La comtesse n'en revient pas. La reine vient-elle réellement de lui donner sa bénédiction d'aimer l'homme qui est son époux ? Certes, elle sait indubitablement que le mariage des deux souverains ne s'est fait que dans le but de forger une alliance entre la France et l'Espagne, mais avoir une relation avec un homme marié, le roi, dont la femme est son amie ?

De nouvelles larmes désespérées et elle se retrouve pressée dans les bras de sa dite amie.

- Mais enfin, Madame, comment pourrai-je concrétiser une telle relation ? Ce serait un irrespect inimaginable pour vous ! Je ne vaudrai pas mieux que la marquise !

- Voyez, c'est pour cela que j'accepte. Car vous n'êtes et ne serez jamais comme elle. Je sais pertinemment que jamais vous ne me manquerez de respect.

- Aucunement. Je ne veux pas être la favorite officielle, ni même venir à la cour. Vous avez déjà été bafouée et je ne le désire point. Sans compter que mon devoir premier sont les enfants, je ne peux les abandonner.

- Alors, continuez à prendre soin d'eux, ainsi que de leur père. Lui et moi avons déjà conversé en toute honnêteté à ce sujet.


Je n'ai plus que les os, un squelette je semble,

Décharné, dénervé, démusclé, dépulpé,

Que le trait de la mort sans pardon a frappé,

Je n'ose voir mes bras que de peur je ne tremble.


Apollon et son fils, deux grands maîtres ensemble,

Ne me sauraient guérir, leur métier m'a trompé,

Adieu, plaisant Soleil, mon œil est étoupé,

Mon corps s'en va descendre où tout se désassemble.


Quel ami me voyant en ce point dépouillé

Ne remporte au logis un œil triste et mouillé,

Me consolant au lit et me baisant la face,


En essuyant mes yeux par la mort endormis ?

Adieu, chers compagnons, adieu, mes chers amis,

Je m'en vais le premier vous préparer la place.*

Isabelle referme son livre, puis tend le bras vers sa table de chevet pour l'y poser dans un soupir morose. Les quatre petits angelots allongés à ses côtés dans son grand lit ne sont guère plus joyeux qu'elle. Des perles d'eau salée ruissellent sur les pommettes de Louis-César qui a, tout comme sa sœur Louise Marie Anne pleurant aussi, un bras passé autour de sa gardienne. Louis-Auguste et Louise Françoise n'ont pas moins de mal à garder contenance.

Miséricorde ! Dire que non seulement leur père a été empalé par l'abominable créature qui leur sert de génitrice, mais qu'ils ont en plus manqué de perdre leur mère bien-aimée... C'est beaucoup trop pour des enfants de leurs âges en une seule journée.

Les voilà désormais tous réunis à la nuit tombée. Épuisés, affligés, larmoyants... Les repas du midi et du soir se sont passés dans une atmosphère pour le moins pesante, l'idée de la mort accablant lourdement chacun d'eux au simple mémorandum de l'état de Louis. Antoine d'Aquin*, le médecin de ce dernier a par ailleurs été formel : sa guérison repose uniquement sur lui et Dieu seul sait quand il se réveillera.

- Ma mère... Sais-tu quand Père émergera de son sommeil ?

- J'aimerai pouvoir te répondre bientôt, Maflée. Malheureusement, je n'en ai aucune idée.

- J'ai eu si peur. Mon cauchemar a faillit se réaliser.

- Grâce à votre père, ce n'est point la réalité, Fannie. Je te l'ai dit lorsque tu es venue me trouver la nuit dernière : Je vous aime de tout mon cœur. Ne l'oubliez jamais, pour l'amour du Seigneur !

- J'aimerai tellement que tout rentre dans l'ordre. Que nous soyons tous de nouveau en train de rire et s'amuser dans les jardins du château. Avec toi et Père veillant sur nous. Je n'aurai jamais supporté de te voir morte, ma mère chérie.

- Rien dans ce monde n'est plus grand que mon amour pour vous, César, ô mon ange.

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Notes de fin de chapitre :

1*: Pierre De Ronsard (1524-1585), « Je N'ai Plus Que Les Os. . . »

2*: Médecin de Louis XIV de 1672 à 1693

L'idée de la mort pèse suite à cette tentative de meurtre de la part d'Athénaïs, le hic étant que la cible n'a pas été la bonne. Cette intervention de la part de Louis pour sauver la vie d'Isabelle a tout de même permit la révélation du sentiment amoureux, comme nous pouvons le constater lorsque Marie-Thérèse fait son apparition. Même les enfants aimerait que leur famille soit au complet.

Louis va-t-il s'en sortir ?

Je vous retrouve le week-end prochain pour les deux derniers chapitres de ce premier volet.

La Comtesse du LysWhere stories live. Discover now