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La fin de la semaine arriva vite.

Et en me levant ce samedi matin, je réalisais que cela fera bientôt une semaine que j'étais "morte".

Je n'avais pas revu Adrien depuis la dernière fois, à l'université.
Avec les cours du lycée, je ne trouvais pas le temps de passer sur son lieu de travail. Et puisque qu'il travaillait le matin, impossible de l'attraper après le lycée.

J'évitais aussi le plus possible la famille de Manaël.
Rentrant tard pour ne pas croiser le père de famille qui rentrait du travail à la même heure que Manaël, et surtout, passant par la fenêtre de la chambre.

Tant que j'étais de retour avant dix-neuf heures pour faire acte de présence au "dîner familial", personne ne se souciait de savoir si j'étais vraiment dans ma chambre, puisque personne ne prenait la peine de vérifier.

Mon absence à table, quand je traînais au bar, mardi soir, était ce qui m'avait valu d'être enfermée dans le cellier après une bonne rouste.

Le père de Manaël n'avait d'ailleurs fait aucun commentaire sur ma sortie prématurée du cellier, où il m'avait attaché et d'où je m'étais enfuie avec facilité. Pas plus qu'il ne demanda comment j'avais bien pu me défaire de mes liens.
Mais je doutais qu'il se rappelle m'y avoir enfermé au premier abord, ou même pour quelle raison.
Ce jour-là, il m'avait semblé assez torché pour en oublier son propre nom.

Et Manaël devait lui servir de défouloir pendant ses beuveries.

La douche froide endormie rapidement mon nouveau petit compagnon ; me laissant librement manier le gant de toilette.
J'avais dû rapidement m'habituer à me laver. Ne serait-ce qu'à travers le gant de toilette.

Hors de question d'oser courtiser mon futur mari dans un corps malpropre.


    Il n'était pas difficile de mettre la main sur des vêtements noir dans la garde-robe d'un adolescent.

J'enfilais un hoodie noir, dont je remontais la capuche sur mon crâne, de façon à dissimuler mon visage.
Je ne pris pas le bomber fluo. Trop voyant. J'étais presque sûr que Manaël devait être le seul du pays à posséder une telle horreur vestimentaire.

Une fois prête, tout de noir vêtu, je quittais la chambre en passant comme d'habitude par la fenêtre.

Évidemment, sans pull, le froid mordant fût la première chose à m'accueillir dehors. Me faisant instantanément claquer des dents.

Puis ce fût au tour du chien des voisins de m'accueillir : langue dehors, sa queue s'agitant frénétiquement, il avait passé ses pattes avant sur la petite clôture de bois et d'arbustes qui délimitait les deux maisons, et attendait avec impatience sa friandise.

Comme il aboyait chaque fois que je passais par la fenêtre, j'avais craint qu'il n'alerte un jour les voisins, ou pire, "mon" père.
Je l'amadouais donc à l'aide de restes de repas ou tranches de jambon, que j'arrivais à chiper à la cuisine.

Aujourd'hui je lui refilais, par-dessus la clôture, trois frites du repas d'hier, qu'il goba en un coup de langue. Me léchant tout le bras au passage.

– Bon chien, je chuchotais en lui grattant les babines.

Et mon nouveau complice agita la queue de contentement.

*

Plus tard, je me retrouvais devant une église, à me mêler à la foule compacte qui avait envahi les lieux.


Aujourd'hui avait lieu mon enterrement.

Cʀᴇ́ᴇ́ᴇ ᴘᴏᴜʀ ᴛᴏɪ [MxM]Where stories live. Discover now