Partie de Rachel - Chapitre 9

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C'est le retour de la douceur, elles l'ont clairement méritée. 0 TW !!!



Les soldats se succèdent toute la nuit à l'infirmerie. Rachel n'a pas un seul moment de répit. Malgré sa fatigue, elle s'applique à soigner tous ceux qui viennent la voir. Elle ne leur parle pas de ce qui s'est passé, ni du vote à venir. Elle espère simplement que leur choix sera le bon.

À l'aube, Christian vient la chercher. Tous les Carreaux sont réunis dans la salle du trône. Elle aperçoit Carl, assis sur un banc, entouré de quelques hommes, occupé à panser ses blessures. Il a refusé de venir à l'infirmerie. Ça ne l'a pas dérangée : elle préfère qu'il se tienne loin d'elle.

– Est-ce que tout est prêt ? demande-t-elle.

On lui répond que oui. Deux grandes vases, des carreaux de faïence blancs, et d'autres rouges, ont été disposés sur la table royale. Un paravent a été installé pour garantir l'intimité de chaque votant. Un par un, les hommes y passent et choisissent de glisser un carreau – rouge pour Carl, blanc pour elle – dans l'une des urnes. Ils déposent dans l'autre le carreau restant. Quand vient son tour, elle craint que sa poitrine éclate. Elle tremble en lâchant le carreau blanc au fond du vase. Le tintement résonne longtemps dans son crâne. Son sort et celui d'Athéna dépendent de ces simples morceaux de faïence. Il n'y a plus qu'à attendre.


Deux enfants sont tirés au sort pour faire le décompte. La patience de Rachel s'amenuise en une seconde, comme une feuille jetée au feu. Chaque voix est comptée avec lenteur, il lui semble qu'elle voit la scène passer au ralenti. Ni Carl ni elle ne parvient à prendre de l'avance sur l'autre. Les carreaux ont beau s'amonceler peu à peu sur la table, pour chaque voix qui les départage, une autre les ramène à égalité. Christian est assis à côté d'elle, et ne desserre pas les poings. Si le Cavalier gagne, il peut être certain de payer d'une manière ou d'une autre sa loyauté à Rachel. Une tension immense brûle dans la pièce, invisible incendie. Elle est au bord de l'asphyxie. Au bout d'une éternité, de la voix la plus fluette, l'enfant annonce :

– Victoire de Dame Rachel.

Et son cœur explose. Elle s'efforce de rester humblement impassible, mais au fond d'elle elle hurle de joie. Christian se détend. Carl s'offusque et vient recompter. Elle soupire. Elle gagne l'estrade, le trône. Pose un regard épuisé sur la foule.

– Merci de votre confiance. J'en serai digne.

Ce n'est pas une promesse : c'est une affirmation. Elle s'incline. Quelques soldats l'applaudissent, et le reste suit, sans trop de bruit. Elle s'en contentera. Elle est ravie qu'ils aient changé d'avis, et qu'il n'ait fallu qu'un discours de sa part. Apparemment, elle a trouvé les mots.


Elle court dans les couloirs pour rejoindre Athéna. L'attente doit être insoutenable pour elle. Elle lui ouvre dès qu'elle frappe à la porte. Ses yeux bleus et soucieux se fendent quand Rachel déclare :

– Nous avons gagné. Je suis la remplaçante de César, officiellement.

Elle éclate de rire, et la Dame à son tour. Rachel ouvre ses bras à Athéna, qui s'y jette. Elles s'étreignent avec la force des vainqueurs. Rachel lui murmure :

– Merci d'être venue, Athéna.

Elle n'ose penser à ce qui se serait passé sinon.

– Je suis heureuse d'être arrivée à temps. Et de pouvoir... vous rendre ce que vous avez fait pour moi, Rachel.

Les ReinesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant