qnic. (just as)

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Violette est allongée au sol. Les bras étendus vers les murs, les jambes repliées, soudées l'une à l'autre. Ses cheveux forment une couronne, un disque solaire au dessus de son visage déjà plutôt angélique. Ses yeux verts cherchent un peu partout. Ses lèvres se séparent, se serrent l'une contre l'autre, laissent sa langue les traverser. Son nez renifle un peu. Ses joues perdent du rose qu'elles arboraient quand elle a sonné à la porte. Violette est belle, vraiment belle.

Jimin assis sur son lit la regarde, d'en haut, comme s'il était un nuage. Puis il descend de ce piédestal, et vient s'allonger comme il peut à côté d'elle, la tête au niveau de ses jambes, et inversement. Violette resserre un peu ses bras pour qu'ils aient toute la place qu'il faut. Jimin met un peu de musique, douce. Violette tourne la tête et l'observe, des yeux étoilés, un peu brillants. Elle rit, Jimin la regarde drôlement, elle rit plus encore.

Des t-shirts et des pulls les entourent tout partout, tâches de couleurs qui les environnent. Du jaune, du rouge, du bleu, du vert. Et comme ça, Violette se dit que Jimin est vraiment capable de porter des jolies choses.

Jimin la voit regarder un peu partout, se dit que ce n'est pas très rangé mais qu'après tout, toutes ces couleurs, ce n'est pas si laid. Il se dit qu'il n'a pas envie de cacher son désordre, pas à Violette, qui se met à parler, en souriant, en regardant toutes ces couleurs, puis le plafond.

« Parfois, quand j'étais petite, je m'allongeais par terre. Juste comme maintenant. Et je m'imaginais que j'étais collée au sol. »

Jimin la toise. Ses lèvres remuer doucement, ses cils presque-roux se courber lentement, ses yeux briller légèrement.

« Je pouvais plus m'en décrocher, c'était impossible. Ça agaçait ma mère, parce que je pouvais rester des heures comme ça. J'en refusais de manger, des fois. Mais le plus drôle, c'est qu'elle m'a jamais demandé pourquoi. Elle faisait que dire que j'étais bizarre. »

Puis elle rit, encore. Jimin ignore si c'est d'elle-même qu'elle se moque ou de sa mère, ou bien du plafond, ou bien du monde. Jimin ne demande pas. Pour une fois, il aime ne pas savoir. Un silence s'installe, un silence duquel le garçon blond ne veut pas fuir. Un silence dans lequel il se sent bien, vraiment bien, et léger, comme un nuage.

« -Demande-moi pourquoi. »

Jimin sourit légèrement, puis fait ce qu'elle attend de lui.

« -Pourquoi ?

-Je sais pas. Pas vraiment de raison. »

Elle se redresse.

« Mais elle aurait au moins pu se poser la question, non ? »

Un oiseau passe près de la fenêtre, Jimin tourne la tête. Il regarde la trace qu'il laisse dans le ciel, avant de répéter :

« -Pourquoi ?

-Je te l'ai déjà dit, rit-elle.

-Non. Pourquoi t'es venue ? »

Violette rougit. Jimin a cet air sérieux, curieux, insatiable. Il fouille dans le fond de ses yeux, pour y trouver une réponse. Et tout au fond de ce regard curieux, comme un pétale égaré : un peu de satisfaction.

« -Je sais pas, bafouille-t-elle. »

Pause.

Merci de te poser la question.

Elle se relève.

« -Mais je peux repartir, si tu veux.

-Comme un voleur de couleurs..

-Quoi ?

-Non. Rien. »

Elle rit, Jimin fronce un peu les sourcils avant de lui rendre un sourire honnête. Ils regardent par la fenêtre, le bleu pur et frais. Ils se disent que c'est joli, ils se disent que ça ferait une belle couleur à conserver quelque part dans le cœur. En tout cas, Jimin le pense. Le temps passe et ils ne disent pas grand chose. Le silence leur fait du bien, et Jimin se répète pourquoi. Pourquoi, pourquoi, pourquoi. Il se demande si c'est important de connaître la raison de chacun de ses actes, ou de ses pensées. Il se demande si c'est important de la trouver. Si c'est important de chercher à la connaître, même si elle n'est pas utile, ou qu'elle n'existe pas.

Quand il tourne la tête vers Violette, celle-ci est devant sa table de nuit. Elle observe un livre, un livre à la couverture rouge. Et Jimin se demande s'il faut chercher à savoir pourquoi l'univers a fait que c'est cet objet particulier qu'elle a décidé d'observer.

« -J'adore ce livre, lâche-t-elle dans un soupir satisfait.

-Vraiment ?

-Vraiment. »

Jimin souffle du nez. Il ne l'a pas encore terminé. Il hausse les épaules. Et le rouge de l'été traverse ses pensées, mais cette fois-ci, il est certain qu'il est inutile de chercher quelconque explication. Peut-être que parfois, les choses n'ont pas de sens, mais que c'est mieux comme ça.

Il replonge son regard dans le bleu frais. Mais il paraît déjà plus chaud. Et soudainement, tout semble s'harmoniser. Tout semble à sa place. Le bleu ne paraît pas trop froid. Le soleil ne paraît pas trop faible. Le silence n'a pas l'air lourd ou étrange ou trop brutal. Et c'est drôle, toute cette mélodie qui s'installe. C'est drôle, comme soudainement, on peut tout oublier sans même y penser.

Sauf que l'harmonie s'échappe aussi rapidement qu'elle s'est posée sur le voile de son esprit, quand Jimin remarque que les cheveux de Violette ne sont ni bruns, ni désordonnés, ni plutôt courts.

Quand elle part, il la remercie d'être passée. Puis il observe son dos, ses cheveux qui viennent en caresser le haut, son pull qui le fortifie, ses bras qui lui donnent sens. Cette harmonie qu'il transporte et qu'il apporte. Il ferme la porte, et passant par la cuisine, il jurerait avoir vu une pêche.

Jimin passe la soirée allongé à terre, à observer le ciel fictif de son plafond, à penser au livre rouge, sans pouvoir se décrocher du sol.

Et surtout, sans se demander pourquoi.

Les Palmiers bleus - HopeminWhere stories live. Discover now