Isabelle n'est point retournée se mêler à la foule à la suite d'Amélie, laquelle a décidé de rejoindre Henri et François. Ce genre d'endroit n'est définitivement pas à son goût. Elle profite de la fraîcheur ambiante avec délice quand elle sent soudain une présence derrière elle. Son mouvement pour se retourner est lent, sachant précisément qui est là.

Ils restent muets tous les deux.

Jamais encore, la comtesse n'a eu l'opportunité de le voir dans des vêtements différents que ceux considérés comme « ordinaires » pour un roi, mais le costume rouge et doré que Louis porte ce soir lui va à merveille. On aurait juré qu'il a été taillé pour lui, lui donnant la majesté de l'astre du jour. Lui aussi est émerveillé face à l'apparence exquise de sa vis-à-vis, c'est le moins qu'on puisse dire.

- Madame, vous êtes sublime.

L'interpellée rougit sous le compliment, souriant légèrement. Elle ne sait quoi répondre, ni comment lui dire que lui aussi est superbe. Il vient se placer à ses côtés, reste un moment silencieux puis se tourne vers elle.

- M'accorderiez-vous quelques pas de danse ?

Surprise, Madame de Langlois hoche la tête avec plaisir et glisse sa main dans la sienne qu'il lui tend galamment. Il la conduit au milieu de la terrasse à son plus grand étonnement.

- Ici ?

- Nous serons plus tranquilles.

La musique commence au loin. Louis enroule sa main autour de la taille de sa cavalière, elle pose la sienne sur son épaule et lève le regard vers lui. Pour sûr, il sait danser, il sait même très bien. Guidant son corps d'une main de maître, il fait tournoyer Isabelle au rythme de la musique. Puis elle ne pense plus à rien... Elle se laisse guider, simplement guider par cet homme qui aurait pu mener cette danse jusqu'en enfer...

Le monarque sourit doucement, ses yeux gris ancrés dans les yeux bleus de la comtesse. Dans la pénombre de ce balcon, à l'abri des regards, cette dernière a l'impression de flotter dans le ciel. La Lune éclaire leur danse d'un air complice, d'une lueur tendre, et leur ombres voltigent à leurs côtés avec grâce.

Il n'y avait aucun autre endroit sur terre où Isabelle voulait se trouver en ce moment. Aucun endroit autre que sur cet entresol, à danser dans les bras de son roi. Ô combien elle aurait voulu que cette danse ne prenne jamais fin...

Louis resserre sa prise sur la taille de sa cavalière et la fait tourner une fois de plus. Puis, dans un élan, elle décolle du sol. Il l'a prise par la taille de ses deux mains pour la faire tourner avec lui. Riant doucement, elle pose ses mains en appui sur ses épaules tandis qu'il tourne en souriant. C'est alors qu'elle le voit...

Cet éclat dans les yeux de son souverain... Ce magnifique et si doux éclat...

La valse se termine lentement et déjà les dernières notes meurent dans l'air. Mais Isabelle refuse de les entendre... Dieu lui en est témoin, jamais encore elle n'a autant eut le désir d'arrêter le temps que ce soir-là. Mais déjà Louis tourne plus doucement... Déjà il commence à baisser les bras pour la faire redescendre sur terre et elle resserre ses mains sur ses épaules. Déjà le son de son rire s'estompe dans la nuit. Le sourire de la comtesse se fige. Elle sent ce sol de marbre sous ses chaussures et en déteste le contact. En quelques secondes, elle est montée au ciel... En quelques secondes, elle est redescendue.

Le roi ne détache pas son emprise pour autant, gardant les mains autour de sa taille, acceptant ses bras qu'elle lui a timidement enroulé autour du cou. Il garde son regard d'acier ancré dans ses orbes claires, mais la magie est terminée... Et Isabelle... Elle reste muette, stupéfaite... émue bien plus qu'elle ne saurait le dire lorsqu'il lui sourit à nouveau. Il remarque son trouble et se penche à son oreille.

- Qu'y a-t-il ?

Émue, troublée, elle lui murmure le souffle court :

- Cet éclat dans vos yeux...

Dans un geste totalement spontanée, elle lui caresse tendrement le visage. Dans un même geste, il accentue la contact lorsqu'il lui prend la main dans la sienne pour la porter à ses lèvres...

Tout devient clair dans l'esprit de la comtesse... Une seconde, juste une seule et incroyable seconde de complète lucidité. Comment l'expliquer ? Cette sensation extraordinaire d'être transpercée de part en part par l'Univers... C'est comme si, durant une seconde, juste une magnifique seconde, le monde n'a aucun secret. Le chemin se dessine de lui-même. Il n'y a pas de question, pas de réponse... Tout est tellement évident. Puis la seconde passe, la magie s'efface et le noir revient en même temps que les questionnements.

Isabelle comprend enfin la question de Louis-Auguste qui hantait son subconscient : « L'aimes-tu ? »

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« L'aimes-tu ? ». Toujours cette même question qui subsiste depuis plusieurs chapitres déjà, même si ce n'était qu'implicitement. Et dire qu'Isabelle, pendant une seconde, venait tout juste d'avoir la réponse. Il y a de quoi frustrer, n'est-ce pas ?

Cette danse à l'abri des regards a néanmoins marqué un rapprochement significatif après deux mois à se côtoyer pour nos protagonistes.

Je vous dis à tout de suite, car sans attendre mardi prochain, je poste le chapitre suivant. Car celui-ci ne va pas sans le prochain.

La Comtesse du LysDove le storie prendono vita. Scoprilo ora