Elyseus

CHAPITRE 39

Le temps s'était arrêté.

Cependant, tout s'enchaînait si vite autour de Sophie que la seule chose qui lui rappelait que le continuum espace-temps s'était bloqué était Elwin.

Le docteur était au milieu de l'infirmerie, versant avec délicatesse le contenu d'une fiole dans une autre. Sophie s'en était approchée doucement, et avait vu les gouttes du sérum jaunâtre suspendues par le temps dans l'espace.

Puis, choquée, elle s'était assise sur son lit habituel.

Et n'avait pas bougé depuis.

L'infirmerie n'avait jamais eu autant de patients. Et l'infirmerie n'avait jamais été aussi survoltée, dans le sens où il n'y avait aucun médecin pour soigner les blessés.

Ainsi, Edaline, Vika et Juline avaient pris en charge tout le monde, ayant reçu un enseignement médical. Elles s'étaient d'abord soignées mutuellement, puis s'étaient occupés des autres patients avec bienveillance et précision.

Cependant, les trois elfes s'étaient essentiellement concentrées sur Della. La blessure à la cuisse de l'Éclipseuse n'était pas mortelle... seulement si on s'en occupait rapidement. Le risque d'infection était grand, et la plaie profonde.

Lorsque tout le monde fut à peu près en voie de guérison, les trois mères s'assirent autour de Sophie. Edaline commença à dessiner des cercles lents dans le dos de sa fille, et alors la jeune fille pensa à l'unique chose qu'elle évitait depuis qu'ils étaient arrivés.

Sa mère.

La femme qui l'avait porté pendant neuf mois dans son ventre, qui l'avait mise au monde, qui l'avait élevée, qui l'avait grondé, qui l'avait câliné... qui l'avait aimé.

C'était elle qui avait choisi son nom.

Elle était morte.

- Comment tu te sens, fillette ?

La jeune fille cligna des yeux, et croisa le regard azur de Grady, debout devant elle.

- Mal. Et toi ?

Son père adoptif observa la fatigue générale, la pâleur des Vacker. Puis il jeta un bref regard au teint maladif de Della, et à Elwin, bloqué au centre de la pièce. La plupart des discussions tournaient autour de ça.

- Inquiet.

Sophie s'effondra sur le lit, lassée par les évènements. Vika se pencha au-dessus d'elle, et agita un flacon de jouvence. Pour une Empathe, elle était très peu réceptive.

- Tu peux boire ça, Sophie ?

- Je pense que oui, répondit la jeune fille de mauvaise grâce.

Elle se redressa lentement, attrapa la boisson rafraîchissante, et allait l'avaler lorsque...

- BLONDINETTE !

Oh non...

La Télépathe ferma les yeux, respira calmement... puis elle rouvrit les yeux, et vit le visage souriant de Ro.

- Lady Paillettes vient de me raconter ce que tu as fait chez moi.

Pendant un instant, Sophie ne comprit pas de quoi la princesse voulait parler. Elle n'arrivait même pas à croire que tous les évènements qui s'étaient enchaînés s'étaient déroulés au cours d'une seule journée. Puis elle se souvint, et se redressa brusquement. La grimace de Biana ne l'aidait pas.

- Oh mon dieu...

L'ogresse se pencha vers son oreille, et chuchota comme une conspiratrice :

- Tu adores détruire Ravagog, ou quoi ?