Chapitre 3

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(ERRATUM : le chapitre 2 a été modifié aujourd'hui 19/1/2020, à lire avant de poursuivre !)


Bajant conduisit Nathanael à la chambre de son époux sans plus attendre, alors que Gradaille, après avoir veillé à ce que les visiteurs indésirables soient bien évacués, passait un coup de fil.

« Il ne va probablement pas réagir à votre présence, M. Anthème... Il ne va même sûrement pas vraiment vous voir... Ce n'est pas... Comment dire... »

Nathanael avait beau savoir qu'elle ne cherchait qu'à le ménager, ça ne faisait que le stresser davantage.

« ... Il ne vous a pas oublié, vous ne devez pas en douter, mais il faut considérer que pour le moment, il est en état de choc et que son esprit est en quelque sorte... Enfermé au fond de lui... Pour y être au calme le temps de se réparer... »

Elle s'arrêta devant une porte et se tourna pour le regarder :

« Vous risquez vraiment d'avoir un choc, M. Anthème...

– Je suis prêt, Docteur. Ou plutôt, je pourrais pas l'être plus... Alors, si on pouvait y allez, s'il vous plaît ? » répondit-il avec un sourire triste.

Elle sourit et hocha la tête. Elle ouvrit la porte et se poussa pour le laisser entrer, ce qu'il fit sans hésiter ;

La chambre était petite et claire, le soleil éclairant une partie du sol et du mur blanc, ainsi que le pied du lit.

L'homme aux courts cheveux grisonnants qui se trouvait assis dans ce lit était très maigre, presque décharné. Il regardait dans le vide de son œil bleu-vert, désormais unique, un bandage couvrant l'autre. Sa main droite était elle aussi bandée avec soin. La gauche était serrée sur le drap, un peu tremblante.

Nathanael avait eu la sensation de se prendre un bon crochet dans le ventre en le voyant. Il en eut le souffle coupé un instant.

Il se reprit et s'avança lentement. Comment l'homme qu'il aimait avait-il pu devenir ainsi en cinq semaines ?...

Il déglutit en voyant, sous le drap, la jambe droite et ce qui restait de la gauche, un moignon bien trop court.

Il avait le sentiment confus de regarder une statue de sable qui risquait de s'écrouer à tout instant.

Il s'arrêta près du lit, les larmes aux yeux.

« Coucou, mon cœur... » murmura-t-il en les ravalant.

Le blessé n'avait pas bougé, à l'exception de sa main qui tritura le drap. Nathanael nota la chose et s'assit tout doucement au bord du lit. La main tritura à nouveau le drap.

Nathanael regarda ce visage maigre et blafard, ce regard perdu, ces cheveux blanchis... Il leva une main tremblante pour caresser sa joue :

« Adel ? »

L'œil bleu-vert ne bougea pas. Nathanael trembla et n'y tenant plus, serra brusquement et avec force le corps amorphe dans ses bras en se mettant à pleurer.

Adel avait eu un léger sursaut.

Nathanael inspira un grand coup et se reprit. Il serra plus doucement son mari dans ses bras, soupira et lui dit doucement :

« Tu m'as manqué, tu sais... J'ai eu très peur... »

La tête grisonnante se pencha pour se poser sur son épaule.

« Ça va aller, mon amour. Ça va aller... Je sais que tu vas te remettre... Et ça prendra le temps que ça prendra... Ne t'en fais pas, je suis là. Tout va bien se passer ; »

Le Petit PapillonOù les histoires vivent. Découvrez maintenant