11 - Crescendo

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Guillaume Guillery se réveilla à l'intérieur de l'une des chambres du Manoir du Houx, dans un lit confortable et chaleureux. Il resta allongé quelques minutes, les yeux fermés, à se demander si les dernières heures qu'il avait vécues étaient bien réelles. Finalement, il se leva et attrapa des vêtements qui lui semblaient étranges, d'un temps qui n'était pas le sien. Il ricana, en se disant que le futur, ce présent-ci, serait peut-être son âge d'or. Le soleil se levait à peine et la pénombre était quasi omniprésente dans la pièce. Il tâtonna autour de lui pour s'habiller, refusant catégoriquement de se servir de cette étrange magie, que Romina appelait "électricité". Quelqu'un frappa à la porte ; il ouvrit et fit face au visage pâle et lugubre du serviteur albinos.

— Une collation vous attend dans la cuisine. Ensuite, votre présence est requise au premier étage.

Guillery, toujours fier et suffisant, regarda nonchalamment l'employé de maison dans les yeux. Sans vraiment pouvoir l'expliquer, il n'éprouvait guère de sympathie pour cette personne. Et, aussi étonnant que cela puisse paraître, c'était un homme encore plus froid et désagréable que l'était le brigand lui-même. Sans attendre de réponse non plus, et n'étant pas adepte des jeux de regards puérils, le serviteur tourna les talons et descendit aux étages inférieurs. Guillery le suivit quelques minutes plus tard, se sustenta et retrouva donc Romina dans une pièce du premier étage. Il se retrouva au milieu d'objets mystérieux qui dégageaient de la lumière et des bruits inhabituels aux yeux et oreilles du vaurien. Des sbires étaient assis et faisaient claquer leurs doigts sur de petits carrés noirs, lesquels étaient marqués des lettres de l'alphabet.

— Monsieur Guillery, comment allez-vous ?

— Perplexe, maugréa simplement l'intéressé.

— Cette salle sert de poste d'observation numérique. Nous récoltons des données en ayant accès aux conversations et aux recherches de personnes cibles. Nous pensons que cela peut nous aider à obtenir des informations sur le potentiel élu, dont nous avons parlé.

Guillery fixa son hôtesse, haussa mollement les sourcils et siffla dans un soupir:

— Je n'ai strictement rien compris à c'que vous venez de déblatérer.

— Bien sûr. Comprenez seulement que nous nous servons d'outils pour espionner la vie de quelques personnes.

— On a le droit de faire ça ?

— Oh, la légalité, c'est subjectif. Je suis étonnée que vous vous inquiétez de cela ! De toute façon, toutes les grandes industries le font, maintenant. Venez avec moi.

Ils sortirent de la pièce et longèrent le couloir qui contournait l'imposant escalier. Sur leur chemin, Guillaume scruta les autres salles qu'ils dépassaient. Il remarqua une impressionnante bibliothèque, une chambre qui avait été transformée en vaste penderie, qui abritait des tenues paramilitaires, ainsi que ce qui semblait être un laboratoire.

— Il est important de distinguer les concoctions mortelles, des simples poisons douloureux, expliqua Romina avec un sourire en coin.

Avant de poser à nouveau le pied sur une marche, le brigand s'arrêta devant un immense tableau qui recouvrait une grande partie du pan de mur sur lequel il était accroché. Il représentait un grand homme presque nu, tenant un serpent dans une main et un collier en métal dans une autre.

— C'est quoi ce foutriquet ? se moqua l'homme du passé.

— Il s'agit de notre seigneur, pathétique vaurien ! répondit Romina, très courroucée.

— Oh c'est donc lui Cernunnos.

— En effet, ceci est une représentation de son iconographie la plus célèbre, sur le Chaudron de Gundestrup. Nous avons essayé de nous emparer de ce contenant, croyant qu'il nous serait utile pour invoquer le Dieu Cornu, mais il a été subtilisé au musée qui le possédait, il y a quelques années. Venez, suivez-moi, je dois vous montrer quelque chose qui sera probablement plus interessant pour vous.

KENTAN, Tome 1 : Demain est une autre NuitWhere stories live. Discover now