Chapitre 15

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- Comment le sais-tu ?

Mon interpellation résonnait dans l'air, empreinte d'une froideur qui s'était insinuée entre les mots, et le tutoiement, tel un fugitif, s'était échappé de mes lèvres avant que je ne puisse le rattraper. Un instant de regret m'étreignit, conscient que Yoongi n'était pas particulièrement enclin aux échanges verbaux, et que je risquai de le braquer. Étonnamment, il ne fit pas état de ma brusquerie.

- Il est en B16 jusqu'à la semaine prochaine, déclara-t-il d'une voix sobre.

Les sourcils légèrement froncés, je tentais de percer le mystère de cette référence obscure.

- En B16 ? murmurai-je, comme si prononcer ces deux caractères mystérieux pouvait dévoiler une réalité cachée.

Il inclina la tête légèrement, une expression sérieuse s'installant sur son visage.

- C'est la salle de confinement de l'hôpital. Tu sais, ces vieilles pièces blanches, dépouillées, où il n'y a rien d'autre qu'un lit en fer, équipé de liens pour nous attacher si notre comportement ne leur convient pas ?

La parole, d'ordinaire parcimonieuse chez Yoongi, se déversait à présent, et ses descriptions me faisaient frissonner. Cependant, lui, dévorait son repas comme si ses révélations n'étaient que banalités, et je crus même déceler une pointe d'humour dans ses paroles.

Un froncement de sourcils témoigna de ma perplexité.

- Ces salles ont été interdites en 1998 en raison de leur impact sur la dignité des patients, récitai-je machinalement, comme si cette règle apprise dans mes livres était devenue un mantra gravé dans ma mémoire.

Le regard de Yoongi se leva de son plateau pour se verrouiller avec intensité dans le mien.

- À moins que l'hôpital concerné n'ait obtenu un arrêté ministériel permettant leur utilisation.

Mes yeux tanguèrent, déstabilisés par cette révélation inattendue. Une exception de cette envergure ne faisait pas partie de mon bagage d'informations.

Ce genre pièces, évoquées uniquement dans les vieux films coréens, étaient souvent mises en scène comme étant le théâtre de scènes abominables. Le patient, entravé, se voyait réduit à sa pathologie, privé de toute autre action. C'était une humiliation, une pratique décriée pour ses effets néfastes au siècle dernier, engendrant notamment une propension à sombrer dans la psychose pour tuer le temps. Enfermer quelqu'un là-dedans pendant une semaine représentait un acte de destruction majeur, en opposition totale au serment du professionnel de santé.

Primum non nocere, tu ne nuiras pas à ton patient.

- Tu ne me crois pas.

Le reproche résonnait dans sa voix, teinté d'une pointe de déception, et je n'eus ni l'énergie ni la volonté de réfuter. Frustré, Yoongi se leva et migra vers une autre table, m'abandonnant à mes pensées.

Avant de partir, il me lança un avertissement en suspens :

- Si j'étais toi, je ne le dirais pas à Jimin.

Ce fut la dernière fois que j'eus affaire à un Yoongi aussi bavard.

















Émergeant du self, je me heurtai à Namjoon, qui semblait m'attendre. Il m'informa abruptement que tous mes rendez-vous de la semaine avec Taehyung étaient annulés, ne fournissant aucune explication, comme si la simple déclaration suffisait, et cela me fit froid dans le dos. Yoongi disait-il la vérité sur le possible arrêté ? Comment cela se faisait-il que ce n'ai toujours pas fait scandale ?

Dans ma confusion, un doute supplémentaire se rajouta, quant à la fréquence étonnante des rencontres fortuites avec Namjoon à la sortie du self – une coïncidence qui commençait à prendre des allures bien trop régulières.















Mon après-midi libre s'étira, et je la passai assis sur mon lit avec un oreiller calé derrière mon dos. Ma première tentative de productivité se tourna vers la vérification de cette histoire d'autorisation d'état et la recherche sur les salles de confinement, mais mes investigations ne dévoilèrent rien de plus que ce que je connaissais déjà.

Une frustration supplémentaire qui s'ajouta à celle découlant du cas d'Hoseok, des mensonges entrelacés, des non-dits palpables, du stress inhérent au premier emploi, de Taehyung qui demeurait énigmatique et absent, de Jimin que je devrais gérer seul le soir, de Namjoon dont l'attitude étrange me préoccupait, et de mon absence de relations véritables au sein de cet hôpital.

Quand je m'en aperçus, les larmes avaient déjà pris le dessus.

J'avais craqué.

Je cédai à l'émotion, composant le numéro de ma mère, une action que je détestais profondément.

Elle se contenta de m'écouter, parce qu'elle ne savait jamais trouver les bons mots.





























Et lorsque je pénétrai dans la chambre de Jimin ce soir-là, portant un plateau orné de spécialités coréennes, l'atmosphère me souffla immédiatement que je n'étais pas le seul à avoir craqué aujourd'hui.

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⏰ Last updated: Dec 03, 2023 ⏰

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PSY, SNAKE AND DOLL [VMINKOOK//VKOOKMIN]Where stories live. Discover now