- Oh, je vous en prie ! Vous savez parfaitement que ce jeu de pouvoir et d'amour requiert que vos mains soient trempées de sang.

- Évidemment. Vous, qui avez conduit tant de gens à leur destruction, le savez mieux que personne. Combien de femmes ont-elles subit vos manigances ? La duchesse de la Vallière, la marquise de Ludres... Et bien d'autres encore jusqu'à l'arrivée de ma sœur. La seule sur qui vous vous êtes fourvoyée. Sachez qu'elle n'a jamais eu besoin de se salir de sang et ce ne sera jamais le cas. En revanche, vous avez le sang du roi sur les mains.

- Là encore, si vous croyez m'impressionner, vous êtes bien naïf. Je reste la mère de ses enfants. Et quand je reviendrai, ce sera soit parce que votre sœur aura échoué, soit parce qu'elle sera morte.

- L'abattement vous fait dire des absurdités. Jamais sa Majesté ne vous pardonnera. Quand bien même il s'agissait d'un accident, les faits restent les mêmes.

Henri ne donne pas le loisir à son interlocutrice d'avoir le dernier mot. Il tourne les talons sitôt sa phrase terminée.

Son ami François de Hautecourt avait décidément bien raison sur le genre de femme qu'est Athénaïs de Montespan. Prête à tous les risques et périls, y compris à tuer une innocente. Et une fois à court de ruses, elle met en avant le dernier lien l'unissant au roi : leurs enfants, dont la véritable mère en tout et pour tout a manqué de perdre la vie.

L'on peut bien remercier le souverain pour avoir voulu sauver sans hésiter la femme qu'il aime, quitte à subir la blessure au couteau à sa place.

L'aîné des Montéclair n'est cependant pas tranquille. Les derniers mots de la marquise lui laissent une curieuse sensation de malaise. Bien qu'elle soit étroitement cloîtrée et surveillée au palais royal, cela ne signifie pas pour autant qu'elle n'a pas prévu une manœuvre de secours dans l'ombre pour arriver à ses fins d'éliminer Isabelle.

Mais de quoi serait-il question ?


- Votre petit entretien avec la marquise vous a-t-il appris quoi que ce soit ?

- Oh oui, et pas des moindres. Vous étiez éclairé sur cette femme : elle est on ne peut plus dangereuse et il faut nous attendre à une surprise mortelle de sa part.

Après avoir quitté les quartiers de Madame de Montespan, Henri et François se sont réunis afin de se rendre au château de Vaugirard. Le coma du Roi Soleil dure maintenant depuis deux jours. Isabelle reste le plus souvent à son chevet, quand elle ne s'occupe pas des enfants qui lui tiennent parfois compagnie si ce n'est point Amélie qui le fait. Cette dernière a décidé de rester auprès de sa meilleure amie jusqu'à que le monarque se réveille, redoutant une rechute de son état mental. Au moins la comtesse n'est-elle pas seule. Malgré tout...

- Il y a quelque chose qui ne tourne pas rond, mon ami. Cette tentative d'assassinat à l'arme blanche n'avait rien de prémédité. Elle avait certainement envisagé une autre méthode pour supprimer ma sœur, sans toutefois pouvoir la mettre en œuvre.

- Mais vous ignorez de quoi il s'agit. De ce que je sais de la marquise, elle n'oserait jamais s'attaquer directement à ses ennemis de front, du moins pas de manière directe. Ce n'est nullement son genre.

- Je crois me souvenir que vous disiez qu'elle est fallacieuse. Elle aurait dans ce cas recourt à un moyen discret sans se salir les mains. En faisant appel à une autre personne, peut-être ?

- Non, Henri. Pas concernant Isabelle. Il en allait de la place de maîtresse officielle de sa Majesté. Et pour ce rang, jamais elle n'aurait confié la tâche de tuer une rivale à un assassin. Elle aurait fait les choses par elle-même.

Monsieur de Montéclair redresse abruptement le visage vers son compagnon.

- Juste ciel ! Le poison ! Mais quand aurait-elle trouvé le temps de s'en servir ? À moins qu'elle ne l'ait dissimulé dans la nourriture.

- Impossible, les enfants aurait aussi été touchés et elle ne veut pas leur faire de mal. Isabelle est son unique cible.

Les deux hommes soupirent. La piste du poison est certaine. Mais de quelle manière va-t-il être utilisé ? Telle est la question.

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Comme je l'ai dit auparavant, les révélations se font toujours dans les temps les plus sombres. Comme les règles du jeu de pouvoir et d'amour dans lequel se sont affrontés les personnages jusqu'à présent, à travers cette confrontation entre Henri et Athénaïs.

Henri est par ailleurs un meilleur "joueur" que sa sœur. Non pas que je veuille dévaloriser ma protagoniste, mais contrairement à son frère qui fréquente la cour royale depuis longtemps (comme dit dans les premiers chapitres de l'histoire), Isabelle n'est pas forcément consciente de toute l'étendue du jeu mortel dans lequel elle s'est retrouvée impliquée sans le vouloir. Un jeu d'intrigues où "tous les coups sont permis" dans une certaine mesure.

Je vous retrouve demain pour l'ultime chapitre de ce premier volet !

La Comtesse du LysOù les histoires vivent. Découvrez maintenant