Partie d'Athéna - Chapitre 4

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[TW viols - implicite] [TW agressions sexuelles]


Elle se réveille, le cœur au bord des lèvres, la peau comme boueuse. La nuit n'a pas été des plus agréables. David a noyé sa défaite dans l'alcool. Elle préfère quand il ne s'enivre pas. Il est plus délicat, moins brutal avec elle. Dans l'obscurité, il lui a chuchoté des excuses au parfum de rhum. Elle les a acceptées avec une grande lassitude. Ce n'est pas la première fois qu'elle a à ravaler son envie d'aller dormir au sanctuaire. Ça ne sera pas la dernière non plus. Il l'a habituée à ces quelques écarts. Elle aimerait beaucoup qu'il boive moins. Il agit comme il le souhaite. Elle s'adapte : elle ne le changera pas. Il lui semble pourtant que chaque nuit, elle s'effeuille un peu plus.

Ce matin elle n'a pas la force d'aller se battre. Ogier passe plus tard dans la journée, la trouve encore au lit. Il lui demande si elle a bien dormi parce qu'il sait très bien qu'elle n'a pas fermé l'œil. Elle l'ignore. Il ajoute qu'elle dînera avec le Roi le soir, et qu'elle se doit d'être présentable. Elle acquiesce. Il la laisse seule ensuite, enfin. Elle ignore quand est-ce qu'elle commence à pleurer. Elle verse les larmes les plus silencieuses et les plus fragiles. L'euphorie de la Bataille a volé en éclats. Elle ne dure jamais, mais elle espère chaque fois. Elle devrait cesser d'être aussi crédule. Ça ne fait qu'amplifier ses douleurs. Elle ne comprend pas pourquoi elle ne parvient pas à être heureuse et à remplir son rôle à la fois. Être elle-même ne devrait pas la faire autant souffrir. Ça ne devrait pas être un tel fardeau.

Elle se lève pour se rendre au sanctuaire – elle n'est capable de rien aujourd'hui, mais la Chapelle l'apaisera un peu. Son cœur se tord alors qu'elle espère un jour se sentir plus légère. Ça viendra, elle prie tous les jours, avec ferveur comme avec égoïsme, pour son bonheur. Si les Atouts existent elle sera exaucée. Elle sera heureuse d'être la Dame de Pique.


Le lendemain elle est réveillée par le Roi qui l'embrasse sur le front. Elle lui souhaite une bonne journée. Il la consacrera à planifier la prochaine Bataille, avec l'aide de Paul et peut-être celle d'Ogier. Elle est libre jusqu'à ce soir. Elle a les mêmes sensations que la veille, mais plus de volonté aussi. Elle décide de prendre un bain. Elle le remplit elle-même, faisant des allers-retours au puits et chauffant l'eau aux cuisines. Les hommes lui proposent leur aide mais elle la refuse chaque fois, en les remerciant pour leur gentillesse. Elle mélange à l'eau une poudre de fleurs séchées, qui embaume dans toute la pièce. Elle se prélasse toute la matinée dans la baignoire. Elle lave avec soin ses cheveux et les enduit d'huiles parfumées. Elle chantonne. Ses jambes sont légères, ses bras aussi. Elle reste seule avec elle-même jusqu'à frissonner dans l'eau froide. Elle sort quand elle se sent pure seulement. Elle se sent forte.

Dans sa chambre, elle choisit sa robe préférée – la plus chaude et la plus confortable. Elle l'a cousue elle-même, comme toutes les autres. David ne la trouve pas belle alors elle ne la met pas souvent. Aujourd'hui, elle se l'autorise. Elle s'admire dans le miroir. La robe est longue, en velours noir, avec un col roulé. Les amples manches s'ouvrent en deux, sur une doublure en satin qui scintille à chacun de ses mouvements. Malgré leur longueur, la robe reste pratique à porter. Satisfaite, Athéna quitte sa chambre. Elle sait où aller.


La porte de la bibliothèque est immense. Elle a deux battants d'ébène, ciselés de motifs aquatiques et incrustée de néons. Deux lourds anneaux lumineux pendent sur chacun des panneaux. Athéna les saisit sans trembler. Elle se demande pourquoi le geste qu'elle s'apprête à faire à un tel goût de vengeance – et entre sans trouver de réponse.

Des étagères remplies de livres s'élancent jusqu'au plafond dans la salle immense. Elles créent comme un couloir et face à Athéna, à quelques dizaines de mètres, David et Paul sont réunis autour d'une table en marbre noir. Il n'y a aucune fenêtre, les seules sources de lumière sont des néons blancs et bleus qui donnent des reflets étranges aux visages des deux hommes. Ils se tournent vers elle. Elle s'efforce de ne pas jeter un seul coup d'œil aux livres à sa gauche, aux ouvrages à sa droite, bien qu'elle en brûle d'envie. Elle continue d'avancer. Elle fixe le Roi, qui en retour la dévisage, outré.

Les ReinesWhere stories live. Discover now