Chapitre 12 : Correspondance

Depuis le début
                                    

J'imagine que pour toi, c'était différent. Je crois que je t'envie un peu. J'aurais aimé pouvoir être aussi bien entouré que toi. J'ai bien un cousin par ma grand-mère qui est un peu plus jeune que moi et lui aussi gay, mais nous n'en avons jamais parlé. De toute manière, il n'est absolument pas out. Il mène presque une double vie entre l'entreprise familiale et le monde moldu où vit son compagnon. J'aurais aimé avoir droit à des modèles comme toi.

Je pense que cette lettre est déjà suffisamment longue aussi je vais m'arrêter là. J'espère que tu ne regrettes pas de m'avoir écrit.

Amicalement,

Drago.

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Drago,

J'avoue avoir eu peur que tu ne me répondes pas. Mais je comprends que tu aies eu besoin de temps. Cette fois, je vais utiliser la Poste moldue pour ne pas pénaliser Ron et Hermione. Ils n'étaient pas ravis de voir Plume disparaître deux semaines entières.

Je vais plutôt bien. Tu sais, quand on va mal pendant très longtemps, on a du mal à identifier les moments où ça va. Pour moi, aller bien est devenu synonyme de ne pas aller mal. Je commence à rapprendre la différence significative entre aller bien et ne pas être mal à en crever.

Effectivement, j'arrive à retourner en monde sorcier. Je pense que je ne pourrais jamais y vivre comme un sorcier normal, parce que je ne le serai jamais, mais réussir à me rendre sur le Chemin de Traverse est déjà un gros progrès. Je prends conscience d'à quel point le monde sorcier m'a manqué. J'ai passé mon enfance chez les moldus aussi la vie moldue n'a jamais été un problème pour moi. J'y suis habitué. Pendant des années, la magie a été associée à la guerre, la mort, la douleur. Mais ces derniers mois, j'ai l'impression de revivre mes premières années de sorcier. J'avais oublié à quel point la magie pouvait être merveilleuse et belle.

Merci pour ton honnêteté. Je ne te cache pas que ça me fait mal de savoir que tu avais autant envie que moi qu'il se passe quelque chose. Je ne peux pas m'empêcher de repenser à nos baisers, c'est plus fort que moi. J'avais l'impression d'enfin toucher du doigt ce que j'avais toujours voulu. Mais sans doute as-tu raison, c'était déjà trop tard. Peut-être que si j'avais serré ta main en première année, ça aurait été possible. Je ne sais pas. Je te rejoins sur un point : maintenant il faut avancer. Ne plus regarder en arrière.

J'aimerais quand même qu'on puisse continuer à s'écrire. Ça me fait du bien, plus que je ne l'aurais imaginé. Je sais très bien que nous ne serons jamais les meilleurs amis du monde et peut-être que notre correspondance finira pas s'essouffler d'elle-même, mais je crois que j'ai besoin de voir que je suis capable de parler avec toi, et qu'en un sens il est possible de réparer un peu ce lien entre nous.

Tu dis qu'il n'y a jamais rien eu entre nous, mais c'est faux. Au contraire, il y a eu beaucoup de choses. Évidemment, ça n'avait rien d'une amourette de lycée banale. Mais tu n'as pas le droit de dire qu'il n'y avait rien. Il y a eu de la haine, de la jalousie, de la colère, du désespoir. De l'entraide aussi. Et oui, aussi de l'amour, même si ni l'un ni l'autre ne savions que nos sentiments étaient partagés. Je n'ai pas peur de le dire, tu reste une des personnes les plus importantes dans ma vie. Depuis mon entrée à Poudlard, tu as toujours pris une place énorme. Ce n'est pas parce que ce lien n'était pas positif et très loin de l'amitié qu'il n'a pas existé. Je ne peux pas penser à ma scolarité à Poudlard sans penser à toi. Tu as toujours été là. Et même après.

Je ne comprends pas pourquoi tu dis que c'était différent pour moi. Je n'ai pas eu de modèle non plus. Je pense que tu te fais une idée fausse de la vie à Gryffondor. On n'en parlait pas. J'ai su presque deux ans après Poudlard que Dean et Seamus, qui étaient pourtant mes camarades de dortoir, étaient sortis ensemble en secret. Effectivement, je ne pense pas que ça se serait mal passé si j'avais parlé de mes doutes avec eux, mais ça ne se faisait pas. Et puis, le seul garçon qui m'attirait, c'était toi. Je n'ai jamais pu en parler à personne.

Toutes ces choses qu'on ne s'est pas ditesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant