10 / Louve

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     - C'est une louve...balbutia la jeune femme au bord de l'évanouissement.

     Cette fois-ci, son mari ne contredit pas ses paroles, car lui-même venait d'apercevoir les deux yeux luisant à travers le buisson feuillu.

     Il s'approcha de sa fille et de se femme doucement et prit la main de cette dernière. Elle tremblait et n'osait pas faire le moindre geste. Hana observait la scène également sans broncher, l'air fasciné.

     - Qu'allons-nous faire ?

     Le menton de la jeune femme trembla lorsqu'elle ouvrit la bouche. Elle sentit une légère pression sur sa main, et le visage affolé de son mari se durcit.

     - Je vais lui parler.

     La jeune femme se mordit la lèvre et serra son enfant contre elle en laissant rouler quelques larmes le long de ses joues.

     Le petit homme fit un pas peu assuré en avant, et un long grognement se fit entendre. Sa femme sursauta et sentit que ses jambes n'allaient bientôt plus la supporter.

     - Vous êtes une déesse n'est ce pas ? La déesse louve de la forêt. Je reconnais votre pelage blanc et vos deux queues. Sachez que nous ne voulions pas perturber la sérénité de votre demeure. Je vous supplie de nous laisser partir, et d'accepter nos sincères excuses.

     Il s'était incliné et releva alors la tête vers la louve qui, peu convaincue par le discours de l'homme qui avait détruit sa forêt, sortir d'un bond de sa cachette.

     L'homme à la faible carrure savait qu'il était trop tard et hurla :

     - Fuyez !

     La jeune femme ne perdit pas de temps pour avoir un espoir de sauver la vie de sa fille, et partit en courant dans la direction opposée à celle de la Déesse. Elle sautait par-dessus les immenses racines recouvertes de mousse, glissait avec ces modestes sandales de bois, mais ne s'arrêtait sous aucun prétexte. Elle dû reprendre son souffle, alors que Hana commençait à pleurer à force d'être secouée dans tous les sens. Elle s'adossa contre le tronc d'un arbre immense et rassura sa fille :

     - Ne pleure pas Hana s'il te plait.

     Son cœur tambourinait dans sa poitrine, et elle n'arrêtait pas de penser à son mari. Avait-il pu s'enfuir ? Elle sursauta en entendant un hurlement de loup strident et se releva avec peine. Lorsqu'elle regarda au loin devant elle, un petit être blanc fit son apparition. Elle se retint de hurler, et recula d'un pas, lorsque les pleurs de sa fille cessèrent et qu'elle commença à rire en voyant le petit esprit blanc marcher dans leur direction.

     La jeune femme prit en compte le fait que ce petit bonhomme ne semblait pas agressif, et qu'il ne faisait pas peur au bébé, et décida de le suivre lorsqu'il lui fit un petit signe de tête cliquetant. Ils marchèrent un moment dans la forêt sombre en entendant que le bruit des brindilles qui se fendaient sous les pas de l'humaine, puis les arbres devinrent plus petits, moins denses, et les rayons du soleil vinrent à nouveau éclairer le visage des deux malheureuses. La mère plissa les yeux et aperçu l'herbe verte et scintillante d'une clairière au loin, au-delà d'une barrière d'arbres. La peur retomba légèrement et les battements de son cœur se calmèrent. Elle était épuisée, mais elle devait y arriver, pour Hana.

     Elle se pencha vers le petit esprit humanoïde au visage figé et souffla : 

      - Merci beaucoup petit être.

     Il fit trembloter sa tête, provoquant une succession de petits cliquetis sonores, puis se volatilisa. La jeune femme vit son image disparaître entièrement et Hana cessa de rire. Le calme et la solitude étaient revenus. L'inquiétude enserra à nouveau la gorge de la jeune mère, mais elle ne se laissa pas abattre, et poursuivit son chemin en puisant dans les dernières forces qui lui restaient.

     Soudain, elle sentit une pression sur son bras. Elle tourna la tête et son cri fut étouffé par la main ensanglanté qui lui bloquait la bouche. L'homme la libéra et s'écria, à bout de force :

     - Elle est là, tout près. Il faut partir vite.

     - Oh mon dieu mais tu es blessé !

     Elle regarda le visage de son mari, couvert de sang et d'entailles. Il ne répondit pas, et lui prit sa main libre pour l'entraîner à travers la forêt.

     - Elle est là !

     Ils se baissèrent ensemble pour éviter la louve qui venait de bondir au dessus de leurs têtes. La jeune femme trébucha en même temps et Hana tomba de ses bras en criant et en pleurant.

     - Laisse là, elle nous ralenti trop, je suis désolée c'est notre seule solution si on veut sortir vivant de là !

     - Jamais je...

     La mère fut coupée par la louve qui s'approchait d'eux en grognant. Les yeux flamboyants, les oreilles dressées, ses deux queues fendant l'air et son pelage aussi blanc que la neige. Ils sentaient la mort approcher. Que ferions-nous dans ces cas là pour sauver notre peau ? Nous ne savions pas ce qu'étaient en train de ressentir les deux parents, mais le père décida de prendre les choses en main et saisi le bras de sa femme pour l'entrainer loin du danger et de leur progéniture.

     - Je t'aime Hana ! lança celle-ci alors qu'elle l'abandonnait entre les pates de la Déesse.

     En disant cela, elle jeta vers son enfant le cerceau qu'elle avait autour de sa tête, et il s'écrasa aux pieds de la louve. Ils disparurent alors entre les arbres, vers la liberté et hors du danger. 

Origines (Princesse Mononoké)Where stories live. Discover now