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Dans la grande tente, après le dîner, ce soir-là, Lorna remarqua combien le Prince était particulièrement beau et charmant. Le plaisir d'avoir dompté l'étalon se lisait encore dans ses yeux, et, quand il s'adressait à la jeune fille, sa voix avait des inflexions presque tendres.
-J'ai un présent pour vous, dit-il. Venez, laissez moi vous donner ceci. Elle était en train de lire un magazine français et leva les yeux. Il tenait entre ses doigts un long collier de perles, d'une blancheur de lait contre sa main bronzée.

-Allons! posez votre revue, et voyons comment vous vont ces perles.
Il ne lui avait jamais offert de bijoux auparavant,

mais il avait dû en avoir envie; il caressait parfois le cou de la jeune fille ou le lobe de son oreille comme s'il y manquait une parure.
- Mais, fit-elle nerveusement, je... je ne porte jamais
de collier; ça me gêne! Il la regarda posément, détaillant la tunique de velours, le pantalon de soie qu'elle avait pris l'habitude de porter, tout en pensant qu'ils la rendaient trop attrayante aux yeux du cheikh. Elle avait du mal à supporter les babouches et marchait pieds nus, la plupart du temps, sur les épais tapis.
-Je veux voir ce collier sur vous.
voix était calme, mais le ton si impératif que le lévrier, couché à ses pieds, leva la tête.
- Ce n'est pas à toi que je parle, Fedjr, mais à cette jeune fille, là-bas, qui sait très bien que j'ai les moyens de me faire obéir.
-Ah oui? Et comment? En me mettant une corde au cou...? Une corde de perles, pourquoi pas? interrompit-il d'un air moqueur.
-Allons, dois-je envoyer Fedjr vous
chercher? Il pourrait bien prendre vos délicates chevilles pour des pattes de gazelle!
-Brute! cria-t-elle en jetant le magazine. Elle s'était levée et marcha lentement à travers la pièce jusqu'à lui. Il était assis sur un divan, et elle lui faisait face, immobile comme une statue. Il la prit par la main et, la tirant brusquement, la força à s'asseoir à côté de lui. Puis il attacha le collier au cou de la jeune fille, qui frissonna à ce contact. Les perles étaient superbes et luisaient doucement à la pâle lumière de la pièce. Lorna regardait droit devant elle, les mains sur les genoux.

-Fausses? murmura-t-elle pour le défier.
-Un jour, vous irez trop loin, fit-il avec un sourire dangereux, et je me mettrai vraiment en colère! Cha cune de ces perles suffirait à faire vivre une famille arabe pendant des mois.
-Alors, donnez-les à vos Arabes! cria-t-elle en essayant d'enlever le collier.

Mais il lui saisit le poignet et le serra fortement. La lueur amusée, dans ses yeux, avait fait place à une expression sauvage. Il prononça entre ses dents : -Vous retirez ce collier et vous aurez affaire à moi!

-C'est un cadeau que je vous fais, et je considérerais
comme une insulte que vous refusiez de le porter! Lorna grinçait des dents et se retint pour ne pas crier; Kasim lui faisait mal, tant il serrait fort son poignet.

-Vous êtes un tyran, gémit-elle.
-Peut-être, mais généreux, fit-il en se moquant.

-Vous ne pensez tout de même pas que je vais offrir un collier en noyaux de dattes à ma kadin?

-Comment osez-vous m'appeler ainsi! cria-t-elle comme étranglée par le collier, et par le mot, car elle -savait qu'il signifiait «<< femme esclave >>. Vous m'avez bien traité de tyran?

- A juste titre!

- Eh bien? N'êtes-vous pas ma kadin? - C'est vous qui le dites, et c'est pourquoi je vous hais!
- Le miel attire les abeilles; la flamme, les papillons; la femme séduisante, les hommes. N'importe quelle femme serait heureuse d'être enchaînée avec des perles.

-Je ne suis pas n'importe quelle femme... Pour la première fois, les yeux de la jeune fille s'abaissèrent sur les perles. Le collier était ancien. Qui l'avait porté avant elle? Au cou, sur les cheveux, autour de la taille? -Non, vous n'êtes pas n'importe quelle femme. D'habitude, elles se jettent au cou des hommes. Vous, je vous découvre petit à petit, en effeuillant votre cœur secret, comme les pétales d'une rose.

C'était écrit sur le sableWhere stories live. Discover now