Partie de Rachel - Chapitre 14

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Ca parle trauma mais de manière très tranquille donc pas de TW. Aussi, je poste un autre chapitre tout de suite parce que je savais pas trop comment couper .


Deux semaines entières passent, durant lesquelles elles préparent leur expédition. Chaque mot prononcé en vue de cette escapade a un goût piquant de rébellion. Elle rêvait de cela depuis longtemps – l'idée d'enfin en savoir plus la fait vibrer. C'est son unique désir. Elles discutent de leur plan tout en confectionnant leurs vêtements de voyage. Elle se coud une toge courte et fluide. Lorsqu'elles partiront, aucun regard ne se posera sur ses jambes d'abord, et son visage ensuite. Elle se sentira simplement plus à l'aise. Athéna, elle, a eu la témérité de se créer un large pantalon – de loin, on dirait une jupe. Elles ont beaucoup ri quand elle l'a enfilé pour la première fois. Elle ne cessait de dire que c'était libérateur. Rachel lui répétait que ça lui allait bien. C'est un vêtement réservé aux hommes en toute circonstance. Quand Rachel a pu l'essayer, elle a immédiatement compris pourquoi : tout est plus simple qu'avec une robe. Elle aurait pu courir, jardiner, monter à cheval, marcher d'un bout à l'autre du château, sans se sentir entravée. Elle l'a rendu à Athéna en regrettant de ne pouvoir en porter plus souvent. Un jour, peut-être, elle osera.

Elles restent ensemble, beaucoup, pendant ces quinze jours. Elles vont à la bibliothèque et se promènent en forêt quand elles ont le temps. Elles se baignent le matin ou le soir, et plusieurs fois, s'entraînent combat. Athéna prend plaisir à lui apprendre quelque chose. Elle dit que ça change de d'habitude et Rachel lève les yeux au ciel à chaque fois.

– Ce n'est pas vrai. Vous m'avez déjà beaucoup appris.

Et Athéna rougit. C'est une bonne professeure, elle a la patience et la douceur nécessaires pour lui enseigner l'escrime. Le courage lui aurait manqué si Athéna ne l'avait pas poussée à se dépasser. Elle apprécie ces moments. Elle se sent toujours mieux. Il lui semble qu'elle réconcilie son corps et son esprit. Elle n'a plus à dissocier l'un de l'autre, préférer l'un à l'autre : ils se réunissent quand elle se bat. Ils s'allient pour la défendre. C'est une sensation qu'elle n'aurait jamais espéré éprouver. Elle le confie le soir-même à Athéna au sanctuaire :

– Depuis toute petite je m'enferme dans ma tête en priant pour ne plus avoir de corps. Je suis intelligente et ça me suffit, je pensais n'avoir besoin que de mon esprit. Que le reste ne servait qu'à souffrir. Je voulais juste l'oublier. C'est étrange, ces entraînements. Ça me le rappelle. Sans que ça soit trop douloureux.

– Ça l'est un peu ?

– Un peu. Mais c'est surtout agréable. Je me sens mieux. Même dans mon esprit, je me sens mieux. C'est très perturbant. Que mon corps me soit utile maintenant.

– Il vous était utile avant, lui fait remarquer la Dame. C'est vos jambes qui vous menaient à la bibliothèque, c'est vos yeux qui admiraient les fleurs, c'est votre peau qui ressentait la température de l'eau. Il vous aide.

– C'est une jolie manière de voir les choses.

Lors de leur dernier entraînement, Christian les rejoint. Athéna et lui s'entraînent d'abord ensemble. Rachel adore les regarder – la Dame surtout. Elle dégage quelque chose, une force, une puissance, qu'on interdit d'émaner d'elles. Elle n'a pas de grâce légère ou de timidité mignonne. Elle a une volonté audacieuse. Christian perd chaque duel contre elle. Il se met au défi de la battre un jour. Ils s'entendent bien, tous les deux. C'est étonnant de voir Athéna sympathiser avec un soldat de Carreau, et de voir un soldat de Carreau sympathiser avec elle. Quand Rachel se plaint de ne gagner aucun combat contre Athéna, celle-ci la fait s'entraîner contre Christian. Elle commente le duel pour l'aider à s'améliorer. Elle l'aide à corriger sa posture ou lui indique un angle d'attaque. Quand elle n'arrive pas à décrire avec des mots ce qu'elle veut dire, elle vient, avec une grande délicatesse, remonter son bras ou avancer sa jambe. Rachel a l'impression d'être une fleur entre ses mains.

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