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Jimin et moi nous étions installés de nouveau à la bibliothèque universitaire pour continuer à écrire notre long-métrage. Comme c'était une histoire que je n'avais pas mise en script, il fallait choisir précisément ce que l'on gardait ou non, ce que l'on rajoutait entre certaines scènes, et cela faisait une heure et demie que nos méninges tournaient à plein régime.

Nous avions repris notre table qui était le plus en retrait, mais de la chaise où je m'étais assis, j'avais une vue sur une grande partie de l'espace travail. C'était la première fois qu'il y avait autant de monde. Jimin, lui, en était dos. Mais ce n'était pas le fait qu'il y aie beaucoup de personne qui me dérangeait, c'était le silence. Un silence lourd et impérial qui dominait la bibliothèque depuis que j'étais arrivé.

Jimin n'avait pas non plus beaucoup parlé, je ne me rappelais plus de sa voix. Sortant de son ordinateur, il prit ensuite son téléphone et, comme tout jeune, navigua dessus. Il se donnait une petite pause bien méritée je devais dire.

Je continuai à tapoter mon clavier d'ordinateur pendant quelques secondes, et lorsque je terminai ma phrase, je regardai l'heure car mon ventre grognait légèrement.

Sauf qu'il n'y avait pas d'heure.

Celle de mon ordinateur était devenue folle, me faisant froncer les sourcils comme ils n'avaient jamais été.

Minuit dix.

Sept heures deux.

Treize heures trente-trois.

Deux heures cinq.

Dix-huit heures dix-huit.

Je louchai alors sur ma montre, la même chose. Les aiguilles du temps tournaient à plein régime dans sa cage de verre.

Et l'air commençait à me manquer.

Tu vas continuer à nous le cacher encore longtemps ?

Mon cœur se pencha à mes lèvres. Jimin venait de me poser cette question. Cette question dont j'avais peur depuis quatre ans, qui pouvait me faire passer à un étudiant de cinéma à un prisonnier, enfermé sous les barreaux pendant des années si ce n'était à vie.

Craintif, je levai les yeux vers lui. Et l'oxygène se transforma en gaz carbonique.

Il me fixait, le portable dans l'une de ses mains.

La bibliothèque entière s'était tournée vers moi, j'étais devenu le centre d'intérêt. Certains regards passaient entre des livres d'étagères, d'autres provenaient de l'autre bout de l'étage. Peut-être même que ceux au dessus regardaient le sol, et ceux d'en dessous regardaient le plafond.

Jimin, à un mètre de moi, sourit.

Tu pensais que vouloir une nouvelle vie était si facile ?

Mes mains devinrent moites, mon cœur battait, j'avais chaud comme si on venait de me téléporter dans le pire des déserts, mes lèvres tremblaient et coupaient toute envie de sortir un son. Mon corps se paralysait, enlacé par un démon.

La bibliothèque me sourit de la même façon que Jimin, qui lui, me tendit son téléphone.

Il voulait me monter une photo.

Une des rares photos de moi.

La photo de Coquelicot, avec Kim Taehyung.

Sauf que j'étais vêtu des mêmes vêtements qu'il y a quatre ans. Tout en noir, rouge. Et le cadre était bien plus sombre.

Une autre photo apparue, et mon repas de ce midi menaça de sortir.

J'avais dix-sept ans, j'étais vêtu de noir et de rouge, et je filmai les ténèbres. C'était ce jour-là.

❝𝐓𝐎:𝐊𝐘:𝐎𝐎❞ ᵗᵏWhere stories live. Discover now