12 - Poésie, rupture et excuses

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Dans la cuisine des Wheeler, l'ambiance était lourde. Chaque seconde qui s'écoulait, ponctuée d'un battement du pied de Billy contre celui de la table, était une torture pour Steve. Depuis la fête, ils ne se regardaient même plus et Steve s'en voulait. Il aurait préféré que le californien soit en colère contre lui, mais non, celui-ci semblait simplement ne plus vouloir avoir affaire à lui. Aussi, comme une chape de plomb qui pesait lourd sur le crane de Steve, le silence s'abattait sur eux des qu'ils se retrouvaient seuls, se qui arrivait hélas bien souvent. De plus en plus, les "pré-ados" préféraient rester seuls et Steve ne pouvait pas leur en vouloir, même si cela lui faisait un peu mal au cœur. A leur age, il n'aurait pas non plus voulu d'un baby-sitter mais se dire "à leur age" lui donnait un terrible coup de vieux. 

Il hésitait à sortir de son sac ses écouteurs, pour éloigner ce maudit silence, et en même temps il se rendait bien compte que ce serait non seulement impoli, mais surtout que cela ne réglerait rien, qu'il fallait qu'il s'excuse. Pourtant, presque sans qu'il s'en rende compte, ses écouteurs se retrouvèrent enfoncés dans ses oreilles et "No surprises" emplit tout son corps tandis qu'il se mettait à écrire. 

Le silence bourdonne comme une bête inquiète

Et immense de vertige fait trembler  ma tête

Jusqu'à mon cœur.

Il remplit tout de son écrasante immobilité

Et j'en sens sortir lourd et plein de rancœur

Le néant de l'éternité.

Alors le trou noir qui vit au fond de mon âme

Et qui se nourrit de lui rit et l'acclame 

En grandissant encore.

Je le sens qui dévore sans se rassasier 

Les quelques brides d'espoir qu'il me restait,

En riant encore.

Alors moi aussi je ris, mais le résultat est boiteux

Car le néant ne veut pas du rire du malheureux

Car personne ne veut du rire du malheureux

Ce rire qui fait monter les larmes aux yeux.

Et voilà, quelques mots jetés sur un vieux cahier et il se sentait déjà mieux. D'un geste machinal il en tourna les pages, sur lesquels s'alignaient des lignes et des lignes de son écriture brouillonne, presque illisible même pour lui. Il y en avait beaucoup plus qu'il ne le pensait. C'était tout ses démons, pour un temps exorcisés, qui étaient prisonniers entre ces lignes trop penchées, qui fuyaient sur le papier comme si ils tentaient de s'en échapper. Des fois, il se disait que si il pouvait faire cela toute la journée, sa vie serait presque belle, mais il ne savait pas si ses poèmes valaient qu'il décide de leur consacrer sa vie.

Relevant la tête, il surprit le regard de Billy posé sur lui. Le californien se détourna vivement, mais Steve avait eu le temps de surprendre son expression. Un expression étrange, douloureuse mais avec une pointe de... il ne savait pas trop de quoi. En tout cas, ce n'était pas une expression qui ressemblait à Billy. 

Le lendemain matin, comme chaque jour, il était de retour dans la resserve, à tousser tout en classant de nouveaux DVD. Il était neuf heure, heure à laquelle, un lundi matin, il n'y avait aucun client et où lui et Robin était les seuls à gérer la boutique. Aussi, dès qu'elle fut sûre que tout était tranquille, que personne ne viendrait les déranger, elle vint le chercher pour leur séance de film hebdomadaire. 

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