissait. Les herbes sèches parsemaient cette région. Les chardons et les ronces proliféraient sur les deux versants de la crête, comme un avertissements envers les rares explorateurs, à ne pas sortir du sentier. Une montagne terreuse s'extirpait de l'étouffante végétation. Les nombreuses pierres en équilibre sur ses pentes paraissaient guetter la moindre opportunité d'éboulement. 

— Nous ne sommes plus très loin, dit Erein. Attachons nos chevaux ici, ça devient trop touffu pour accéder à la mine.

Une fois les bêtes encordées à l'ombre des premiers arbustes, ces dernières s'empressèrent d'attaquer l'herbe nichée au pied des racines. Puis, les cavaliers s'enfoncèrent avec peine à travers les feuillages, à grand renfort de leur bras.

Voyage vers l'île des mortsWhere stories live. Discover now