Chapitre 1 : L'arrivée / Sous chapitre : Colocataires

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Nous arrivons au pas de course à la hauteur du troisième étage sans encombre ni le moindre essoufflement. J'ai bousculé une ou deux traînardes dans les escaliers avec mon gros sac, cependant elles ont su tenir leur équilibre ou se pousser sur le côté à temps. Donc, il n'y a pas eu de drame, juste des plaintes que nous n'avons pas pris le temps d'écouter. Nous grimpons trop vite pour cela. Il nous faut quelques secondes à peine pour trouver les numéros de chambre. Mélia entre dans sa future demeure, la 326.

Je la suis de près et pose mon package dans le couloir. Je veux voir si ses colocataires sont acceptables avant de laisser ma sœur seule pour la première fois. Si je pressens le moindre danger, ils iront se faire voir avec leur règlement et je resterai ici pour la protéger. Pour l'instant, je n'ai vu que des mauviettes dont la seule arme est une langue de vipère. Mélia sait faire face sans moi. Elle a l'esprit bien plus vif et incisif que moi pour clouer le bec des pouffes et des vieux schnocks prétentieux.

Trois filles déballent leurs affaires. Je les jauge discrètement sous le prétexte d'aider ma sœurette. Leurs looks me paraissent assez semblables à celui de ma jumelle, moins extravagantes mais très proches. De prime abord, elles me donnent l'impression de petites souris timides et gentilles qui me regardent en douce d'un air apeuré. D'ailleurs, elles ont toutes accueilli ma jumelle avec un grand sourire craintif et des mots sucrés. Je vois bien qu'elles n'osent pas me parler. Mon look les effraie. Elles ne me semblent pas très dangereuses.

Un mec, d'au moins un mètre quatre-vingt-dix, rentre dans la pièce. Je le fusille du regard sans qu'il n'y prête attention. Il se dirige droit vers une des filles. La soulevant dans ses bras, il l'embrasse sur les cheveux et les joues en riant et la chatouille gentiment. La pauvre est toute petite, environ un mètre cinquante. On voit que le mec adore la placer à plusieurs dizaines de centimètres au-dessus du sol pour l'embêter. Ils se chamaillent avec tendresse.

Elle semble heureuse de ce contact bien qu'elle proteste et ronchonne. Je n'interviens pas dans ce cas. Si elle ne voulait pas, je l'aurais défoncé le grand dadet tactile. On ne force jamais une fille à un contact sans subir de représailles si je suis dans les parages. A la discussion mi-câline, mi-chamaillerie, j'entends qu'il s'agit de son frère. Son grand frère. Leur tendresse réciproque se sent dans leurs gestes et leurs paroles. Le ton doux et protecteur qu'il emploie me confirme combien il prend soin d'elle. La contestation et les bisous sont une autre preuve que la petite se sent bien et en sécurité.

Les deux autres filles roucoulent et minaudent en battant des cils. Elles sont heureuses de la présence du géant et le font savoir. L'une d'elles demande de l'aide pour mettre la valise sur le haut de l'étagère. L'autre veut qu'il lui raconte son été. Elles s'extasient sur sa force et d'autres trucs. Si je comprends bien, il est dans l'équipe de basket. C'est le genre populaire que j'abhorre. Au moins, il est gentil avec elles et n'utilise pas le ton supérieur habituel des mecs ayant du succès qui me hérisse le poil. Au contraire, il les complimente et les valorise. Il semble doté d'une cervelle, ce qui est rare chez les populaires.

Il ne vient pas pour draguer, mais pour donner à sa sœur l'excédent de bagages qu'elle a dissimulé dans les valises de son frère. Je les entends se chamailler avec amour. La toute petite houspille le grand dadet et n'a pas peur de le frapper avec une peluche ou ses toutes petites mains délicates. Il ne riposte que par des bisous et des câlins. Il se soumet oralement à la bonne volonté de sa petite sœur adorée. Mélia sourit quand ils ont des propos similaires à ceux qu'on peut avoir avec ma jumelle. Elle aussi scrute les moindres faits et gestes de la chambrée pour contrôler son futur environnement. Si la fille ressemble beaucoup à ma licorne en plus timide et craintive, lui n'est du tout comme moi sauf le côté protecteur. Il est doux, aimable, sociable et rieur. Mon contraire quoi.

A quoi tient la survie?Où les histoires vivent. Découvrez maintenant