Chapitre 20

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Toch était une ville étroite, où de petites maisons de briques semblaient s'enrouler sur elle-même, en une étourdissante spirale qui menait au port. Ce dédale de rue sinueuses étaient entouré de grands champs qui rappelaient à Eida la Lande et son village.

Comme l'hiver s'installait définitivement sur les terres du pays et que les chemins risquaient d'être impraticables avec l'arrivée de la neige, Jenna décida de rester près de Toch jusqu'à la fonte des neiges. Plein d'entrain, il choisit un large pré dans lequel il voulait s'installer.

Eida, perplexe, le laissa faire, incapable de deviner ce que le jeune homme avait derrière la tête. Elle ne comprenait pas comment ils pourraient survivre à l'hiver dans un simple champ. Il leur fallait un toit et une cheminée, mais cela ne semblait pas inquiété Jenna. Alors, confiante, elle le suivit sans un mot, admirant la beauté de la nature endormie. C'est alors que Jenna s'arrêta devant un arbre dénudé et s'exclama, un sourire aux lèvres :

–  Ici, c'est parfait !

Eida le dévisagea, surprise. Elle voulut protester mais, le voyant examiner le tronc de bois avec précision, elle se ravisa et attendit qu'il s'explique. Jenna se redressa et lui sourit.

–  Pourrais-tu t'écarter un peu, Eida ? J'en ai pour une minute ! lança-t-il avant de se tourner vers Timothée. Tu veux bien me donner un coup de main, toi ?

–  Avec plaisir !

Étonnée, Eida recula de quelques pas, se surprenant à obéir sans poser de question. Elle vit Jenna se retrousser les manches et faire apparaître dans sa main un crayon d'une blancheur éclatante. Elle l'avait rarement vu utiliser ses pouvoirs mais, à chaque fois, elle était envahie par un drôle de sentiment, comme un émerveillement doux et soudain.

Avec agilité, Jenna dessina un symbole lumineux, complexe et hypnotisant, sur le tronc de l'arbre, tandis que Timothée creusait de petits trous tout autour. En les voyant faire, Eida prit conscience de ce lien invisible mais si puissant qui unissait l'homme et le chat. Ils avaient beau se détester l'un comme l'autre, il y avait une unité au-delà des apparences qui semblait les rapprocher... La magie qui coulait dans leur veine.

Une fois que l'animal eut terminer, il allait s'asseoir aux pieds d'Eida, qui observait la scène, aussi perplexe qu'excitée. Jenna avait posé sa main au centre du symbole et avait fermé les yeux. Une brise éphémère caressa ses cheveux, les agitants dans la faible lumière du soleil, dont les rayons se glissants dans ses boucles fauves se transformaient en cascade dorée. Ce souffle infime créé de toutes pièces par le magicien semblait palpiter autour de lui en une valse désordonnée.

C'est alors que l'arbre se mit à grincer, à craquer et à pousser. Il atteignit en très peu de temps une taille gigantesque, son tronc devenant aussi large qu'une maison. Les yeux écarquillés par la surprise, Eida vit s'ouvrir dans l'écorce des fenêtres, que des vitres de verres jaunis bouchèrent aussitôt. Sous la main de Jenna, une porte apparut brusquement, ornée d'une poignée dorée.

Eida n'en croyait pas ses yeux. Son cœur s'était emballé tandis que son cerveau essayait d'analyser ce qu'elle voyait. Une puissance invisible régnait dans l'air ; Elle crut un instant qu'elle dormait profondément dans son vieux lit, en haut de la petite colline ; qu'elle avait rêvé cette rencontre, ce voyage, tous ces sentiments qui s'étaient ravivés en elle...

Par la seule force de ses pouvoirs, Jenna venait de faire d'un arbre une maison. Eida en eut le vertige. Mais d'où provenait ce miracle ? Hébétée, la jeune fille était paralysée par l'évidence. Si Jenna était capable de telles prouesse, le Monde Flottant existait bel et bien.

Elle tentait de se faire une raison quand le magicien rouvrit les yeux, une expression fatiguée marquant son visage, balayée par la joie presque enfantine qui pétillait dans son regard. Il ouvrit la porte et s'inclina légèrement en direction d'Eida.

Le Monde Flottant [EN PAUSE]Unde poveștirile trăiesc. Descoperă acum