Chapitre 15

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Le retour à Chicago s'était fait sans encombres. Nous avions commencé à remballer nos affaires lorsque Marzia était sortie de l'hôpital avec le bébé et j'avais fait mes aux revoir à mes amis à contre cœur.

Comme à chaque retour de vacances, j'avais cette petite épine plantée dans la poitrine qui me comprimait à chaque fois que je prenais une grande inspiration. C'était le retour à la réalité le plus brutal, celui auquel on pouvait s'attendre, mais qu'on ne voulait pas penser.

Cela faisait plusieurs jours déjà et je n'avais plus revu Zeke depuis le jour de la naissance, à l'hôpital. Marzia avait pris les devants dans notre dos depuis bien longtemps déjà, et s'était installée dans un petit appartement non loin de la maison avec Alexandre. Elle avait bien fait parce que après sa conversation bourrée de vérités avec Carmela, elle n'aurait probablement pas supporté de rester dans la maison avec nous.

J'étais bien loin de la juger parce que je n'étais certainement pas mieux qu'elle. D'ailleurs, quand je le pouvais, je passais la voir pour voir comment les choses allaient. Même si elle agissait comme si rien ne s'était passé lorsqu'elle était avec moi, je voyais bien que les mots lui brûlaient la gorge. Elle voulait me parler, tout me raconter en détail, mais elle pesait encore les pour et les contres de me mettre dans ses confidences les plus intimes.

Alors je ne lui forçais pas la main. Je savais maintenant qu'elle était au courant depuis le début — et pour tout — de mon histoire avec Zeke, et qu'elle n'en parle pas me rendait encore plus nerveuse chaque jour qui passait.

Carmela ne parlait plus beaucoup non plus. Elle n'avait pas manqué de me demander si j'étais au courant de l'histoire de Marzia et du lieutenant, ce à quoi je lui avais répondu que je l'avais appris le jour de la naissance du bébé.

Elle n'en revenait pas. Elle n'en voulait pas à Marzia d'éprouver des sentiments pour le lieutenant. Elle lui en voulait de ne pas lui en avoir parlé plus tôt pour éviter de faire souffrir Zeke. Évidemment, il s'agissait de sa pensée actuelle parce qu'elle ne savait pas que, pendant ce temps-là, monsieur Jefferson fricotait avec moi.

J'avais la désagréable impression que nous étions la famille toxique du quartier. Celle à laquelle les gens ne confieraient même pas leur poisson rouge pour quelques jours. Les mensonges et les non-dits émanaient de nous comme la fumée d'un incendie d'une usine de papier. Ça commençait à me bouffer de l'intérieur. J'avais envie de tout dire à Carmela concernant mon histoire aussi, mais j'étais persuadée qu'elle ne me regarderait plus de la même façon.

J'avais peur. J'étais même terrifiée à l'idée qu'elle... me renie ou quelque chose de pire encore : qu'elle ne m'estime plus.

— Pourquoi est-ce que tu veux tant lui en parler ? me demanda Marzia depuis l'autre côté du canapé.

Une biberon dans une main et Alexandre appuyé contre son bras opposé, elle me regardait dans l'attente d'une réponse pendant que je continuais d'étudier les détails de son appartement. Tout avait été conçu exceptionnellement pour elle. Je n'en revenais toujours pas qu'elle avait dirigé tout en chantier dans notre dos. Cet endroit était parfait, à son image.

De grandes baies vitrées offraient une vue à couper le souffle sur la ville, mais illuminaient également la pièce principale d'une lumière intense, vivante, faisant ressortir la couleur pâle des murs. Un épais plancher de bois foncé recouvrait toute la superficie de l'appartement, lui conférant un aspect rustique et marquant le contraste avec les murs et les meubles. Des plantes vertes ornaient presque tous les coins de la pièce à vivre, ajoutant une touche de couleur au décor.

— Pourquoi est-ce que toi tu ne l'as pas fait quand tu en as eu l'occasion ?

Elle s'attendait à ce que je lui retourne la question, elle avait même déjà préparé ses réponses.

Breaking the limit - 1.5Donde viven las historias. Descúbrelo ahora