La Guerrière blanche

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Un battement, un souffle, un murmure, la rosée du matin se déposait sur moi. L'herbe fraîche me chatouillait le cou. Les oiseaux commençaient à chanter devant les premières lueurs du soleil.

J'avais fui après cette soirée trop forte en émotion. Je ne dormais plus la nuit. Éléonore m'avait supplié à chaude larmes, Oréna avait hurlé de colère, quand je leur fis part de ma décision.

Étais-je folle ou tout simplement suicidaire ? Ou cela était-il mon destin de mourir sur un champ de bataille ? Je ne savais dire.

Mes amies pensaient que j'avais totalement perdu la raison. Que je prenais trop à cœur mon personnage jusqu'à me mettre en danger.

Mais que devais-je faire ? Tout lui avouer ? Cela n'était-il pas un risque ? Rien ne l'obligerait à m'accepter après de tels mensonges. Il pourrait me faire pendre ou bien me faire couper la tête. Sa nouvelle femme prendrait un malin plaisir à me regarder mourir sous l'arme du bourreau.

Donc me voilà devenu un pantin de la guerre, une âme livrée pour assouvir les ambitions d'un roi qui laisserait son nom dans l'histoire.

Pour moi la guerre était quelque chose d'abstrait, un mot utilisé aux informations ou dans les livres de cours. Jamais, je n'aurais pensé participer à cette barbarie.

Cela faisait maintenant plusieurs jours que nous marchions en direction du point de rassemblement indiqué par le roi. Je ne pouvais retirer de ma mémoire le triste regard que m'avait envoyé Éléonore en partant. Henry quant à lui, ne pouvait s'empêcher de me jeter des coups d'œil tout le long du trajet. Mon visage devait trahir mon inquiétude.

Cette pause me permettait de calmer mes angoisses. Soudain, une personne s'allongea à côté de moi, brisant ma solitude. Il ne parlait pas, écoutant les yeux fermés, la nature environnante.

«  Encore en train de me suivre ? Commençais-je
- Ton humour ne te lâche jamais, dit-il. »

Un léger silence s'imposa.

« J'ai peur, dis-je brusquement.

- Cela est tout à fait normal, me répondit Charles.

- J'aurais pensé que tu me traiterais de peureux.

- Tu penses peut-être que je suis froid, mais je ne suis pas sans appréhension. C'est une réaction humaine.

- Tu es d'accord avec les raisons de cette guerre ? Lui demandai-je.

- Je n'ai pas vraiment mon mot à dire, j'ai juré fidélité à Henry quoi qu'il advienne. »

Est-ce cela l'avenir des hommes de cette époque, mourir par fierté ?

Les derniers jours de marche étaient longs et angoissants, plus les heures passaient, plus le jour J se rapprochait. Les hommes autour de moi me semblaient impatients d'affronter leurs ennemis.

Moi je n'avais qu'une envie, partir, courir à toutes jambes dans la forêt sans me retourner.

Arrivée au point de ralliement, les hommes installèrent le campement. Certains retrouvaient et enlaçaient des vieux amis de batailles. Henry et Charles étaient convoqués dans la tente du roi pour parler stratégie.

Je m'asseyais par terre, écoutant les récits des anciens combattants.

«  J'ai déjà combattu contre des Écossais, ils sont redoutables et sanguinaires. Rien ne les arrête, raconta un vieil homme barbu.

- Il paraît que l'armée du Roi Richard II est constituée des Highlanders les plus féroces. »

Je ne pouvais en écouter davantage. L'anxiété s'emparait de moi, je regardais mes mains trembler de peur, j'avais envie de hurler, de crier. Je voyais les hommes aiguiser leurs épées, leurs haches, préparer leurs fusils pour mieux tuer leurs adversaires.

Le miroir d'un autre mondeWhere stories live. Discover now