Chapitre 52

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Nathanael entra dans la pharmacie avec lassitude et le voyant, sa pharmacienne, qui le connaissait de longue date et avait, bien obligée, suivi l'évolution médicale d'Adel, le salua poliment, un peu inquiète. Il répondit en retenant un bâillement, avant de lui tendre deux ordonnances.

En y regardant de plus près, elle vit qu'il avait les yeux un peu gonflés, le nez rouge et il toussa.

« Ah, votre petite sinusite annuelle ? sourit-elle.

– Ouais, répondit-il. Vous me filerez de quoi faire des inhalations et des pastilles pour gorge, aussi, merci, en plus de ça...

– Bien sûr. »

Elle regardait les deux ordonnances et fronça les sourcils :

« Oh, je vais devoir vous commander l'anxiolytique... Ça ira ?

– Oui, oui, si vous pouvez me l'avoir pour vendredi ?

– Sans souci, je vous l'ai demain.

– Ça sera parfait. De toute façon, il ne m'en faut qu'en réserve, au cas où Adel fasse une grosse crise. J'espère que je n'en aurais pas besoin.

– Oui, c'est à prendre au cas par cas, les médecins vous l'ont expliqué ? Il faut éviter de le prendre régulièrement. »

Nathanael toussa en hochant la tête.

« Oui, oui... C'est juste qu'il a fait une petite crise et que la psychiatre nous donne ça en roue de secours, mais elle nous a bien dit que c'était vraiment à réserver aux grosses. »

Elle le regarda, navrée :

« Je croyais qu'il allait mieux...

– Oui, il va mieux. Mais ponctuellement, ben... Il reste un homme avec un gros syndrome post-traumatique, donc ça peut re-péter à la moindre étincelle et là, c'est ce qui s'est passé... Rien de grave, on savait que ça arriverait un jour ou l'autre, mais c'est pas pour ça que c'est cool...

– Je veux bien vous croire... »

Une autre cliente entra, jeune maman avec une poussette énorme dans laquelle gazouillait un bébé et une fillette bien peu encline à se tenir tranquille. La pharmacienne alla rapidement chercher ce que Nathanael lui avait demandé, commanda le reste, il paya le tout et elle lui sourit avec compassion :

« Et ben, bon courage à vous avec tout ça !

– Merci, bonne journée à vous et à demain, donc. »

Il repartit, maussade.

Adel avait été calme et son état évoluait bien depuis des mois. Nathanael s'en était pris à espérer que ça allait continuer à aller.

On était mi-décembre et comme chaque année, l'association avait organisé sa petite fête de fin d'année, suffisamment en amont pour ne pas déranger l'organisation des « vraies » Fêtes pour ses membres. C'est donc le samedi 7 décembre après-midi, profitant du weekend des Lumières, que c'était tombé, cette année-là.

Si les conversations tournaient un peu autour de cette fameuse épidémie chinoise qui n'inquiétait alors pas grand monde en Europe, on parlait surtout des projets de Noël et des vacances d'hiver à venir.

Adel était là, assis au comptoir. Nathanael faisait tranquillement le service, espérant que les gens ne traîneraient pas trop tard, car il savait son mari fatigué et l'était également. D'ailleurs, Adel était stressé par la promiscuité et le bruit. Il avait insisté pour venir lorsque Nathanael lui avait proposé de rester tranquillement à la maison et que lui y aille sans lui, sans doute parce qu'il ne voulait pas rester seul chez eux.

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