23. Attention

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ZOÉ

Je m'étire.

Il est quatre heures du matin.
Le soleil se lève à peine.
Je suis sur le terrain de papa.

Je m'apprête à m'entraîner pour la première fois depuis des mois, voire la première fois depuis l'an passé. Je veux tranquillement me reprendre en main. Je veux redevenir Zoé Carpenter, meilleure danseuse de ballet du théâtre de danse de Montgomery.

Là, en ce moment, je suis plutôt Zoé Carpenter, meilleure ex-junkie addict au fentanyl de Montgomery.

Deux réalités différentes qui sont inter-reliées malgré tous mes efforts pour faire le contraire.

Je vais vivre avec, j'imagine.
Comme tout le reste.

Je mets mes écouteurs sur mes oreilles en étirant mes chevilles en leur faisant faire des petites rotations. Je réponds rapidement à un message de Donovan que j'ai loupé hier, m'étant endormie sur mon téléphone en lui parlant. Puis, je lance ma playlist en laissant mon regard me perdre au loin sur le champ de coton énorme de mon père. J'enfonce mon téléphone dans la poche dissimulée dans mon legging et ajuste la bretelle de mon soutien-gorge de sport sur mon épaule.

Et je commence à courir.

Lorsque l'on s'entraînait au théâtre, on commençait toujours par un footing infernal. Puis on faisait des étirements et de la gymnastique jusqu'à ce que nos jambes et nos articulations soient suffisamment souples pour les pas de danse complexes du ballet. C'est d'où je tire mon inspiration aujourd'hui.

Si je veux réintégrer le théâtre, il va falloir que je m'entraîne tous les jours avec une ardeur équivalente à deux fois celle que je mettais en cours. Ça va être la mort.

Et je suis déjà en train de mourir après cinq minutes.

Merde, Zoé, tu es devenue nulle.

Ma sonnerie me vrille soudain les oreilles lorsqu'elle résonne dans mes écouteurs.
En grimaçant, de mon index, j'appuie sur mon écouteur droit pour prendre l'appel.

— Ouais ?

— Qu'est-ce que tu fais debout à quatre heures du matin, toi ?

J'ai un sourire haletant en entendant la voix grave et basse de Donovan dans mes oreilles.

— Je... pourrais te poser... la même question.

— Tu cours ou quoi ?

— Ouais.

Je saute par-dessus une grosse branche en sentant mes poumons me brûler.
Ça fait beaucoup trop longtemps.

— Je m'apprêtais à m'entraîner aussi, me dit-il avec un sourire dans la voix.

— Hum... cool, haleté-je en sentant les muscles de mes mollets se désintégrer.

Putain ce que je suis devenue merdique.

Et en plus, je lui balance des réponses à la con.

— Est-ce que... tu veux que je te rejoigne ?

Surprise, je m'immobilise aussi sec, enfonçant brusquement les semelles de mes chaussures dans la terre

Arrest Me - T2Où les histoires vivent. Découvrez maintenant