LIFE : Survivre (tome 1)

By Masi-rodzina

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Cassandra, 27 ans, a la vie idyllique dont toutes les femmes rêvent. Un mari aimant et attentionné, deux enfa... More

Préface
1) Une journée chez les Briali
2) Week-end tragique
3) Les ténèbres
4) Regrets
5) Docteur Laurens
6) La vie continue...
7) Possibilité
8) Décision
9) Départ
10) Installation
12) Anniversaire
Remerciements
13) Mauvaises rencontres
14) Accrochage
15) Rapprochement
16) Surprenante coalition
17) Appréhension
18) Improbable
19) Bonne entente
20) Sans artifices
21) Moments inoubliables
22) La peur au ventre
23) Rechute
24) A cœur ouvert
25) Ébauche
26) Tentative
27) Panique
Remerciements
Pour nos fans
Wattpad Awards (concours terminé)

11) Désillusions

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By Masi-rodzina


Au vu des récents événements survenus en Belgique, nous voulions apporter notre soutien aux familles des victimes. 

NOUS SOMMES TOUS BRUXELLES ! 


Trois semaines après...

Un hurlement perce le silence de ma chambre. Mes yeux s'ouvrent sur l'obscurité. Je regarde le réveil, il indique 4h36. Bon sang, c'est trop demandé d'avoir les nuits comme répit?

Quand je suis arrivée, j'étais pleine de doutes mais motivée à avancer. Les premiers jours ont été reposants. Entre mes visites touristiques et mes footings, j'étais bien partie, je reprenais enfin confiance en un avenir meilleur. Cela faisait près de trois ans que je n'avais pas dormi une nuit complète. Pas de réveils en sueur, pas de cris, pas d'angoisse. Malheureusement, cette expérience ne s'est jamais réitérée depuis ma visite de la Statue de la Liberté. L'espoir de sortir de la nuit éternelle s'est envolé aussi vite qu'il était apparu.

Je suis épuisée, à bout de nerfs. Je ne sais même pas comment je fais pour tenir encore le coup. Je me lève donc et vais me faire couler un café. En attendant, je m'installe dans mon canapé et me mets à zapper sur toutes les chaînes, comme à chaque fois que j'allume la télévision. Je ne sais même pas pourquoi je la regarde, peut-être pour avoir une présence car je ne l'écoute même pas. Au bout d'un moment, je l'éteins et retourne à la cuisine me servir une tasse.

Je prends place sur une chaise autour de la table où se trouve mon ordinateur. C'est mon bien le plus précieux ces temps-ci. Depuis que j'ai réalisé cet album pour Nathan, je passe mes journées sur mes dossiers photos. Je les trie par mois, par année, par évènement. De cette manière, ils sont toujours présents à mes côtés. Il m'arrive de rire de certains clichés, comme celui où Nathan porte Louna et qu'elle essaie d'embrasser son frère qui lui offre une mine dégoûtée. Je me souviens de cet instant-là, nous avions tant ri. Et aussitôt après arrive la culpabilité de ces quelques secondes de bonheur. Je n'y ai plus le droit. J'ai tout perdu. Les larmes roulent sur mes joues en même temps que les images défilent sur l'écran. Je sais que doc n'apprécierait pas ce hobby. Pour lui, les photos font partie de mon ancienne vie et je ne devrais pas m'enfermer dans cette spirale. Mais j'en ai besoin. J'ai trop perdu. Ma famille m'ayant quittée, il ne me reste que ces images rescapées de mon bonheur passé.

France, États Unis, je ne vois pas de différence entre les deux. A part peut être la langue et le comportement des gens. Dans les rues de New-York, les passants se mélangent sans prêter attention à leurs voisins, aucun regard, aucune parole. Sinon, l'un ou l'autre ne change strictement rien pour moi. C'est une gifle de plus. Me suis-je donner trop d'espoir ? Si d'autres personnes arrivent à passer le cap, pourquoi pas moi ? Y a-t-il quelque chose qui cloche chez moi ? Je me lamente des heures entières sans savoir comment sortir de ma solitude dépressive.

Je ne connais personne ici. A part Monsieur Carrigan, ou plutôt Shelton, qui m'a demandé à plusieurs reprises de venir boire un café chez lui. Il est un peu trop entreprenant à mon goût, je préfère l'éviter. Sinon, les seuls que je croise sont des voisins, ils m'ont l'air sympathiques mais je ne suis pas prête à discuter avec eux. J'ai revu Kelly il y a quelques jours, elle courait encore dans les escaliers. Mais maintenant je suis prévenue, en entendant un raffut de tous les diables, je me suis décalée contre le mur pour laisser passer cette tornade blonde. Elle m'a saluée d'un signe de la main en souriant mais sans ralentir sa cadence.

Les seuls moments où je me sens moins seule sont quand je chausse mes baskets et que je cours dans la fraîcheur des journées printanières. Les appels de mes proches ne suffisent pas non plus à combler le vide qui m'entoure. Heureusement, Doc ne me lâche pas. Il me maintient à flots, il m'encourage sans cesse.

Justement le téléphone sonne.

— Allô ?

— Bonjour ma chérie, c'est maman !

Qui d'autre m'appellerait à cette heure hormis elle ? Elle a un mal fou à se souvenir du décalage horaire.

— Bonjour Maman !

— Ça va aujourd'hui ?

Toujours cette éternelle question pour laquelle je n'ai aucune réponse franche à donner.

— Ça va, je lui réponds d'une voix morne.

— Tu sais, on se fait du souci pour toi ton père et moi. Tu peux revenir quand tu veux. N'aie pas honte d'échouer si ça devait arriver. Nous serons toujours là pour toi mon cœur.

Je lève les yeux au ciel d'exaspération. Papa ne doit pas être à la maison, sûrement au garage en train de bricoler. Elle n'est insistante qu'en son absence. Il est trop tôt pour endurer un tel discours.

—Maman, je suis désolée mais je dois raccrocher. Je suis attendue.

Je préfère lui mentir pour retourner à mon silence.

— Tu t'es fait des amis ?

Je perçois sa surprise à l'autre bout de la ligne.

— Oui et ils vont m'attendre !

Je continue en espérant qu'elle me croit. Elle espère tellement.

— Ok mon cœur, je ne te retiens pas plus longtemps alors. Au revoir chérie. On t'embrasse très fort ton père et moi.

— Oui moi aussi. Bisous à vous deux. Au revoir.

Je raccroche en soufflant de soulagement. Il 6h08, je n'aurais pas supporté une fois de plus sa désapprobation suite à mon départ. Non, pas à cette heure si matinale !

Je m'en veux de lui avoir menti, je ne veux pas la décevoir. Je sais qu'elle agit par peur et par amour pour moi. J'étais la même avec mes petits, toujours à m'inquiéter pour un oui ou pour un non. Mais désormais la question ne se pose plus, je n'ai plus personne à dorloter. Je n'ai pas su les protéger. Ils sont morts et moi j'erre telle une âme en peine en attente d'une absolution qui ne viendra jamais. Je me noie sous un flot de larmes qui alimente mon désespoir. La solution n'est pas ici. Je suis aussi seule et perdue qu'avant mon arrivée.

Je retourne me coucher auprès de mes enfants. Enfin ce qu'il m'en reste ! Un panda à moitié déchiqueté aux oreilles, Louna le suçotait pour s'endormir. Et un carré de tissu qui servait de lange autrefois. Je le mettais sur le matelas au niveau de la tête de Maël, pour éviter de changer les draps en cas de régurgitation. C'est ainsi qu'il l'a adopté. Je les serre contre moi et les hume. Leur odeur a disparu. Je me remémore nos moments heureux, en espérant plonger dans un sommeil qui se voudrait reposant, pour une fois.

Cela faisait un moment que les enfants nous cassaient les oreilles. « C'est quand qu'on va à Disney? » Il n'y avait pas un jour où ils ne nous en parlaient pas. Alors, pendant les vacances d'octobre, nous nous sommes lancés. L'excitation était de mise dans la voiture. Le trajet nous parut très long à Nathan et moi. Une fois sur le parking, leur joie était imprimée sur leur visage. Aucun de mes deux enfants ne tenait en place.

La magie du lieu était telle que la journée fut magnifique. Louna pleurnichait souvent dans les files d'attente. C'était trop long pour elle. Maël chantait à chaque manège la chanson du dessin animé le concernant. On ne pouvait leur faire plus plaisir. Les yeux de ma fille brillaient d'émerveillement en voyant défiler toutes ses princesses préférées lors de la parade.

Mais toutes les bonnes choses ont une fin et le temps filait sans nous attendre. En nous dirigeant vers la sortie, nous sommes passés devant la maison hantée. « S'il te plaît, s'il te plaît, s'il te plaît. » Exaspérés par leur entêtement, nous les avons prévenus que c'était la dernière attraction de la journée et que toutes autres négociations échoueraient.

Une fois dans la maison, nous nous sommes entassés dans l'ascenseur avec les autres visiteurs. « Arrête de me faire peur papa ! ». Maël disputa son père qui l'enquiquinait joyeusement. Pendant que nous descendions, les tableaux aux murs nous révélaient leur vraie nature. Louna se serra un peu plus contre moi.

Quand la porte s'ouvrit, Nathan sortit le premier. Il ne remarqua pas le comte Dracula qui se tenait à ses côtés. Je ne les lâchais pas des yeux. Nathan se retourna en sentant une main sur son épaule. Et il se mit à hurler d'une voix aiguë que je ne lui connaissais pas. J'éclatais de rire alors qu'il faisait un bond d'au moins un mètre en arrière. Les gens alentours ne cachaient pas leur amusement non plus. Même les enfants rigolaient à ne plus pouvoir s'arrêter. J'en pleurais tellement c'était drôle. Je ris tant que je fis quelques gouttes dans ma culotte. Je ne le dis à Nathan sinon ça aurait été à son tour de se moquer de moi.

Sur le chemin du retour, le calme régnait. Les enfants étaient épuisés par cette journée riche en émotions. J'avais posé ma tête sur l'épaule de Nathan en repensant au bonheur que nous venions de partager tous les quatre.

Engourdie par le sommeil qui s'évapore peu à peu, je m'éveille dans un lieu inconnu. Je suis encerclée par des murs jaune pâle. Une commode est positionnée dans un coin de la pièce. Je tourne la tête en me frottant les yeux, une armoire assortie est près de la porte. Sur la table de nuit à mes côtés se trouve mon radio-réveil et une photo de nous quatre réunis. Et c'est là que la vérité m'explose en plein visage. Ses trous noirs sont encore plus durs à surmonter que leur perte en elle-même. Quand je me rends compte de la réalité, remonter à la surface est d'autant plus difficile et la douleur interminable. Je viens cogner avec violence la tête de lit. Cette douleur n'apaise en rien celle qui me ronge la poitrine. Des bruits se font entendre de la pièce adjacente à ma chambre. Des coups sont portés aux murs et des hurlements se font entendre. Dans le genre expansif, on ne peut pas faire mieux ! Sérieux, ils ne savent pas qu'ils ont des voisins et que les murs sont de l'épaisseur d'une feuille de cigarette ? Entre l'accablement qui m'oppresse et ces deux-là qui s'envoient en l'air sous mon nez, j'explose. Je saute du lit et frappe à plusieurs reprises contre le mur de mes deux poings avec virulence.

— Ça ne vous dérangerait pas d'être plus discrets ?

Je hurle mon indignation sans que les bruits de mes voisins ne cessent. Je suis outrée par le manque de respect. Je saute dans mon jogging noir, empoigne mon sac à main et quitte cet appartement dans lequel je ne peux rester une minute de plus. Je dévale les escaliers de sorte que je n'entends que mes pas dans le couloir. Shelton sort et me regarde, avec des yeux de merlan frit, courir jusqu'à la porte d'entrée du hall. Il me gonfle celui-là ! L'air frais me fouette le visage. Maintenant que je suis dehors, je ne sais pas quoi faire ni où aller. Je déambule sur le trottoir, un parfait robot. Les passants se bousculent autour de moi, me dépassent. Je m'arrête devant la vitrine de la supérette et pense que je n'ai plus beaucoup de café. Je passe donc la porte et vais directement au rayon qui m'intéresse et m'empare d'un paquet. A la caisse, je n'ai pas longtemps à attendre, je n'ai devant moi qu'une femme dans mes âges. Vu le peu de courses dans son caddy, ça devrait aller vite. Une petite fille toute bouclée y prend toute la place et un petit garçon est installé dans le siège devant. Ils se regardent avec des yeux rieurs et se tirent la langue en rigolant. La nostalgie s'immisce en moi quand je repense à mes amours qui faisaient la même chose. Leur complicité est née très rapidement. Déjà quand j'étais enceinte, Maël posait son doudou sur mon ventre pour que Louna n'ait pas froid.

Allez bonhomme tu dois aller faire la sieste maintenant, il est l'heure.

Nathan tente de porter notre fils, mais celui-ci en a décidé autrement. Il secoue sa petite tête brune en signe de désaccord et caresse le bras de Louna. J'ai lu dans un livre pour jeunes parents que les deux ans de l'enfant sont une phase de négation, et nous en avons la preuve à cet instant précis. Nous sommes rentrés de la maternité depuis une heure et il n'a pas encore quitté sa sœur une seule seconde. Ses camions sont délaissés aux pieds du canapé et il n'a d'yeux que pour la petite chose qui dort contre ma poitrine.

Allez mon lapin tu verras ta sœur tout à l'heure. Elle dort là et tu dois faire pareil.

Il regarde son père en fronçant les sourcils et se colle encore un peu plus à moi.

Cayin bébé.

Il pose délicatement sa joue sur Louna qui sursaute à son contact. Ses petites paupières s'ouvrent sur son grand frère ébahi. Nathan et moi sommes des spectateurs émus devant leur première rencontre. A chaque fois que mon mari est venu me rendre visite à la clinique avec Maël, la petite dormait. Mon fils tend la main pour toucher sa sœur, mais Nathan la lui prend et la dépose précautionneusement sur Louna, dans une douce caresse.

Bébé pas dodo.

Je ris devant l'intelligence de sa réflexion. Mais mes soubresauts surprennent Louna qui se met à hurler. Ses cris résonnent dans toute la pièce. C'est bien une fille, depuis que je l'ai mise au monde elle crie de son réveil au prochain endormissement. Maël retire rapidement sa main, apeuré, et tend les bras à son père.

Dodo.

Mon fils n'est pas habitué à autant de bruit, il est si calme. Ça va nous faire du changement.

— Madame ?

Je regarde la caissière en face de moi, les yeux hagards. Je me suis une nouvelle fois perdue dans mes souvenirs, et là, c'est dans un lieu public. Les gens me scrutent comme une bête de foire. Je pause précipitamment mon paquet de café sur le tapis roulant et déguerpis sans demander mon reste.

En sortant, je bouscule un homme d'un certain âge qui s'apprête à entrer. Je bafouille quelques mots d'excuse et repars en direction de chez moi pour me cacher des badauds curieux.

Ces visions vont finir par m'enterrer vivante. Je pensais que vivre à New York m'éviterait ces sauts dans le passé. Doc avait dit que l'éloignement m'aiderait à faire le deuil des moments passés en famille qui m'assaillent. Je suis condamnée à payer le prix des souvenirs pour être vivante. Je tourne en rond dans mon salon, incapable de faire autre chose. Je suis oppressée entre ces quatre murs. Je suffoque, j'étouffe. Je vais jusqu'à la fenêtre et l'ouvre en grand. Je m'accoude à la rambarde et un bol d'air frais m'envahit. Je prends de profondes inspirations en espérant me calmer, mais des cris venant de la rue m'interpellent. Je me penche pour voir d'où ils proviennent et j'aperçois la femme de tout à l'heure avec ces deux enfants. Elle tente de faire monter la plus grande dans la voiture mais elle fait de la résistance. Sa mère s'énerve après elle et l'empoigne avec force pour l'obliger à entrer dans le véhicule. Cette scène anodine m'est insupportable, je referme aussitôt la fenêtre pour m'en éloigner. Je me laisse glisser contre le mur jusqu'à ce que je touche le sol. Je relève les genoux et y enfouis mon visage une nouvelle fois inondé de larmes. Cette femme ne connaît pas la chance qu'elle a d'avoir ses enfants auprès d'elle. Moi, je les ai perdus et je me reprocherai toujours les remontrances que je pouvais leur faire. Quand nos proches les plus précieux disparaissent, c'est là que l'on se rend compte des priorités. Je m'énervais souvent après Louna parce qu'elle ne se concentrait pas assez pendant ses devoirs. Et maintenant, je ferais n'importe quoi pour avoir l'opportunité de la voir mâchouiller son crayon à mine et mettre sa gomme en miettes. J'ai été une mère beaucoup trop exigeante avec mes enfants et je le paie maintenant. Je voulais tellement qu'ils soient parfaits, polis, respectueux, intelligents que j'en ai oublié l'essentiel. Chacun est comme il est. L'important était que je les aime de tout mon cœur et j'aurais dû le leur montrer davantage. Dorénavant, je donne de l'amour à des peluches qui me rappellent continuellement que je ne serai plus jamais maman.

Je m'allonge sur le carrelage froid et y déverse mon chagrin, recroquevillée sur moi-même.




Contre toute attente, Cassandra n'arrive pas à remonter la pente.

Sa vie va prendre un tournant auquel elle ne s'attend pas. 

Quel avenir imaginez-vous pour elle ?

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