Elle en est de plus en plus charmée. Pourtant, elle n'est pas certaine de ce qu'elle ressent pour lui. Depuis un moment déjà, elle perçoit qu'une nouvelle émotion a fleurie en son for intérieur. Une émotion qu'elle ne saurait décrire. Mais ce n'est point désagréable. C'est même très doux et... désirable ?

Mais passons. Pour l'heure, elle salue son souverain avec la politesse qui lui est due. Ce dernier demande à ses petits angelots de partir, se retrouvant seul avec elle. Une proposition d'aller se promener dans le jardin à l'air libre qu'Isabelle accepte avec grand plaisir et voici qu'ils se retrouvent assis sur un banc en pierres, sous un arbre en fleurs.

- Madame, je suis heureux de vous voir pleine de vie. Vous semblez définitivement en paix avec les tragédies qui vous ont frappé autrefois.

Elle lui adresse un sourire qui le fait chavirer.

- Grâce à vous, Majesté. Je ne saurai comment vous remercier de m'avoir choisie pour être la gardienne de vos enfants. Louis-Auguste, Louis-César, Louise Françoise, Louise Marie Anne... Leur pureté est un cadeau du ciel. Ils sont le souffle de Dieu... Dieu que je gratifie également pour avoir croisé nos destins.

- Si seulement vous saviez à quel point je remercie le Seigneur pour vous avoir fait apparaître devant mes yeux... Mais je ne suis point le seul, remerciez également François de Hautecourt. Sans lui, je n'aurai point découvert la femme parfaite.

Court moment de silence. Qu'y a-t-il à dire de toute manière ? Simplement des sourires et une main serrant doucement une autre. Le roi se redresse finalement, entraînant la comtesse avec lui dans une marche tranquille, sereine. Il tourne subséquemment la tête vers sa compagne.

- Il y a une chose que je tenais à vous dire. La reine, mon épouse, organise un bal à la cour dans quatre jours. J'aimerai beaucoup que vous y assistiez.

- Vous savez, Sire, que je ne suis guère chalande de ce genre d'évènement. De plus, qui s'occupera des enfants ?

- Allons, ne me refusez point cela. Votre frère et votre amie Mademoiselle de Beaulieu y seront.

- Vraiment ?

- Oui. Et je suis convaincu qu'ils seront bienheureux de vous revoir après tant de temps.

- Soit, dans ce cas, je viendrai.

- J'ai fait spécialement préparer une robe pour vous. Considérez cela comme un gage de ma gratitude et de mon affection envers vous.

Isabelle découvre effectivement une robe sur le lit de sa chambre peu après avoir terminé la leçon des enfants pour aujourd'hui. Le moins qu'on puisse dire est que cet atour est absolument... Splendide. Elle serait presque tentée de le comparer à un habit digne d'une reine de France.

La robe à jupe double est entièrement d'un rose extrêmement clair, presque blanc. Ourlée de volants sur les manches et les bordures, des broderies d'or et d'argent à motifs floraux viennent décorer ça et là le vêtement. Une parure de diamants sertie d'opales complète l'ensemble.

Grand Dieu ! Le roi a réellement dû dépenser une somme colossale pour lui procurer ce cadeau, si somptueux que Madame de Langlois est positive sur le fait que tout monde à la soirée va la remarquer. Qu'a donc en tête son souverain ? Il ne compte tout de même pas la parader devant toute la cour comme il l'a fait avec la marquise ? Parce que de cela aussi, elle en est sûre, cette femme sera invitée. Et elle ne sera certainement pas en joie de déceler qu'elle commence lentement à ne plus exercer son influence sur son amant et de perdre son pouvoir petit à petit.

Non, ne nous voilons point la face. Madame de Montespan a commencé à perdre les faveurs du roi depuis le jour où il a posé les yeux sur la comtesse de Vauboyen, déclenchant chez lui sans qu'elle ne s'en rende compte ni même le veuille un amour qui rend la vue aux aveugles. Un amour plus fort que la manipulation de quiconque. Un amour qui insuffle du sens à la vie, qui résiste aux lois naturelles de l'usure, qui épanouit, qui ne connaît aucune limite. Le triomphe de l'esprit sur l'égoïsme.

La comtesse ne peut point non plus nier que sa rencontre avec le roi et le temps passé avec lui n'ont pas seulement guéris son cœur déchiré par la dépression provoquée par la mort de son bien-aimé Charles. Ils lui ont plus que tout ouvert l'esprit. À l'instant où elle a cru mourir à petit feu, dévastée comme elle l'était, elle a comprit qu'elle n'était en fait qu'aux prémices de sa vie...

- Isabelle ?

L'interpellée sursaute au son de la voix de Louis-Auguste, lequel est entrée sans qu'elle ne l'entende. Elle le soulève dans ses bras sitôt qu'il est arrivé jusqu'à elle.

- Que fais-tu là, mon ange ?

- C'est bientôt l'heure de dîner, je suis venu te chercher.

- Déjà ? Ciel ! Je n'ai point vu le temps passer.

Le duc du Maine désigne du doigt la robe étalée sur le lit.

- Père t'as fait un très beau cadeau.

- Certes. Pour me témoigner sa reconnaissance et son abnégation.

- L'aimes-tu ?

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Notes de fin de chapitre :

1*: « Complainte à sa dame », Théodore Agrippa d'Aubigné

Isabelle est guérie, enfin ! Comme nous pouvons le constater néanmoins, ce sont des émotions d'un tout autre ordre qui l'envahissent désormais, et bien qu'elle soit encore indécise sur sa relation avec Louis, ce dernier a fait un pas en avant.

Le jeu du pouvoir et de l'amour continu. La suite au prochain chapitre vendredi !

La Comtesse du LysWhere stories live. Discover now