Nuage de peur

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Sans cesser de caresser tendrement le visage de Harry, Severus brandit sa baguette en direction de sa tempe, et murmura.
- Legilimens

La seconde suivante, Severus était dans l'esprit de Harry Potter.


Malgré lui, il eut un sourire amusé en se rendant compte qu'il était toujours autant désorganisé que lorsqu'ils avaient eu ces maudits cours d'occlumentie.
Cependant, son amusement fut de courte durée. L'esprit de Harry était bien plus sombre qu'autrefois. Bien plus torturé.

Le jeune homme semblait se débattre dans un nuage de peur permanent, comme s'il était resté bloqué dans les années les plus noires de la guerre qui avait secoué le monde magique. La fin de Voldemort ne semblait pas lui avoir apporté le moindre soulagement...

Avec un soupir, Severus avança doucement dans les souvenirs de Harry, essayant de comprendre ce qui n'allait pas.


Le premier souvenir qui semblait hanter Harry était la mort de son parrain. Pour la première fois, Severus assista à la mort de son ennemi d'enfance, et se rendit compte que toutes ces années après, la culpabilité était toujours aussi présente chez le jeune homme. Il voyait encore et encore son parrain adoré, sa dernière famille, tomber derrière le mystérieux voile de l'Arche du département des mystères. Harry hurlait et se précipitait pour se battre contre Bellatrix, tentait de lui jeter un Doloris et échouait.
Visiblement, il s'en voulait autant de la mort de Sirius que de ne pas avoir réussi à le venger...

Severus soupira et passa au souvenir suivant. La mort de Diggory. Là encore, le jeune homme se sentait terriblement coupable. Il se reprochait d'avoir voulu partager la victoire, d'avoir aidé son adversaire, et de ne pas avoir pu le protéger lorsqu'ils étaient arrivés à Little Hangleton. En découvrant la renaissance de Voldemort, Severus sentit la nausée tordre son estomac, se rendant compte du courage qu'avait eu le Gryffondor pour en revenir sain d'esprit, pour avoir la force de ramener le corps de son camarade et pour ne jamais avoir cédé à la pression du ministère qui voulait cacher ces évènements.

Il continua, passant de souvenir en souvenir, découvrant l'enfance misérable de Harry, le traitement qui lui était réservé. Il se souvenait de Pétunia comme d'une peste et visiblement elle n'avait pas vraiment changé. Il se jura que dès qu'il aurait repris assez de forces, il retrouverait ces foutus moldus pour leur montrer ce qu'était un Mangemort. Pour leur montrer ce que leur neveu avait supporté, pour faire regretter à cette punaise d'avoir trahi sa sœur.

Il traversa quelques souvenirs heureux, la plupart avec ses deux amis, et il découvrit pourquoi Harry était arrivé seul chez lui : visiblement, il s'était écarté pour les laisser vivre leur amour en paix. Il doutait que miss Granger et monsieur Weasley soient heureux de la disparition de leur meilleur ami, mais ce serait un point à discuter plus tard avec le griffon têtu...

Bien évidemment, dans ses souvenirs, il put voir des images de ses propres cours, et il eut terriblement honte de son comportement. Surtout quand il se rendit compte que la haine de Harry envers lui des premières années se muait en respect alors même qu'il continuait à le traiter avec une injustice flagrante.

Il y eut l'épisode de la pensine et il découvrit ce que Harry avait pensé de son adolescence. La compréhension que ressentit Harry termina d'annihiler le souvenir de James Potter même s'il n'avait pas pensé à lui depuis un long moment en voyant son fils. La colère envers son père et son parrain adoré fut un baume sur ses blessures anciennes, et il admira ce garçon hors du commun, capable de se dresser contre les siens pour réparer une injustice...

Severus continua, découvrant les morts durant la bataille de Poudlard, que Harry se reprochait. Chaque chose qui avait mal tourné pendant la guerre, il se persuadait que c'était parce qu'il n'était pas assez puissant, pas assez intelligent, pas assez rapide pour agir.
Ce foutu gosse se reprochait même de n'avoir pas pu empêcher la marque sur le bras de Drago Malefoy, alors qu'ils n'avaient jamais été amis...


Il assista ensuite à sa propre agonie, du point de vue du jeune homme. Le sang, le rire cruel de Voldemort. Son corps qui s'écrasait contre le mur et qui glissait au sol. Harry qui se jetait sur lui, qui ne pensait qu'à le sauver, lui lançant des sorts de soins, priant de toutes ses forces. Harry qui pleurait pour lui, qui lui demandait de ne pas l'abandonner.
Le désespoir d'Harry le choqua bien plus que tout le reste, parce qu'il n'aurait jamais pensé compter à ce point pour quelqu'un.

Il assista à la mort de Voldemort, et découvrit la surprise horrifiée de Harry quand le jeune homme se rendit compte qu'il avait survécu. Il apprit qu'après avoir vaincu, sa première réaction avait été de se précipiter près de lui et de découvrir l'absence de son corps.


S'il s'était demandé comment Harry avait trouvé son adresse, il sut enfin que c'était grâce à Lily, indirectement. Sans la jalousie de James Potter à son égard, Harry ne l'aurait jamais localisé...

Il arriva enfin au souvenir le plus récent, le moment où il était remonté de son laboratoire, lorsqu'il avait trouvé Harry figé, presque en état de choc.


Il cligna des yeux, incrédule, en comprenant. Lui se préparait, en imaginant que Harry partirait sans un regard en arrière dès qu'il serait remis, et Harry paniquait à l'idée d'être jeté dehors. Avec douceur, il sortit de l'esprit du jeune homme endormi et le regarda autrement.
Il soupira.
— Foutu Gryffondor idiot...
Cependant, il n'y avait pas la moindre animosité dans ses paroles. Il était juste étonné de l'attachement du jeune homme envers lui, et décidé à le rassurer dès qu'il ouvrirait les yeux. À lui dire qu'il pourrait rester autant qu'il en avait besoin, qu'il était chez lui dans cette maison sinistre, si ça l'aidait à aller mieux. Après tout, il était plutôt agréable à vivre et leur cohabitation était loin d'être pénible. Ils étaient adultes tous les deux, et avaient tous les deux besoin de temps pour se remettre de ce qu'ils avaient vécu.

Severus ferma les yeux en se laissant aller en arrière dans le sofa, tenant Harry contre lui, possessif. Avant de se laisser aller à somnoler, il pensa qu'il devrait absolument faire comprendre à Harry qu'il n'était coupable de rien. Qu'il était un foutu héros, rien de moins.

Deux âmes briséesWhere stories live. Discover now