En proie à l'agacement, il faisait les cent pas dans la pièce. Ce genre d'énervement ne lui ressemblait pas et cela l'irritait encore plus. Il savait ce qu'il avait à faire. Seulement... La voie pour y parvenir ne lui plaisait pas. Sasuke avait passé la nuit à ressasser. Il n'était pas suffisamment puissant. Son échec en témoignait. Quand il était parti capturer le Jinchuriki de Hachibi, il était encore affaibli suite à son combat contre Itachi. Mais cela n'excusait pas tout. Depuis lors, il était devenu faible. S'il l'avait voulu, Kisame l'aurait terrassé sans la moindre difficulté. Et apprendre ensuite qu'il avait échoué dans la capture de Killer Bee, n'avait fait que lui démontrer à quel point il était faible. Le Jinchuriki lui avait laissé croire que la Team Taka l'avait vaincu. Il avait appliqué une technique sur le tentacule que Sasuke avait sectionné durant le combat, afin qu'elle prenne son apparence. Et c'était ce stupide tentacule que Sasuke avait finalement rapporté. Une chance que Madara ne s'en soit rendu compte qu'au moment de l'extraction du Bijû. Dans le cas contraire, Sakura serait certainement toujours en train de mourir à petit feu dans sa cellule.
C'était ce dernier facteur qui lui faisait tout reconsidérer. Dans son état actuel, avec ses yeux abîmés, Sasuke n'était pas en état de s'opposer à un puissant adversaire. Il se doutait que tous les membres de l'Akatsuki étaient de redoutables combattants, chacun avec des spécificités qui lui étaient propres. Le moment venu – car il ne doutait plus que cela arriverait – il ne serait probablement pas en mesure de leur tenir tête. Il ignorait tout des capacités de Madara mais sa réputation le précédait. S'il était bien qui il prétendait être, on ne vivait pas aussi longtemps sans raison. Et pour être à la tête d'une organisation aussi redoutable que l'Akatsuki, il fallait être mesure de maintenir les différents membres dans le rang. L'homme au masque disposait très certainement d'une puissance inouïe.
Sasuke devait donc parer à tout éventualité. Et pour cela, il avait besoin de davantage de puissance. Une solution toute désignée lui tendait les bras. Mais cela impliquait d'y mêler Sakura une fois de plus.
Ne sachant que faire, ou plutôt, n'ayant pas le cran de décider ce qui serait pour le mieux, il fit claquer sa langue d'agacement.
*
- J'ai pris ma décision, annonça-t-il en pénétrant dans la cellule. Je veux que tu me greffes les yeux d'Itachi.
Sakura resta silencieuse quelques instants pour l'étudier du regard. Depuis la veille, elle s'était attendue à des représailles de la part de l'Akatsuki pour ce qu'elle avait fait. Elle s'était préparée à vendre chèrement sa peau. Mais personne n'était venu. Sasuke était le premier à entrer dans sa cellule depuis que la porte avait été refermée.
- Qu'est-ce qui t'as fait changer d'avis ? demanda-t-elle.
Il ne répondit pas immédiatement. Il préféra s'emparer de la chaise en fer pour s'asseoir dessus à califourchon. Se doutant que la conversation qui allait s'engager risquait de prendre un certain temps, Sakura l'imita en s'asseyant sur sa banquette. Elle soutint son regard en s'efforçant d'adopter une attitude de neutralité.
- Mes yeux sont trop abîmés.
- Ça a quelque chose à voir avec Madara ? devina-t-elle méfiante. Avec ce qu'il t'as dit hier ?
- Je ne suis pas suffisamment puissant.
- Pour ta vengeance ?
Il ne répondit pas.
- Qu'est-ce qu'il t'as dit exactement ? insista-t-elle en plissant les yeux.
- J'ai échoué.
- Échoué, reprit-elle sans comprendre.
- Ça va sûrement te réjouir... Hachibi est toujours dans la nature.
Elle fronça les sourcils sans comprendre.
- Il a usé d'un subterfuge. L'hôte que j'ai ramené ici n'était que l'une de ses tentacules qui avait pris son apparence. Et je ne me suis rendu compte de rien. J'ai bêtement pensé avoir vaincu un Jinchuriki.
Sakura ne put réprimer un soupir de soulagement. Elle se sentait brusquement libérée d'un étau qui l'asphyxiait. Finalement, Sasuke n'avait pas mené à son terme son acte criminel. Killer Bee était toujours quelque part en cavale, loin de l'Akatsuki. Quant à elle, qui avait servi de monnaie d'échange, désormais, elle ne portait plus le poids de sa vie sur les épaules.
- Les Jinchuriki sont très puissants..., commença-t-elle.
- Il n'y a pas que cela, la coupa-t-il d'un ton brusque. Hier, face à Kisame, je n'aurais rien pu faire. Je me revois il y a quatre ans pendant l'examen Chuunin, dans la forêt de la mort et face à cet adversaire si terrifiant que j'étais incapable du moindre geste.
- Ne mélange pas tout, intervint-elle. Cet adversaire, c'était Orochimaru. Il n'avait rien à faire ici. Nous étions des novices. On aurait dû avoir à affronter uniquement d'autres Genin de notre niveau. Je me rappelle encore de la terreur que j'ai ressentie aussi face à son aura.
- Dans mon état actuel, je ne suis pas en mesure de faire quoi que ce soit. Je fais office de bouclier entre l'Akatsuki et toi, mais seulement en apparence.
Ce qu'elle lut alors dans son regard d'ordinaire si imperméable abaissa instantanément toutes les barrières qu'elle s'efforçait quotidiennement d'ériger afin de protéger son cœur et sa raison. Elle se leva pour le rejoindre et saisit son visage entre ses mains, avec douceur. Il ne se déroba pas.
- Tu n'es pas faible, Sasuke, murmura-t-elle en s'abaissant à son niveau pour rencontrer son regard. Seul un fou penserait cela. Tu as vaincu Orochimaru. Tu as eu suffisamment de force mentale pour l'empêcher de s'emparer de ton esprit. Tu te reposes simplement trop sur tes yeux. Tu as bien d'autres capacités que le Sharingan.
Lentement, il posa ses mains sur celles de Sakura. Il les écarta de son visage mais les garda entre les siennes tandis qu'il se relevait et qu'elle l'imitait. Il la détailla du regard quelques instants. En proie à mille émotions, elle plongea dans ses yeux onyx. À son tour, Sasuke effleura la joue violacée de la jeune femme.
- Je n'ai pas pu empêcher ça, dit-il alors. Qu'est-ce que ce sera la prochaine fois ? Jusqu'où ça ira ? Tu aurais dû t'enfuir quand je te l'ai demandé.
- Je reste avec toi, je te l'ai déjà dit, répondit-elle avec aplomb. J'ai fait une promesse à Itachi et je la tiendrai. Pour ça, je supporte de rester en ces lieux sans broncher. J'accepte de rester enfermée puisque visiblement mes actes se répercutent directement sur toi. Mais, si le moment venu, je dois affronter l'Akatsuki, je le ferai. Je te l'ai déjà dit, je vendrai chèrement ma peau. Et j'espère qu'à ce moment-là, tu te tiendras à mes côtés. Peut-être que seuls, nous n'avons aucune chance mais en unissant nos forces, on pourrait les mettre en difficultés. Surtout si ton équipe t'est loyale.
- L'attachement que tu me portes, je ne le mérite pas, soupira-t-il en s'écartant d'elle pour se détourner. Le feras-tu ? demanda-t-il alors en adoptant un ton plus neutre.
- Je procéderai à l'opération, répondit-elle d'un ton grave après quelques instants. C'était la volonté d'Itachi. Laisse-moi la journée pour me préparer. C'est une manipulation complexe. Je ne l'ai encore jamais réalisée mais j'en ai les capacités. Je dois aussi pouvoir me déplacer librement. J'ai un paquet de préparations à faire en amont.
- Madara a posé une condition. Karin t'escortera.
- Et m'espionnera, corrigea-t-elle en reniflant de mécontentement.
- Elle ne connaît pas grand-chose à la médecine mais elle sera là pour veiller à ce que tu fasses strictement ce que tu es censée faire.
- Il veut s'assurer que je ne fasse rien qui aille à son encontre.
- Hn.
*
Sakura s'arrêta dans l'encadrement de la porte. Rien n'avait changé. L'atmosphère était la même que lorsqu'elle était venue la dernière fois. Kisame avait dû annuler sa technique après qu'elle ait préservé le corps d'Itachi grâce à sa pétrification temporelle. L'air était moins froid, moins humide. Pourtant, Sakura était glacée. Elle frissonna. Derrière elle, Karin respecta son silence et ne dit mot, attendant patiemment.
Sakura inspira profondément avant d'engager le premier pas. Itachi était toujours là, étendu sur la table de granit. Toujours aussi immobile que quatorze jours plus tôt. Il était tel qu'elle l'avait laissé la dernière fois. Cette fois encore, elle avait l'impression qu'il allait se réveiller à tout moment et croiser son regard. Il semblait dormir paisiblement. Pourtant, il n'en était rien.
Elle posa la main sur la sienne, glaciale, figée.
- Sasuke a enfin pris sa décision, Itachi, murmura-t-elle. Il verra désormais par tes yeux. J'espère que cela lui permettra de percevoir le monde tel que tu le voyais.
Elle se recula d'un pas. Et lorsqu'elle se redressa, Karin put voir que l'expression sur le visage de Sakura s'était subitement métamorphosée. Toute trace d'émotion avait disparu pour laisser place à un visage durci recouvert d'un masque d'impassibilité. Sakura était prête. Elle avait enfoui sa tristesse pour ne se focaliser que sur sa tâche. Tandis qu'elle nouait rapidement ses cheveux pour se dégager le visage, Karin s'avança vers elle.
- J'ai rassemblé tout ce que tu m'avais demandé. Tu as besoin d'autre chose ?
- Je te remercie Karin. J'ai tout ce qu'il me faut.
Durant l'heure qui suivit, Sakura s'organisa en vue de l'opération. Elle avait déjà refait mentalement à maintes reprises les gestes qu'elle devrait reproduire durant l'opération. Sur le plan théorique et technique elle était au point, mais pas sur le plan pratique. Elle prépara les différents récipients dont elle aurait besoin, les remplissant de telle ou telle solution aqueuse. Durant sa formation à Konoha et les nombreuses interventions qu'elle avait dues pratiquer par le passé, elle savait qu'une organisation rigoureuse était avant tout la clé de la réussite. Nulle place ne pouvait être laissée à l'imprévu. Karin la regardait faire en silence. Visiblement Sakura n'avait pas besoin d'assistance. Elle était méticuleuse.
- Au vu des conditions dans lesquelles nous nous trouvons, je ne peux pas faire mieux, soupira-t-elle enfin en jetant un regard circulaire à son environnement de travail. Cet endroit n'est pas stérilisé et les outils mis à ma disposition sont plus que douteux. Je m'en servirai le moins possible. Je vais faire confiance à mon scalpel de chakra. J'extrairai les yeux d'Itachi pendant l'opération. Les retirer avant pour les laisser reposer dans du liquide n'est pas la meilleure solution. Cela risquerait de les endommager.
- Tu sais ce que tu fais, n'est-ce pas ? demanda Karin avec inquiétude.
- Sasuke ne risque rien entre mes mains, assura-t-elle.
- J'ai confiance en toi, intervint une voix dans leur dos.
Sasuke se tenait dans l'encadrement de la porte à l'endroit exact où Sakura s'était stoppée un peu plus tôt, en proie à l'hésitation. Après quelques instants, il pénétra dans la pièce. La raideur dont il faisait preuve n'échappa pas à Sakura. Son regard était rivé sur elle et elle devina qu'il s'efforçait de ne pas poser les yeux sur la dépouille d'Itachi.
- Tu n'étais encore jamais venu, devina-t-elle en le rejoignant.
Le regard qu'il lui adressa fut une réponse suffisante.
- Prends quelques minutes, lui dit-elle d'une voix douce. C'est important.
Elle fit signe à Karin de la suivre et ensemble elles quittèrent la pièce pour le laisser seul.
- Tu sais que le fait de voir le corps de son frère risque de renforcer ses désirs de vengeance ? demanda Karin tandis qu'elle s'appuyait contre la rambarde de la plateforme. Et c'est probablement ce que l'Akatsuki espère.
Elles avaient rejoint la lumière du jour et l'air de la brise marine. Mais la chaleur restait toujours suffocante. Pourtant l'été touchait à sa fin. Sakura l'imita en soupirant.
- Je sais. Le pari est risqué. Itachi voulait faire don de ses yeux à Sasuke pour qu'il puisse se protéger mais cela va lui conférer une incroyable puissance. Le pire pourrait très bien se produire.
- Mais tu espères au fond le faire fléchir.
- Je m'y efforce en tout cas.
- Je crois bien que tu es la seule la seule personne capable d'y parvenir. Alors, ne baisse pas les bras. Depuis que je le connais, tu es la seule personne pour qui il ait jamais manifesté de l'intérêt. Tu n'en as pas l'impression, mais ton avis compte.
- Si tu le dis, répondit Sakura en esquissant un sourire amer.
- Je te laisse partir devant, déclara Karin après un moment. Je vous rejoins dans quelques minutes.
Lorsqu'elle le rejoignit, Sasuke se tenait immobile devant la dépouille de son frère. Elle ne voyait pas son visage car il se tenait dos à elle mais Sakura pouvait ressentir son profond désarroi. Son cœur fondit. D'un pas léger, elle le rejoignit et, sans hésiter, glissa sa main dans la sienne pour lui transmettre son soutien. Il ne bougea pas mais resserra sa main autour de la sienne. Par cette pression, il lui témoignait sa gratitude et partageait avec elle ses émotions qu'il ne dévoilait jamais. Sakura se sentit alors plus proche de lui qu'elle ne l'avait jamais été par le passé.
- Quoi que tu penses, Sasuke, n'oublies pas que c'est ce qu'Itachi voulait. Tu n'as pas à te sentir coupable pour ce que tu as fait. Itachi voulait mourir de ta main. Et il voulait que ses yeux te reviennent. Tu verras désormais le monde à travers les yeux de ton frère.
Il tourna vers elle un visage ravagé par le chagrin. Ses yeux demeuraient secs mais ils lui renvoyaient l'éclat d'une infinie douleur. Sakura oublia alors tout le reste. Tout ce qu'elle avait enduré récemment suite aux mauvaises décisions de Sasuke, toutes les divergences qui les opposaient, toute cette prudence qui la maintenait à distance. Sans hésiter ni se soucier de rien d'autre, elle l'étreignit dans ses bras.
- Tu as le droit d'être triste, lui souffla-t-elle. C'est un sentiment humain.
Il répondit lentement à son étreinte en remontant l'un de ses bras dans son dos pour la serrer contre lui. L'échange ne dura qu'un bref instant mais Sakura comprit alors ce que Karin avait voulu lui dire. Sasuke ne se serait laissé aller de la sorte avec personne d'autre qu'elle. Il ne lui disait rien ouvertement mais par ce simple geste, il partageait ses émotions avec elle. C'était sa façon à lui de lui ouvrir son cœur.
- Merci d'avoir préservé son corps, déclara-t-il en s'écartant d'elle.
Toute trace de chagrin avait déserté son visage lorsqu'elle croisa à nouveau son regard. Sasuke avait repris contenance et adopté à nouveau son habituelle attitude impassible et indéchiffrable. Mais désormais Sakura pouvait voir au-delà. Elle avait entre aperçu son cœur. Elle connaissait sa souffrance. Il s'efforçait de demeurer indifférent pour empêcher des vagues d'émotions de le submerger.
- Je vais devoir lever ma technique de pétrification temporelle pour extraire ses yeux, expliqua-t-elle. Que veux-tu faire de sa dépouille ? Tu ne pourras pas le garder ici éternellement.
- J'ai vu quels secrets pouvait encore livrer un cadavre. Je ne prendrai pas ce risque avec Itachi. Je ne permettrai pas qu'il soit profané et serve pour des expériences visant à s'approprier les capacités du clan Uchiha. Je brûlerai son corps.
Sakura acquiesça. C'était une décision qu'elle ne pouvait qu'approuver.
- Tu es prêt ? demanda-t-elle après quelques instants tandis que Karin les rejoignait.
En guise de réponse, il alla s'installer sur la table d'opération en inox que les deux jeunes femmes avaient préparée.
- Il est préférable que je t'endorme, Sasuke, expliqua Sakura en le rejoignant. Cette opération est très douloureuse. Et je dois m'assurer que tu ne bouges pas d'un millimètre pendant que je procéderai à la greffe. Quand tu reviendras à toi, tes yeux seront bandés. N'essaie pas de les ouvrir. Je te donnerai de quoi faire passer la douleur. Tu devras rester dans le noir le plus complet pendant les trois prochains jours. Ta vue ne sera pas immédiatement parfaite il faudra laisser à ton corps le temps de s'acclimater. Tu ne retrouveras pleinement l'usage et les facultés de ton Sharingan qu'après un certain temps. Je ne peux évaluer la durée étant donné que je n'ai aucun point de comparaison. Itachi étant ton frère, la greffe devrait prendre sans problème. Ta puissance sera décuplée et tu ne souffriras plus jamais des effets secondaires du Sharingan. Mais pour autant, utilise-le avec retenue.
- Je suis prêt, se contenta-t-il de répondre.
En un geste expert, elle posa sa main sur son front en faisant irradier son chakra. L'instant d'après, il était plongé dans l'inconscience. Après s'être assurée qu'il ne se réveillerait pas, Sakura plongea ses mains dans la solution aqueuse qu'elle avait préparée pour se désinfecter.
- Toi aussi, dit-elle en désignant un second récipient identique à Karin. Tu vas me seconder.
*
La tension dans la pièce était palpable. Debout face à la fenêtre, Tsunade pouvait voir au loin les nuages de poussière s'élever. Personne n'osait prononcer le moindre mot. Ça avait commencé. Konoha était attaqué. Une nouvelle explosion retentit, à l'Est cette fois-ci.
« Sakura avait vu juste, déclara Shikamaru presque avec regret.
- Notre situation n'est pas optimale, mais au moins nous avons pu nous y préparer même si le délai était court », approuva Kakashi.
La porte s'ouvrit à la volée et un Shinobi pénétra en trombe dans le bureau.
« Un intrus a infiltré Konoha par voie aérienne ! Nos capteurs n'ont détecté qu'une seule cible. Mais peu après la confirmation, plusieurs attaques ont été notifiées ! »
Toujours dos à eux, Tsunade ne bougea pas. L'instant d'après, un Anbu se matérialisait dans la pièce dans un « pop » sonore.
« Rapport de la section spéciale ! annonça-t-il. Nos estimations font état de trois groupes ! »
Le visage de Tsunade se durcit. « Un ennemi capable d'organiser une attaque de cette ampleur sans se faire remarquer... » pensa-t-elle.
« Un témoin affirme avoir vu un homme portant un manteau noir avec des nuages rouges », poursuivit l'Anbu.
« L'Akatsuki... Ils sont finalement venus, pensa Tsunade, Naruto... si tu es bien l'enfant de la prophétie... »
Katsuyu les avait prévenus moins de quarante-huit heures auparavant porteuse d'un message alarmant de Sakura. L'Akatsuki venait prendre Naruto. Si Tsunade était inquiète pour son élève qui semblait, elle aussi, aux prises avec l'Akatsuki, elle avait travaillé sans relâche depuis lors afin de tenter d'organiser les défenses du village. L'Akatsuki ne devait en aucun cas mettre la main sur l'hôte de Kyuubi. Elle avait dirigé ses unités d'une poigne de fer et n'avait pas pris la peine de s'accorder plus de quelques heures de repos. Le pire était à craindre. À présent, elle ne pouvait plus reculer. L'ennemi était à leurs portes. Il avait même déjà passé leurs défenses sans le moindre bruit. Elle était à la tête de Konoha. Chacun attendait ses ordres avec appréhension. Elle savait par avance que sa décision ferait naître le doute. Mais pas au sein de son auditoire. Ceux qui se trouvaient dans son bureau en ce moment-même partageaient son avis. Quant aux autres... elle ne leur demandait pas leur avis. Elle le connaissait d'avance.
Sa décision prise, l'Hokage fit volte-face, une détermination inébranlable gravée sur le visage.
« Proclamez l'état d'urgence maximal. Et... rappelez Naruto !
À l'étage inférieur, Danzô s'entretenait avec les deux vieux conseillers. Ces deux-là, il les avait toujours eu dans la poche. Si ça ne tenait qu'à eux, il y a bien longtemps qu'ils auraient détrôné Tsunade pour le mettre à la tête du village. Danzô savait comment les amener là où il le désirait.
« La cible de l'Akatsuki est sans nul doute... Kyuubi, commença-t-il.
- Cependant, l'Hokage veut, malgré le danger, ramener Naruto au village, ajouta la conseillère de sa voix sèche.
- En effet. Si on continue d'écouter le Godaíme, Konoha sera détruit », conclut Danzô.
*
L'homme aux cheveux roux, cet étrange individu nommé Pein, maintenait sa victime d'une poigne de fer, la main serrée autour de sa gorge. Son visage était parsemé percings, exactement comme ce cadavre que le Sannín Jiraiya avait envoyé à Konoha, au prix de sa vie quelques semaines plus tôt.
Pein jaugeait sa victime de son regard vide, dénué de la moindre émotion. Ce regard était terriblement dérangeant. Ces cercles concentriques qui recouvraient tout son globe oculaire, ces yeux blancs : le Rinnegán. Cette pupille n'était pas réapparue depuis des siècles. Le Rinnegán était le plus puissant des trois pouvoirs pupillaires existants. Il écrasait de loin les capacités du Sharingan et du Byakugan. Sa puissance était légendaire... et terrifiante.
« Uzumaki Naruto. Où est-il ? »
Trop occupé à suffoquer, l'homme ne lui répondit pas. Il ne répéta pas sa question. Comme s'il ne s'était agi que d'un vulgaire insecte, Pein resserra sa prise et lui broya la trachée. L'homme mourut sur le coup. Impassible, son bourreau le relâcha et le laissa retomber sur le sol dans un bruit mal. Le corps sans vie rejoignit les décombres.
À l'opposé du village, un autre homme aux cheveux roux le visage parsemé de ferraille et arborant lui aussi le Rinnegán, faisait face à deux nouvelles victimes. Il était grand, svelte. Ses longs cheveux retenus par une lanière de cuir retombaient dans son dos. Le manteau de l'Akatsuki qu'il arborait, s'agitait à chaque nouvelle explosion.
« Où est Kyuubi ? demanda-t-il de sa voix caverneuse, le visage inexpressif.
- Si tu penses qu'on va trahir un camarade...
- Soit. »
Le Shinobi n'avait pas eu le temps de finir sa phrase qu'une substance translucide sortit de sa bouche, telle une langue gigantesque qui s'étirait jusqu'a rejoindre la main de l'ennemi. L'homme était désormais incapable du moindre mouvement. Seuls les gémissements qui s'échappaient de ses lèvres témoignaient de la souffrance insoutenable qu'il ressentait.
« Qu'est-ce qu'il se passe ? Kenji ! » demanda son ami hébété, trop stupéfait pour réagir.
L'instant d'après, la substance se détacha du corps de Kenji pour disparaître dans l'apparition fantomatique qui venait de se matérialiser derrière l'ennemi. Le Shinobi s'affaissa sur le sol. Sans vie.
« Kenji ! Bordel, t'es qui toi ? demanda le second Shinobi désormais terrifié.
- Je suis Pein, et je suis venu t'enseigner la souffrance. »
Sa prochaine victime recula d'un pas et trébucha sur un gravât. Il tomba sur les fesses, incapable de quitter des yeux celui qui venait de tuer si facilement son ami.
« Je répète ma question. Où est Kyuubi ? »
*
C'était le chaos. Les bâtiments étaient ravagés, les blessés arrivaient en masse et l'unité médicale était débordée. Les Shinobi qui n'étaient pas blessés s'efforçaient de mettre la population à l'abri et transportaient les blessés. Les Shinobi médicaux ne savaient plus où donner de la tête. De nouvelles explosions retentirent, arrachant des hurlements de terreur aux civils.
Dehors, de gigantesques créatures ravageaient tout sur leur passage. Un taureau monstrueux, un corbeau aux griffes terrifiantes, un caméléon capable de tout raser d'un seul coup de langue. Sur la tête de ce dernier, une jeune fille aux cheveux roux et le visage parsemé, lui aussi, de piercings. Sans manifester la moindre émotion, elle rasait tout sur son passage.
*
« Laissez Naruto au Mont Myôboku », plaida la conseillère.
Tsunade soutint son regard avec agacement. Lorsqu'elle avait pris sa décision de faire revenir Naruto au village, elle savait par avance que ces deux vieux conseillers séniles allaient s'y opposer avec virulence. Ils ne réalisaient pas à quel point l'heure était grave. À quel point ils avaient besoin de Naruto. Seul lui était en mesure de terrasser Pein. Jiraiya avait échoué et perdu la vie et seule sa capacité, le mode Senìn qui utilisait le chakra naturel, pouvait venir à bout de cet adversaire. Pein était insensible à toute autre forme d'énergie. Et aujourd'hui, Naruto était le seul à pouvoir maîtriser rapidement la capacité que son maître avait mis des années à maîtriser. Et Jiraiya était encore loin de la perfection.
« Nous savons que c'est le leader de l'Akatsuki qui attaque le village en ce moment, renchérit le second conseiller avec arrogance.
- Comment le savez-vous ? demanda Tsunade en leur adressant un regard furibond perdant un peu plus son calme à chaque instant.
- Danzô nous l'a appris.
- De plus, ils en ont après le Jinchûriki Naruto.
- Qu'est-ce que ça change ? aboya Tsunade, n'y tenant plus.
- Naruto n'est qu'un enfant, commença la vieille femme. Nous avons été indulgents avec tes erreurs passées. L'intrus n'est-il pas celui qui a abattu Jiraiya ? Il était ton ami le plus proche. Aujourd'hui tu es la dernière des Sannín encore en vie, Tsunade. Si Naruto est enlevé et que Kyuubi tombe entre leurs mains... »
Furieuse, Tsunade s'avança vers ces deux parasites qui demeuraient toujours si bornés et les saisit tous les deux par le col devant les mines stupéfaites des Anbu présents.
- Comment oses-tu... ? commença le vieil homme.
- Pour qui vous vous prenez ? Combien de temps allez-vous continuer à nous traiter comme des enfants ? J'ai hérité de la Volonté de Feu de Konoha et je l'ai entretenue ! Naruto essaie de surpasser Jiraiya en ce moment-même ! Il n'est pas une arme de dissuasion que Konoha peut utiliser en temps de guerre ! C'est un Shinobi qui a juré de défendre Konoha. Et il a aussi juré de venger la mort de son maître.
Elle les relâcha brusquement en les gratifiant d'un regard courroucé.
« Fais comme bon te semble », déclara la vieille femme en quittant la pièce, imitée de son acolyte.
Tsunade inspira profondément tout en s'efforçant de retrouver son calme.
« Suivez-moi » dit-elle à l'attention de sa garde rapprochée d'Anbu.
La vision d'ensemble que lui offrit le toit de l'édifice était plus terrible encore que ce qu'elle avait imaginé. Sans hésiter, Tsunade se mordit le pouce pour faire jaillir le sang et reproduisit les sceaux nécessaires avant de poser sa paume au sol.
« Kuchyose no jutsu ! » [technique d'invocation]
L'instant d'après, Katsuyu se matérialisait face à elle. Tsunade avait utilisé une quantité folle d'énergie pour la faire apparaître. La limace qu'elle avait invoquée faisait la taille du bâtiment. Si les quatre Anbu qui l'accompagnaient demeurèrent silencieux, ils n'en étaient pas moins admiratifs. Tsunade n'avait pas été désignée comme une Sannín sans raison.
« A partir de maintenant, tu vas retrouver et assister tous les Shinobi et les civils de Konoha ! ordonna-t-elle à Katsuyu sans préambule. Puise dans mon chakra pour soigner leurs blessures ! Exécution ! »
Sans protester, la limace se scinda en un millier de fragments. Une multitude de Katsuyu miniatures se mit en mouvement. Dès qu'elles trouvaient un individu en vie, l'une d'elle venait se jucher sur son épaule pour lui transmettre cette force bienfaitrice qui refermerait ses blessures et lui conférerait un regain d'énergie.
« Je protégerait ce village, quoi qu'il en coûte ! s'exclama Tsunade. Parole d'Hokage ! »
*
Iruka fouillait les décombres à la recherche de survivants. Il avait été épargné. L'Académie n'avait pas été touchée. Pour l'instant. Il était un instructeur pour les futures recrues, mais il était avant tout un Shinobi. Il savait ses compétences en combat limitées. Tout ce qu'il pouvait faire pour le moment était d'aider les unités de secours et laisser les Shinobi de premier ordre affronter l'ennemi.
Un gémissement attira son attention à quelques pas de là. Sous une porte arrachée, il trouva un Shinobi maculé de sang. Il le dégagea des décombres.
« Accroche-toi à moi », dit-il en l'aidant à se relever.
Le blessé avait la jambe dans un piteux état. Il avait besoin de soins de toute urgence. Il n'eut pas le temps de faire deux pas qu'une nouvelle explosion retentit. Iruka bondit en arrière sans relâcher la prise sur son camarade afin d'éviter les projectiles. Tandis qu'il se réceptionnait un peu plus loin, un individu se matérialisait devant lui.
« Dis-moi où se trouve le Jinchûriki de Kyubi. Sinon je te tue », déclara-t-il en brandissant une barre de fer.
Iruka reconnut le manteau de l'Akatsuki dont était revêtu cet inconnu. Ses intentions envers Naruto étaient on ne peut plus claires. Iruka ne trahirait pas Naruto. Il avait été son instructeur à l'Académie avant que le garçon n'obtienne son diplôme. Plus encore, il avait veillé sur lui durant toute son enfance. Il avait veillé à ce que Naruto reste dans le droit chemin. Il avait, en quelque sorte, joué le rôle du père que Naruto n'avait jamais eu. Pour toutes ces raisons, jamais il ne le trahirait.
« Parle, maintenant ! insista Pein.
- Je n'ai pas l'intention de te dire quoi que ce soit !
- Alors tu m'es inutile. »
Pein leva le bras, prêt à le transpercer de sa barre de fer. Iruka vit l'arme se rapprocher inexorablement de lui. L'ennemi était trop rapide pour qu'il ait la moindre chance d'esquiver. Une troisième personne s'interposa et bloqua le coup.
« Kakashi ! s'exclama Iruka en se mettant hors d'atteinte de l'adversaire.
- Tu as créé cette diversion massive pour pouvoir fouiner discrètement, c'est ça ? devina Kakashi en toisant son adversaire.
- Kakashi », s'écria Iruka craignant pour la vie de son ami.
A l'aide de son Sharingan, Kakashi était parvenu à bloquer le coup. Il était d'un tout autre niveau que celui d'Iruka. Malgré tout, l'Akatsuki n'était pas à prendre à la légère. Il n'oubliait pas qu'Asuma avait été tué par l'un de ses membres.
« Récupère le blessé et partez, lui répondit-il par-dessus son épaule. Laisse-moi m'en charger. »
La détermination pouvait se lire sur son visage. Iruka savait qu'il n'avait aucune chance face à un adversaire tel que celui-là. Et s'il restait, il ne ferait rien d'autre que de gêner Kakashi. Le Shinobi qu'il avait secouru était grièvement blessé de surcroît.
« D'accord, s'entendit-il répondre la mort dans l'âme. Sois prudent, Kakashi.
- C'est entre toi et moi, déclara Kakashi en faisant face à son adversaire tandis qu'Iruka s'éloignait avec le blessé.
- Alors, je vais te le demander à toi. Où est Kyuubi ?
- Ce que tu fais est inutile. Les gens de ce village sont différents de ce que tu imagines. Même si nous devons risquer nos vies pour cela. Aucun d'entre nous ne vendrait un ami. »
Kakashi était épuisé. Il n'avait plus la force de se relever. Un second Pein avait rejoint le premier. Un type imposant au crâne chauve et dont le corps était davantage métallique qu'organique. Chôza, et son fils Chôji s'étaient mêlés au combat. À eux trois, ils étaient parvenus à trouver une faille. Chôza avait sacrifié sa vie pour permettre à Kakashi d'asséner le coup fatal au premier Pein. Mais le second, l'homme-machine s'était interposé devant sa cible et avait pris le coup à sa place. Kakashi avait alors compris que ce Pein-là était l'original, la tête pensante des six Pein qui attaquaient le village en ce moment même. Les six étaient reliés entre eux et semblaient agir par une volonté unique. Ils agissaient à la manière des clones et pourtant, ils n'en étaient pas. Le coup asséné par Kakashi avait pulvérisé son adversaire. À présent, l'autre Pein lui faisait face et Kakashi n'avait plus la force de bouger. « J'ai échoué » pensa-t-il en posant les yeux sur les corps étendus de Chôza et Chôji un peu plus loin. Pein saisit tranquillement entre ses doigts un misérable clou ramassé par terre. L'instant d'après, il le fit l'éviter à une vitesse fulgurante en direction du visage de Kakashi. Sa tête partit en arrière.
Lorsque Kakashi rouvrit les yeux quelques instants plus tard, ce Pein avait disparu. Il ne restait que le cadavre de l'homme-machine.
Plus loin, Chôji pleurait sur la dépouille de son père.
« Garde tes larmes pour plus tard Chôji, lui dit Kakashi en articulant péniblement. Si tu es encore en état de marcher, cours prévenir Tsunade des capacités de l'ennemi. Elle saura prendre des dispositions. »
Chôji se redressa brusquement, les yeux emplis de larmes.
- Maître Kakashi, articula-t-il stupéfait de le voir toujours en vie.
- Ne réduis pas le sacrifice de ton père à néant. »
Au même instant, l'homme-machine se redressa imperceptiblement.
« Vous êtes tenaces, articula-t-il en matérialisant une rafale explosive.
- Cours Chôji ! » s'écria Kakashi incapable du moindre mouvement.
Dans un cri de rage, le jeune homme se remit sur ses pieds et s'élança. Comment cet individu pouvait-il être encore en vie ?
« Avec le peu de chakra qu'il me reste, impossible d'expédier cette ordure dans le néant, pensa Kakashi. Sans compter qu'utiliser encore une fois le Mangekyou Sharingan viderait totalement ma réserve de chakra et m'épuiseraitcomplètement. Je vais sans aucun doute... mourir. Je dois absolument l'aider à transmettre cette information. C'est la meilleure chose que je puisse faire pour sauver Konoha ! »
Lorsqu'il rouvrir les yeux, la nature de son Sharingan avait changé. Le missile était presque sur Chôji. Dans un dernier effort qui déclencha une douleur qui lui vrilla le crâne, Kakashi utilisa sa technique. À l'aide de son Mangekyou Sharingan, faisant fi de la souffrance qui le transperçait, il fit disparaître le missile. À l'aide de ses dernières forces, il l'avait envoyé dans une autre dimension. Cette technique était terriblement éprouvante en temps normal. Tout son corps le faisait souffrir. Il vit une lueur de compréhension dans le regard de l'homme-machine avant que celui-ci ne s'effondre pour de bon. Kakashi aurait dû mourir lorsque le clou lui avait transpercé le crâne. Il s'était sauvé à l'aide de cette même technique. Le clou ne l'avait jamais atteint. Il avait disparu, lui aussi, dans une autre dimension. Et il ne s'était aperçu de rien. Lorsque l'homme-machine s'écroula enfin, Kakashi relâcha tous ses muscles.
« On dirait bien que c'est fin pour moi aussi » pensa-t-il tandis que la vie l'abandonnait.
Tsunade se redressa d'un bond, attirant des regards interrogatifs des Anbu qui se tenaient de part et d'autre d'elle. Son visage exprimait une profonde tristesse. Assise au centre d'un cercle incantatoire, elle faisait infuser son énergie hors de son corps pour la transmettre à Katsuyu. De cette façon, elle était reliée aux multiples limaces qui s'efforçaient de soigner les blessés. « Kakashi », pensa-t-elle douloureusement.
*
« Le règne de Tsunade touche à sa fin, annonça Danzô à ses Anbu de la racine tous réunis devant lui. Nous ne devons cependant pas laisser l'Akatsuki s'emparer de Kyuubi. J'ai donc fait le nécessaire. Nous allons rester dans les sous-sols le temps que les choses se calment là-haut.
- On ne devrait pas leur prêter main forte ? demanda l'un de ses subordonnés.
- Même si vous vous emparez des peins pouvoirs, ça ne servira à rien s'il ne reste plus âme qui vive à Konoha, renchérit un autre.
- La petite princesse n'est pas Hokage pour rien. Tant qu'elle utilisera la technique de Katsuyu, la population ne risquera pas l'anéantissement total, expliqua Danzô. Il y aura certes de nombreuses victimes, mais c'est le prix à payer... pour que je devienne Hokage. »
*
« Derrière nous ! » s'écria Yugaô tandis que le Pein original se matérialisait sur le toit de l'édifice.
Tsunade se releva lentement pour lui faire face, cessant d'infuser le chakra qui entrait en contact avec Katsuyu.
« Tu es...
- Ça faisait longtemps, maître Tsunade. Tu es la dernière survivante des Sannín légendaires.
- Tu es le garçon de cette fois-là, reprit-elle stupéfaite.
- Tu te souviens donc de moi.
- Vous le connaissez ? demanda un Anbu. Qui est-il ?
- Un Dieu venu rétablir l'ordre, répondit Pein d'une voix tranquille.
- Tu étais l'élève de Jiraiya, reprit Tsunade. Il y a des années, dans ce pays ravagé par la guerre, il t'a pris sous son aile. Il t'a consacré trois années de sa vie. Comment as-tu pu tourner aussi mal ? Comment as-tu pu le tuer ? demanda-t-elle avec colère.
- Uzumaki Naruto, reprit Pein sans lui répondre. Où est Kyuubi ?
- Qui sait..., répondit-elle le visage fermé.
- La chasse aux Jinchûriki est presque terminée. L'équilibre de pouvoir entre les villages instauré par les Bijû est rompu. Il est inutile de protéger Kyuubi désormais.
- Donc ta cible est bel et bien Naruto.
- Une guerre mondiale va bientôt commencer. Et nous contrôlerons les conflits. Au vu de la situation, tu peux aisément imaginer de quoi nous sommes capables.
- Ne sous-estime pas les cinq Kage ! s'écria-t-elle avec colère.
- C'est mon dernier avertissement. Où est Naruto ? Parle !
- Nous allons déployer toutes nos forces dans la bataille afin de vous écraser. Voilà tout ce que j'ai à dire. Vous n'obtiendrez jamais ce que vous convoitez. Naruto est... très fort.
Pein demeura silencieux durant quelques instants.
- Le Mont Myôboku, devina-t-il enfin. Il doit s'agir du village caché des crapauds. Il est inutile que je m'attarde davantage ici.
- Enfoiré ! pesta Tsunade entre ses dents serrées.
- Je vais vous apprendre ce qu'est la souffrance, déclara Pein en s'élevant dans les airs.
- Attends ! Pein !
- Acceptez la souffrance. Apprenez la souffrance. Celui qui ne connaît pas la souffrance ne peut comprendre la véritable paix. »
Il s'élevait toujours plus haut dans les airs.
*
Ino pleurait sur le corps inanimé de Shizune. C'était elle qui avait donné l'information. À son corps défendant. Seuls les proches conseillers de Tsunade savaient où se trouvait Naruto. Pein avait fait une bonne pioche en tombant sur elle. Ce Pein-là avait la faculté de vider l'esprit de ses victimes et de s'approprier leurs souvenirs. En posant simplement la main sur la tête de Shizune, il lui avait arraché sa vie et son être dans sa totalité. Naruto était au Mont Myôboku. Ino n'avait rien pu faire pour aider Shizune. Les choses étaient allées si vite. Sa vie l'avait déserté en quelques instants.
Tous les Pein s'étaient dématérialisés, abandonnant leur combat. Ils se regroupèrent à l'extérieur du village et tombèrent inanimé. Le Pein original avait besoin de leur énergie à tous pour son jugement divin.
*
« Ils vont entreprendre une dernière action, devina Tsunade plus soucieuse que jamais. Katsuyu, protège tout le monde ! ordonna-t-elle en quittant le toit du bâtiment pour s'élancer au cœur du village.
- Godaíme ! s'écria l'un des Anbu tandis qu'ils se lançaient à sa suite.
- Quelque chose de terrible va se produire ! »
« Ce monde va connaître la souffrance, déclara Pein en réalisant sa technique. Shinra Tensei ! »
L'instant d'après, une lueur aveuglante envahit les lieux. Une énorme bourrasque s'éleva, balayant tout sur son passage dans un rayon d'un kilomètre. Les bâtiments furent balayés comme de vulgaires fétus de paille. Rien ne résista. Les gravats furent repoussés jusqu'aux confins du village et s'arrêtèrent enfin en rencontrant les murs d'enceinte. Konoha n'existait plus.
*
Trois gigantesques crapauds se matérialisèrent au centre de ce cratère. Debout sur la tête du plus imposant, déterminé : Naruto. Lorsque la fumée se fut dissipée, il balaya les lieux du regard. Les crapauds s'étaient-ils trompés de destination ? Il se figea cependant en apercevant loin devant lui, les visages des cinq Hokage qui avaient successivement été à la tête de Konoha depuis sa création. Ces visages gravés à même la roche, il ne les connaissait que trop bien. Il n'osait comprendre la situation. Le cratère au centre duquel il se trouvait, c'était Konoha.
Tsunade regardait, hébétée, la vision qui s'offrait à elle.
« Je ne te le pardonnerait jamais, Pein », articula-t-elle péniblement.
Elle avait survécu. Katsuyu avait protégé bon nombre d'entre eux. Mais combien avaient péri ? Elle avait fait don de toute son énergie à Katsuyu pour protéger les villageois. Il ne lui restait plus rien. Le sceau sur son front avait disparu, épuisé. C'était la première fois de sa vie qu'elle se sentait si démunie. Mais c'était la seule façon de protéger les villageois.
Pein était redescendu sur la terre ferme et s'avançait d'un pas tranquille en direction de Naruto.
« Tu m'épargnes la peine de te chercher », déclara-t-il.
L'instant d'après, les cinq autres Pein l'avaient rejoint, intacts.
Tsunade s'interposa. Elle semblait épuisée.
« Je suis le Godaíme Hokage ! Vous avez ravagé les trésors et les rêves de nos ancêtres. Je ne vous le pardonnerai jamais. En tant qu'Hokage, je vais vous donner ce que vous méritez !
- Tu sembles commencer à comprendre ce qu'est la souffrance, répondit Pein. Mais je n'ai que faire de toi. Celui qui m'intéresse... »
Il ne prit pas la peine de terminer sa phrase. L'un d'entre eux fonçait déjà vers Tsunade pour la réduire au silence une bonne fois pour toute. À une vitesse fulgurante, Naruto se mit en mouvement et pulvérisa le Pein-machine d'un unique coup. En cet instant, il aurait pu rivaliser avec le coup de poing surpuissant de Sakura.
« ... c'est moi, non ? » répondit-il en achevant la phrase laissée en suspens.
Tsunade se redressa, stupéfaite.
Naruto était différent. Ses yeux étaient cerclés d'une couleur orangé, la pupille barrée d'un trait horizontale faisait penser à l'œil d'un crapaud. Il avait réussi. Il maîtrisait le mode Senín, le mode ermite que Jiraiya n'était jamais parvenu à maîtriser pleinement. Il n'était pas encore totalement au point mais, il devrait faire avec.
« Il n'est pas nécessaire que l'Hokage de Konoha se dérange pour des minables pareils, déclara Naruto. Retire-toi et bois un thé tranquillement, la vieille.
- Naruto ! protesta-t-elle d'une voix faible, ses jambes ne soutenant qu'à la force de sa volonté.
- Je prends le relai. Dis bien à tous les villageois de ne pas intervenir. Ce serait plus difficile de combattre tout en essayant de les protéger.
- Très bien, concéda-t-elle. Alors prends Katsuyu avec toi, déclara-t-elle en désignant la petite limace juchée sur son épaule. Elle te sera utile. Elle possède des informations sur eux. »
Tsunade n'avait plus de force. Ses jambes allaient se dérober mais l'un des crapauds la saisit dans sa main palmée et recula de quelques pas pour se placer derrière les deux autres.
« L'instant est peut-être mal choisi, commença Naruto qui faisait toujours face à leurs ennemis, mais, maintenant que je suis capable de capter l'énergie naturelle, je peux distinguer le chakra de tout le monde. Est-ce que Maître Kakashi a été envoyé en mission en-dehors du village ? »
Trop abattue pour répondre, elle garda le silence. Il n'avait pas besoin de davantage pour comprendre.
« Je vois..., dit Naruto d'une voix accablée. Vas-y Gamakichi ! » s'exclama-t-il à l'attention du crapaud géant qui protégeait Tsunade.
Tandis que ce dernier bondissait pour éloigner l'Hokage de la zone de combat, Pein sauta sur l'occasion pour entrer en action. Plus concentré que jamais, Naruto engagea le combat.
***
L'intrigue avance. Konoha a été détruit. Naruto vaincra Pein. Mais ensuite ? Que va-t-il se passer du côté de Sakura ? N'a-t-elle pas fait une erreur en greffant de nouveaux yeux à Sasuke ?
Akhesa.