Écrire tes péchés pas une tragédie

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Harry s'était longtemps inquiété de la réaction de Sirius à sa lettre. Cependant, il n'avait encore reçu aucune réponse, et il craignait que son parrain ne lui tourne le dos.

Pour autant, il ne comptait pas changer d'avis.

À Poudlard, il surprenait souvent le regard pensif de Severus Rogue sur lui — probablement parce qu'il tentait de s'excuser à chaque fois qu'ils étaient seuls — mais il n'y avait eu aucune amélioration dans leurs relations. L'homme semblait toujours le détester autant, voire plus qu'avant.

Et puis, il avait eu l'atroce vision de son parrain, prisonnier, aux mains de Voldemort. Malgré le comportement passé de Sirius, il ne pouvait pas l'abandonner, parce qu'il était sa dernière famille.
Sirius avait été un idiot à Poudlard, mais Harry était fermement convaincu qu'il était devenu quelqu'un de bien.

Il avait cherché de l'aide, mais Dumbledore était absent, et MacGonagall indisponible. Sans compter Ombrage qui le surveillait de près.
Désespéré, il avait été voir Rogue, le suppliant de l'excuser, et de faire quelque chose.


Il avait probablement été incohérent dans ses explications, alors qu'il paniquait. L'homme était resté maître de lui-même, le renvoyant d'un geste de la main, lui assurant que son foutu parrain ne risquait rien.

Et Harry ne l'avait pas cru.
Il n'avait pas pu le croire, parce que Sirius avait été réellement horrible avec Rogue durant leur adolescence. Parce qu'il avait fouillé dans les affaires de son professeur si secret et que l'homme devait encore bouillir de rage à ce sujet.

Alors, il s'était résolu à agir. Jusqu'à présent, aucun adulte hormis Sirius ne lui avait laissé penser qu'il pouvait compter sur eux, et il ne lui restait plus qu'à se débrouiller seul une fois de plus.


Pendant qu'il montait un plan insensé pour se rendre au ministère sous le nez d'Ombrage, Severus contactait Sirius Black. Il le haïssait toujours autant, mais Dumbledore lui en voudrait s'il restait sans agir après la petite crise de panique de son précieux survivant.

Il limitait les contacts avec le sale gosse, mais il devait avouer qu'il lui en voulait un peu moins. Un peu seulement. Il n'avait plus envie de l'écorcher vif lorsqu'il le croisait dans les couloirs déjà, ce qui était un mieux. Après tout, le môme n'avait pas raconté à tous ses petits camarades ce qu'il avait appris sur son passé, ce qui était à porter à son crédit.

Le sale cabot sembla gêné de le voir dans sa cheminée face à lui, et encore plus distrait qu'à son habitude. Severus ne comprit pas immédiatement le discours de l'homme — pensant que la folie d'Azkaban l'avait rattrapé — avant de se figer, stupéfait.
— Sni... Rogue. Je... Bon sang, James me dirait d'écrire mes péchés, pas une tragédie, alors je vais passer sur... nos relations à Poudlard, on sait tous les deux à quoi s'en tenir. Je suis... désolé. Harry était furieux d'avoir découvert comment on t'a traité et il m'a fait comprendre que j'étais... que nous étions tous stupides.

Le professeur de potions cligna des yeux, stupéfait. Pendant un long moment, il resta incrédule, oubliant l'objet de son appel, ne comprenant pas ce qui se passait.

L'urgence de la situation le rappela à l'ordre, et il oublia un instant cette conversation surréaliste, pour grogner.
— Ton filleul chéri est persuadé que tu es en ce moment même prisonnier de Tu-sais-qui, en train d'être torturé au Ministère. Je lui ai assuré que c'était probablement un piège stupide, mais je suis certain que cette tête de mule ne me fait pas confiance...


Sirius plissa les yeux et grogna, avant de jurer sourdement.
— Préviens Dumbledore et moi... je vais essayer de le rattraper avant qu'il ne s'attire des ennuis.

Pour une fois, Severus ne s'offusqua pas du ton directif et hocha la tête. Alors qu'il allait s'éloigner de l'âtre, le cabot le rappela, sèchement.
— Rogue ! Fais en sorte de gagner sa confiance. Harry est un chouette gosse.


Il était dit que Severus ne pourrait jamais mettre les choses à plat avec Black. Quelques heures plus tard à peine, Sirius Black était mort, et le monde magique apprenait le retour de Voldemort.

Il vit le désespoir du Gryffondor, ainsi que sa colère — il avait après tout dévasté le bureau de Dumbledore — mais il n'eut pas l'occasion de lui parler avant la fin de l'année scolaire.

Harry était rentré du ministère dans un état second. Il aurait pu être effrayé par son face-à-face avec Voldemort, mais il n'avait rien ressenti.
Il avait l'impression qu'il ne pourrait plus jamais rien ressentir, pas après avoir vu Sirius mourir sous ses yeux.

Il n'avait pas cru Rogue, persuadé qu'il lui mentait, et ce manque de confiance avait tué Sirius. Il avait tué Sirius.


Il se souvenait vaguement avoir hurlé sur Dumbledore, avoir tout détruit autour de lui alors qu'il se laissait aller à la colère. Mais la suite était floue, jusqu'à son retour chez les Dursley.

L'année précédente, même s'il était séparé de son parrain et qu'il devait encore subir son horrible famille moldue, il avait l'espoir qu'un jour les choses changeraient.
Désormais... il ne pouvait plus rêver qu'il allait changer de vie. Que son parrain préparait sa venue, que quelqu'un voulait réellement de lui.

Lorsque son oncle le bouscula sans ménagement, il resta apathique, conscient que l'été allait être particulièrement pénible, mais que c'était une juste punition pour avoir tué son parrain.

*

Severus se rendit compte pendant l'été que les choses étaient en train d'accélérer. Désormais à découvert, Voldemort ne s'embarrassait plus de précautions et lançait des attaques à tout va.

Face à l'échec de Lucius au Ministère, il découvrit que Drago allait être marqué, et il ne put rien faire pour empêcher ça. Il jura cependant à Narcissa de tout faire pour le protéger, n'hésitant pas à mettre sa vie dans la balance.

Il ne pouvait pas dire qu'il avait réellement pensé à Potter. Cependant, il lui était arrivé de se demander un bref instant comment se sentait le garçon. Même s'il ne l'aimait pas, son désespoir au retour de son escapade improvisée au Ministère l'avait touché.
Il espérait que Dumbledore n'avait pas eu la folie d'ignorer encore le gamin, s'il voulait qu'il soit capable de se battre pour le monde magique.

Mais trop occupé par son rôle d'espion, Severus chassait aussitôt toute pensée concernant Harry Potter.

Deux âmes briséesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant