Partie de Rachel - Chapitre 12

62 8 11
                                    

[TW animaux morts]


Elle ignore si ça deviendra une habitude, mais ce matin, à huit heures, Athéna et elle partent se baigner. Le château se réveille doucement. Elles traversent les couloirs d'un pas vif. Les torches sont en train d'être remplacées. Par les fenêtres une aurore sublime se dessine. Elles ont hésité à l'admirer depuis la chambre, et ont décidé de ne pas attendre. Rachel a beaucoup à faire aujourd'hui. Maintenant que son autorité est définitivement reconnue, elle a beaucoup à gérer. Elle espère pouvoir compter sur Hector – mais Christian l'aidera plus sûrement. Le Valet a besoin de calme et de repos. Elle ne l'a pas revu depuis le banquet de la veille, qu'il a quitté bien plus tôt que tout le monde. Elle passera du temps avec lui aujourd'hui. Elle a l'habitude de le guérir d'un coup, c'est déchirant d'être aussi impuissante. De ne pas pouvoir bander sa blessure et faire en sorte qu'il ne boîte plus dès le lendemain. Elle ne peut que le distraire.

Elle laisse Athéna entrer en première et la rejoint plus tard. Il fait bien plus jour que la dernière fois. Une lumière dorée se déverse dans la salle. Elle fait miroiter l'eau et la faïence d'éclats vifs. Pour lui laisser un peu d'intimité, Athéna se détourne quand elle arrive, mais éclate de rire en l'entendant plonger entière dans la piscine. Rachel sourit au fond du bassin. Elle se propulse à la surface et retrouve Athéna. Elles nagent ensemble, font plusieurs fois le tour de la piscine, s'éloignent et reviennent vers l'autre. Elles discutent avec de longues pauses entre certaines phrases. C'est tout à fait paisible. Peu à peu le silence retombe. Fatiguée de bouger, Rachel s'accoude au rebord, et Athéna fait de même. Pareille à une sirène, elle se met à fredonner la chanson de la veille. Curieuse, Rachel s'enquiert :

– À qui pensez-vous en écrivant ces chansons ?

Elle hausse les épaules, détournant le regard avec une certaine pudeur.

– Je ne sais pas vraiment.

– Vous écrivez comme les mots vous viennent ?

– Je crois, oui. En fait je sais juste qu'il y a beaucoup de moi dedans.

Les joues d'Athéna se colorent d'un rose délicat, comme un écho aux roses du Jardin. Elle amène des fleurs partout où elle va – et Rachel a besoin d'exactement ça. Elle jette un coup d'œil derrière Athéna, là où est caché le carnet. Il est sûrement temps. Elle redoute un peu ce moment – après tout, l'eau est si douce, son murmure si soyeux, elle ne voudrait pas troubler l'atmosphère éthérée. Mais il est sûrement temps. Athéna doit savoir. Après leur promesse, après la chanson d'Athéna, encore une fois, elles se prouvent leur confiance. Elle n'avait jamais connu ça. C'est différent d'avec Hector, peut-être même plus fort. Un lien instinctif. Quelque chose d'unique de tracé entre elles. Qui ne cesse de s'embellir, encore et encore.


Elle lui a donné le carnet. La Dame tenait à lire. À atteindre comme Rachel ce point de non-retour. Quand elles se retrouveront ce soir, elles sauront toutes les deux les mêmes choses. À quel point les Rois les détestent. Elle espère qu'Athéna ira bien, mais si ce n'est pas le cas, elle sera là. Elle lui offrira la présence qu'elle, elle n'avait pas.

Elle attend devant les dortoirs des soldats qu'on lui amène Hector. Il arrive avec un air plus fantomatique que la veille. Elle parvient cependant à le convaincre de l'accompagner à l'extérieur du château. Elle a décidé de se rendre dans les élevages. Quelques naissances ont eu lieu, et elle veut s'assurer de la santé des animaux. Hector marche lentement, derrière elle, la tête baissée. Il ne parle pas – le silence entre eux est pesant. Elle ne songe qu'à le briser, mais renonce à évoquer un sujet léger.

Les ReinesDove le storie prendono vita. Scoprilo ora