5. Tan

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Un mois avant l'Élection...

    Une cloche sonna sur la place principale annonçant midi. Tan leva les yeux vers l'horloge par réflexe. Il jeta un coup d'œil au sac qu'il portait. Sa mère l'avait chargé d'aller faire quelques courses pour le déjeuner. Il était en retard.

    Il fixa le vendeur quelques instants avant d'attraper le sac de fruit qu'il lui tendait. Il lui mit une poignée de pièces dans la main – tout juste la somme exacte s'il avait bien compté – et s'enfuit à toutes jambes.

    Il zigzagua entre les étales du marché tout en interpellant les passants pour qu'ils s'écartent. Il percuta une femme, renversant son sac sur le sol. Il s'excusa à de nombreuses reprises en ramassant ses achats puis reprit sa course. Il regarda sa montre. Il était déjà en retard de cinq minutes.

    Il pressa l'allure en sortant de la place du marché. Il déboucha sur une rue très animée et fut forcé de ralentir à cause de l'étroitesse des trottoirs. Alors qu'il marchait, quelqu'un lui tapa l'épaule. Il se tourna, sur les nerfs, et croisa des yeux bleus. Détail peu informatif étant donné que tous les habitants d'Obsèl avaient les yeux bleus.

    — Où est-ce que tu cours comme ça Tan ?

    Il dévisagea Pauline, son amie d'enfance. Derrière elle, son petit-ami Léon essayait tant bien que mal de tenir un sac presque aussi gros que lui. Tan fronça les sourcils mais décida de ne pas se poser de questions. Il n'avait pas le temps.

    — Je rentre chez moi, ma mère m'attend pour préparer le repas, j'ai formation cet après-midi.

    Pauline loucha sur le sac du jeune homme.

    — Je vois. C'est toi qui fais les courses aujourd'hui.

    — Il faut que j'y aille, marmonna-t-il en leur tournant le dos.

    — À la prochaine ! le salua Pauline.

    — Salut Tan, ajouta Léon.

    Ils le dépassèrent en quelques enjambées. Tan secoua la tête et reprit son chemin. Il arriva chez lui vingt minutes plus tard. À cause de ses amis, il avait perdu encore plus de temps. Il les aimait bien mais aujourd'hui, il aurait préféré ne pas les croiser.

    Il passa la porte en annonçant sa présence puis retira ses chaussures. Ils habitaient à la limite de leur petite ville, dans une maisonnette simple mais charmante. Ils ne vivaient pas dans le luxe mais cela leur suffisait. Ils avaient une salle de bain, deux chambres, une cuisine et un salon. Tout juste le nécessaire.

    Tan déposa son paquet sur la table de cuisine en embrassant sa mère sur la joue.

    — Tu en as mis du temps.

    — Je n'ai pas vu l'heure passer et puis j'ai trébuché et également croisé Pauline.

    — Pauline ! répéta-t-elle. Je l'avais presque oubliée. Comment se porte-t-elle ? s'informa-t-elle en sortant les aliments du sac.

    — Très bien. Elle est en couple avec un garçon du coin, Léon.

    — Oh bien. Ses parents doivent être heureux.

    — J'imagine.

    En fait pas du tout. Tan se demandait bien ce que les gens pouvaient apprécier dans les relations de couple. Celles de leurs enfants comme les leurs. Lui tout ce qu'il en retenait, c'était que son père et sa mère s'étaient aimés puis on avait emmené son père loin du foyer familial pour sauver une autre famille. Les couples ne duraient jamais longtemps. Surtout quand on était jeunes.

La Légende d'AédéWhere stories live. Discover now