Il commence à me poser des questions sur moi, sur ma vie, ce que je fais. Il tente d'amasser un maximum d'informations sur moi dans le peu de temps qui nous est imparti : j'ai fixé les limites avant le rendez-vous, pas plus de deux heures.

— Et tu es venue seule ? me demanda-t-il

— Oui, mon petit ami est ... occupé ailleurs

— Et ta mère ? J'aurai bien aimé la revoir

— Elle est décédée cette été

— Oh, je suis désolé de l'apprendre

C'est maintenant mon tour de poser les questions. J'ai l'honneur de rencontrer Joseph, 47 ans, mécanicien en Alsace. Il s'est marié il y a 4 ans et a eu deux enfants. J'ai donc un demi-frère de 16 ans et une demi-sœur de 13 ans que je ne rencontrerais probablement jamais, mais bon, ce n'est pas grave.

— Et pourquoi vous êtes partis à ma naissance ?

Il insiste depuis le début pour que je le tutoie, mais je me refuse de le faire. Le vouvoyer pendant une question aussi importante, c'est une petite provocation volontaire.

— Je ... Je ne me sentais pas prêt à avoir un enfant et ...

— Et avoir un enfant 4 ans plus tard ne vous dérangeait pas ? Ne jamais revoir ma mère, la laisser seule avec un enfant ne vous a jamais dérangé ?

Il ouvre la bouche mais aucun son n'en sort. Il ne sait pas quoi dire, il n'a pas d'excuses pour les conneries qu'il a fait il y a vingt ans.

— La seule raison pour laquelle je vous ai invité ici pour vous rencontrer, c'était pour vous le dire en face. Vous m'avez gâché la vie, tout comme vous avez gâché la vie de ma mère. Je ne suis pas ravie de vous avoir rencontré

Je me lève de ma chaise et je décide de quitter le café dans lequel nous étions installés. Je l'entends m'appeler dans le fond, mais je fais abstraction de ce qu'il dit, je ne veux plus le voir, j'en ai eu assez. Il a l'air d'une personne détestable, égoïste et irresponsable. J'ai eu ce que j'avais à lui dire, ça m'a suffi. Même si je m'attendais à une dispute bien plus théâtrale, j'ai eu ma dose.

Il ne me reste plus qu'à rejoindre Antoine au tribunal, j'ai entendu dire qu'il y avait un petit parc à côté, je compte bien aller faire un petit tour en attendant qu'il sorte avec le jugement en main. J'avance vite dans les rues barcelonaises, je sais quelle direction prendre et qu'il n'y a que quelques centaines de mètres qui me sépare de ma destination.

Moins de cinq minutes suffisent avant que je trouve un banc libre qui donnait sur une aire de jeu pour enfants. Ça me redonne un peu le sourire de voir tous ces petits espagnols jouer ensemble sous la surveillance de leurs parents.

Je regarde l'heure sur mon téléphone en même temps que mes notifications, et je remarque que je ne suis restée qu'une petite demi-heure avec mon père. Il me reste encore beaucoup de temps à tuer, il va falloir trouver des occupations.

Après plusieurs minutes à défiler mes différents fils d'actualité, j'entends au loin un rire qui me semble familier, mais il est encore trop lointain pour que je puisse le reconnaître. Je cherche tout autour de moi la provenance du son, et remarque trois personnes qui arrivent au loin sur un petit chemin.

Mia et les parents d'Antoine.

Que faire, aller les voir sans qu'ils me connaissent ? Ou fuir lâchement ?

À mesure que je n'arrive pas à prendre ma décision, ils approchent de plus en plus de l'aire de jeu devant laquelle je suis installée.

— Loré' ! cria une voix avant que je ne voie Mia courir dans ma direction et se jeter dans mes bras

Entre deux services | Antoine GriezmannWaar verhalen tot leven komen. Ontdek het nu