PART 1 / chapitre 1 : Maggi

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Un quart d’heure plus tard, elle sortit enfin de la lisière de la forêt et se retrouva dans le village de Lasdren, qui était son village natal. Comme elle s’y attendait, Maggi l’attendait d’un pied ferme devant la porte de son auberge, le visage légèrement empourprée.

- Tu en as mis du temps ! 

- Désolé, je me suis égarée du sentier, répondit Elanor.

- Tu te fiches de moi ? Tu te perds souvent ces temps-ci, ne me raconterait pas tu des sottises ?

Elanor ouvrit la bouche et ne sut quoi répondre. Maggi, sachant pertinemment qu’elle n’avait pas d’excuse soupira, et lui ordonna d’entrer.

- Entres ! Toi et tes arbres. Si tu n’avais pas été humaine j’aurais pu te confondre avec un de ces satanés elfes de l’ancien âge.

Elanor lui tendit le sac, et Maggi s’en empara vivement. Elle regarda son contenu, puis ne trouvant rien à dire passa la porte de l’auberge, lui tournant le dos. Elanor entra à sa suite, et Maggi lui lança ses directives.  

-Va laver les tables, et ensuite prépares les tonneaux. Dépêches-toi, nos premiers clients vont bientôt arriver.

Elanor s’exécuta, contente s’échapper à une nouvelle dispute. C’était quelque chose qui était devenu commun depuis un moment déjà. Maggi était sa mère adoptive, elle l’avait recueilli quand elle n’avait que neuf mois, et la gardait depuis avec elle à son auberge du Cheval Blanc. Elanor était orpheline, et elle n’avait que de vagues souvenirs de sa vraie mère avant sa mort. Elle ne connaissait que son nom : Rain. Celle-ci avait louée une chambre chez Maggi, juste avant de se faire emporter par la maladie lors d’un hiver très vigoureux. Par pitié, ou par la force des choses, Maggi l’avait gardée faute de pouvoir la donner à l’un de ses clients. Elanor ne doutait pas qu’elle avait dut essayer sans succès.

Elle ne lui en voulait pas. Elle comprenait qu’un enfant à charge était un fardeau en plus pour elle, car elle avait à cette époque-là trois autres bouches à nourrir. Et sa famille n’était pas très riche. Son mari était batelier et faisait traverser les marchandises sur le Brandevin de Bree jusqu’à la côte. Il gérait autrefois l’échoppe avec sa femme, mais depuis quelques années, les clients s’étaient faits plus rares. Le besoin en argent était devenu un problème à résoudre, et Nedd avait dut laisser la gestion de l’auberge à sa femme pour partir sur les fleuves, travailler comme marchant.

Cela remontait à il y a cinq ans, et depuis, Maggi n’avait cessé de déverser toute sa frustration sur Elanor. Les enfants de Maggi, Hadrim, Uriel et Hadred étaient tous les trois partis de la maison. Uriel s’était mariée à un commerçant du village, elle travaillait de temps à autre à l’auberge, donnant un coup de main à sa mère. Les deux garçons étaient partis plus au Sud, près du flot gris. Elanor avait entendu dire que l’un avait fondé une ferme et que l’autre suivait les pas de son père comme batelier. Maggi n’en parlait pas beaucoup, mais elle n’était pas heureuse du choix de ses fils. Elles les voyaient très peu, et aucun d’eux n’avaient encore trouvé d’épouse.

Elanor trouvait que Maggie était parfois trop possessive, car il lui arrivait d’avoir des crises d’hystérie lorsque ses fils repartaient vers le Sud. C’était les moments où elle était la plus désagréable avec Elanor. Peut-être qu’elle aussi comprendrait ce sentiment, le jour où elle serait mère. Ca ne donnait cependant pas l’envie à Elanor de l’être.

Maggi ne cessait de la presser de se marier, la jugeant trop jolie et trop âgée du haut de ses vingt ans pour rester enfermée dans une taverne avec des hommes souls et des rodeurs du Nord. Mais Elanor s’accommodait à cette vie et aimait bien écouter les histoires de ces voyageurs, qui se révélaient parfois passionnantes. Par ailleurs, elle ne se sentait pas prête pour se marier, ni avoir la maturité suffisante pour fonder une famille.

Elanor en frissonnait rien que d’y penser. Maggi avait mis ça sur le compte de son caractère rêveur et aventurier, disant qu’elle aimait trop les contes de fée et qu’elle n’avait pas assez le pied dans la réalité. 

Peut-être était-ce vrai.

L'envoyée des Valar - livre I (LOTR /Seigneur des Anneaux)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant