Chapitre 15.III

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– 𝓒ombien de coups tu as pris, déjà ? questionna Nylo.

– Trois, répondit Velam. Ça fait mal.

La guérisseuse marmonna quelque chose qui ressemblait fort à « si je vois passer Zym, il va entendre parler de moi ! » tandis qu'elle appliquait une pommade à la drôle d'odeur sur ses blessures.

– Hum, tu m'étonnes ! fit-elle avant d'interpeler sa nièce : Exily ! Rapporte-moi deux feuilles de coq-de-plaines, s'il te plaît !

La petit fey, assez discrète, se précipita vers une armoire empli de flacons. Pendant quelques instants, elle chercha, avant d'en prendre un. Elle s'apprêtait à le donner à sa tante, lorsqu'Abeille lui retira des mains, et haussa un sourcil en en voyant le contenu.

– Si tu donnes ça pour faire un cataplasme, tu peux être sûre que Velam va sauter au plafond, affirma-t-elle.

Nylo et elle-même étant tombées d'accord sur la fait que sa blessure à la joue n'était pas bien grave, la guérisseuse lui avait juste donné un sac de glaçons – c'était pratique, d'avoir une bande de capricornes juste sous la main – dans un chiffon, à appliquer doucement. Si bien qu'Abeille tenait d'une main ce sac lorsqu'elle replaça le flacon à sa place, avant de s'emparer d'un autre.

– Tiens, fit-elle en le tendant à Exily. Ça, c'est bien du coq-de-plaines. Et fais attention : les feuilles de cette plante ressemblent beaucoup à celles d'embrummes. Or ces dernières sont surtout employées pour l'extraction de substances étrangères au corps.

– Au moins, y en a une qui retient mes leçons, marmonna Nylo, ses cheveux violets s'agitant dans tous les sens lorsqu'elle secoua la tête, en jetant un regard agacé à sa nièce. Téo, ma filiotte, si tu savais à quel point ton sale caractère me manque !

– Je sais, vieille étoile : je suis quelqu'un d'exceptionnel. Mais tu sais, c'est avec du temps qu'on retient le nom de toutes tes herbes. Laisse-lui un peu de temps, répondit Abeille en faisant un mouvement du menton vers Exily, qui s'était retirée dans un coin après avoir donné ses feuilles.

Velam observa la petite fey aux cheveux orange, pendant que les deux femmes poursuivaient leur discussion. Il l'avait déjà remarqué lorsqu'il était venu avec sa Mentor personnelle, Tigresse, pour faire des espèces de tests. Elle semblait tout observer avec de grands yeux, comme si elle n'avait jamais rien vu de pareil.

Il avait vite compris qu'elle venait tout juste d'arriver à Opaltys, comme lui. Et, étant elwissienne (d'après son accent), il se doutait que la cité devait lui paraître bien étrange par rapport à l'Elwiss. Avant Nylo et Exily, Velam n'avait jamais vu de feys. Pourtant, à part leurs oreilles en pointe, et leurs yeux et cheveux colorés, il trouvait qu'elles n'étaient pas si différentes d'eux.

  Il n'avait jamais vraiment parlé avec Exily. Il aurait bien aimé, mais elle était souvent en train de se faire remonter les bretelles par sa tante. Velam ne connaissait pas très bien Nylo, mais il ne l'appréciait pas vraiment. Toutefois, il voyait bien qu'Abeille s'entendait très bien avec elle, à la façon affectueuse dont elles échangeaient – visiblement, elle aurait aussi été un peu l'apprentie de la guérisseuse, car elle avait plusieurs connaissances dans l'art des plantes. Donc Nylo ne devait pas être aussi méchante qu'elle le paraissait.

Velam se rendit compte qu'Exily le dévisageait aussi, tandis que sa tante appliquait une feuille de coq-de-plaines contre ses blessures. Elle lui offrit un sourire timide, et il lui rendit. Il n'était pas très bavard, néanmoins, il aurait voulu apprendre à la connaître.

Tout ce qu'il savait, c'était qu'ils avaient à peu près le même âge, même si les feys ne vieillissaient pas de la même façon que les membres du cercle supérieur.

Mais il était intrigué par Exily. Il sentait que, si c'était possible, ils pourraient bien s'entendre. Elle semblait tout aussi réservée que lui, et ne parler que très peu, seulement quand cela lui semblait utile. Il aimait bien son calme, même si elle était forcée de courir à droite et à gauche pour rapporter à Nylo ses herbes. Et puis, il trouvait que ses cheveux courts, différents des astrilaises, lui allaient bien. C'était bizarre, mais original. Peut-être que c'était à la mode, en Elwiss.

  – Bon, je pense que ça devrait aller, déclara la guérisseuse en retirant les feuilles de ses blessures. Tu vas certainement avoir un œil au beurre noir, et ton visage risque d'être douloureux pendant encore quelques jours. Au pire, je crois que Téo a quelques flacons de rivvera. Je me trompe ?

  – Non ; il m'en reste cinq. Si la douleur est trop insupportable, Velam, n'hésite pas à venir me voir. Je te donnerai un calmant. Enfin, merci Nylo ; nous allons peut-être y aller.

Abeille se décolla du mur où elle s'était adossée, avant d'enlever le sac de sa joue. Velam était peut-être amoché, il ne pouvait s'empêcher de s'en vouloir en constatant que c'était à cause de lui qu'elle s'était blessée. Bien sûr, elle lui avait dit qu'il n'y était pour rien, car elle avait fait exprès de provoquer Lièvre, et qu'elle avait déjà eu des blessures plus douloureuses. Mais tout de même.

– Tu es encore punie ? demanda Nylo.

– Eh étoile. Quand je te dis qu'Arysia me hait de tout son cœur, ce n'est pas un euphémisme.

– D'accord, je vois. Et fais aussi attention à ta joue ; je te connais, tu es maladroite, pas la peine d'empirer ton état !

– Sois sans crainte. Encore merci pour tes soins. Allez, tu viens Velam ? Il ne faudrait pas que nous tardions.

Velam se leva de son tabouret. Il remercia tout bas Nylo et Exily (elle lui sourit de nouveau, d'ailleurs), avant de suivre Abeille. Ils sortirent du laboratoire, et tandis qu'elle le faisait passer devant lui après avoir ouvert la Porte des Secrets, il hésita à solliciter une faveur.

– Bon, qu'est-ce que tu veux me demander ? finit-elle par le questionner.

Pour la deuxième fois déjà, elle avait devinait qu'il avait quelque chose à demander. Elle était du genre à faire attention aux autres. Velam aimait bien Abeille, même si contrairement à lui, elle bougeait tout le temps, et elle parlait un peu comme une bourgeuse.

– Dis, j'aimerai bien apprendre à connaître Exily, fit-il à voix basse (une habitude chez lui). Tu penses que ça serait possible que je la revois ?

– Tu es au courant que tu n'es pas censé quitter notre aile à part si ta Mentor personnelle t'emmène quelque par avec elle ou à part si tu as une punition aux écuries ?

– Étoile, mais peut-être qu'il... existe un autre moyen ?

Il voulait vraiment revoir Exily. Il en ressentait le besoin. C'était étrange. Peut-être était-ce parce qu'elle lui ressemblait, ou peut-être était-ce tout simplement parce qu'il avait besoin d'une compagne plus calme que ses camarades ? Abeille soupira derrière lui, repassa devant lui.

– Bon. Est-ce que tu es bien allé en cours avec Tigresse ce matin ?

– Euh, étoile ?

Il ne voyait pas le rapport.

– Bien. Alors suis-moi. Je t'ai promis de te faire découvrir une nouvelle cachette à chaque fois que tu irais. Je vais te montrer quelque chose, un moyen de la retrouver, mais tu n'as pas intérêt à en parler à quelqu'un – sinon, tu peux être sûr que ce moyen de communication sera fermé. Sissi ? fit-elle en lui jetant un coup d'œil par dessus son épaule.

– Étoile. Merci, Abeille !
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Publié le 22/10/2022

L'Astriale - Les Mensonges du Printemps T2 [TERMINÉ]Where stories live. Discover now